EN DEUX MOTS : Ecœuré par son expérience sur le tournage d’ALIEN³, son premier long-métrage, David Fincher va finalement réaliser ce thriller culte grâce à son script séduisant. En mélangeant des genres qui vont faire sa renommée – le film policier et le thriller psychologique – le jeune réalisateur va prouvé sa radicalité. À l’époque SEVEN demeure un film macabre et restreint par son interdiction en salle pour les moins de 12 ans. Le studio, New Line Cinéma, rejette même la fin original – la tête dans la boîte – pour quelque chose de plus classique et vendeur. Ce n’est évidemment pas au goût du réalisateur, ni celle d’une des stars du film… Brad Pitt.
L’inspecteur Somerset est à une semaine de la retraite. Le voilà obligé de faire équipe avec son remplaçant, l’inspecteur David Mills. Leur collaboration commence par un crime monstrueux : dans un sous-sol, un homme obèse, ligoté à sa chaise, gît le nez dans son assiette : son estomac a éclaté… Ce meurtre n’est que le premier d’une série : aucun mobile apparent, aucun témoin, aucun rapport entre les victimes… sauf une mise en scène qui s’inspire des sept péchés capitaux.
synopsis officiel
Basé sur un script peaufiné (3 ans d’écriture) du scénariste Andrew Kevin Walker, le film échoue donc à Fincher dans sa version originale. Et pour le résultat qu’on lui connaît. Signant le premier vrai succès du réalisateur, sa première main mise sur un projet cinéma et sa première collaboration avec Brad Pitt (sur le trois en date) SEVEN (ou SE7EN comme il est surnommé de façon stylisée) se démarque justement pour sa radicalité. Et sa plongée extrême dans l’horreur humaine.
POURRIE COMME UN LUNDI
Le générique d’introduction du film est suffisamment révélateur. Du sens du détail qui définit le film (son tueur comme le réalisateur), de son montage intense (le film n’a pas de longueur malgré son genre), jusqu’à sa vision dérangeante et sans filtre du macabre. Rock industriel, images qui sautent, photographies insalubres, retranscription style « machine à écrire », l’immersion est déjà-là.
Outre le bancable, et parfaitement beau Brad Pitt, le pivot (et le recul nécessaire) du duo qui mène l’enquête se fait par le biais du déjà âgé Morgan Freeman. Son personnage de solitaire, littéraire, et désabusé flic proche de la retraite s’avère idéal. Notamment face au charme de son jeune et irrévérencieux acolyte. C’est pourquoi la première partie du film fonctionne aussi bien. Après une plongée, sinistre et succincte dans deux meurtres qui ouvrent la voie vers les péchés capitaux, la vie personnelle et professionnel des deux hommes s’entremêlent brillamment.
Le lien qui va unir et consolider le duo est fait par le seul personnage féminin du récit : Tracy Mills, la femme de David. Gwyneth Paltrow, compagne de Brad Pitt à l’époque, était le premier choix du réalisateur. Celle-ci brille par ailleurs par sa beauté et sa sensibilité à l’écran, seule et sans confident dans une ville de fou. Ce parallèle sera essentiel à la tension dramatique opérée en fin de film.
Filmé en grande partie en Californie (Los Angeles) mais aussi en Pennsylvanie, le film fait volontairement abstraction du nom de la ville où se déroulent les meurtres. La nécessité n’étant pas de juger mais d’observer les répercussions de la folie humaine dans un environnement urbain. Le scénariste fut d’ailleurs inspiré par son passage à New York pour l’écriture de son script.
« Je n’ai pas aimé mon passage à New York, mais c’est vrai que si je n’y avais pas vécu, je n’aurais probablement pas écrit Seven ».
Wikipédia
Il pleut à torrent dans la ville, mais cela ne suffit pas à laver la saleté qui s’y déverse.
JOHN DOE
Rythmé, découpé, millimétré comme le serial killer qui agit dans l’ombre, le montage, qui joue avec la montre grâce aux jours de la semaine, nous amène même jusqu’à l’un des plus terrifiants jump-scare du cinéma : le meurtre lié à la paresse. La lente (1 an) décomposition d’une victime droguée et torturée pour les desseins d’un tueur sans limites.
Et l’autre grand absent (volontaire) à l’écran, d’abord de visage et ensuite de nom, c’est le terrible antagoniste au centre du film.
En termes de visions d’horreurs (même hors-champs) SE7EN frappe fort. Et peu importe l’angle ou le format (photographies, suggestions, explications verbales). Inventif et terriblement barbare l’identité du serial-killer (après la seule et très réussie course poursuite (et sans voitures) du film) est ainsi dévoilée dans le dernier quart du film. Après 90 minutes d’enquête rigoureuse, 5 meurtres abominables et marquants, un léger avantage puis la découverte de l’antre de la bête, Kevin Spacey apparaît enfin.
L’acteur, dorénavant désavoué, révèle quoi qu’il en soit un talent à la hauteur de son personnage. Proche mais pourtant si loin des classiques serial killer fou furieux aux lubies évangéliques extrêmes. Comme le reste des quelques scènes qui définissent si bien les rares protagonistes, une d’entre elles suffit à convaincre. Un trajet qui mène le trio (les deux enquêteurs et John Doe) au bout de l’enfer.
Son nom est le premier qui apparaît après le clap de fin. Une autre idée de David Fincher. Et évidemment il aura une importance capitale, car oui, dans SEVEN c’est le méchant qui gagne à la fin. C’est suffisamment rare pour le souligner.
LA BOÎTE
On dit toujours d’un bon film que c’est un film avec une bonne fin. Même si l’information n’est pas irréfutable elle a du sens. La preuve ici, dans SEVEN le téléspectateur peut (majoritairement et allégrement) se souvenir de sa fin.
Il y a d’abord ce décor désertique, qui tranche complètement avec le reste du film. Comme d’autres références, il marque la fin de quelque chose, l’inversion du pouvoir en place. Il y a aussi, et surtout, le pouvoir de la suggestion. Celle qui est faite avec ce qui se trouve dans la boîte : la charmante petite tête de Tracy. Un curieux effet qui donne l’impression de la voir. Alors que non.
Il y a le calme impassible de Kevin Spacey, certain de la réussite de ce qu’il accomplit. Et enfin le visage meurtri de Brad Pitt dans ce plan large où se mêlent tour à tour haine et horreur. Vient l’exécution sommaire, lointaine puis en direct, du mal. Mais trop tard celui-ci à déjà réussi à tout ravager autour de lui. D’une volonté réciproque du duo Pitt/Fincher, le film devait s’arrêter là, sur le premier coup de feu. De façon encore plus brutale et sans la citation d’Hemingway qu’ils jugent tous deux inutile.
Finalement après quelques réserves et projections tests modérées l’épilogue de nuit est conservé. Donnant un (léger) brin de douceur et une belle sortie pour l’inspecteur Somerset, plus si proche de la retraite.
Ernest Hemingway a écrit : » le monde est un bel endroit qui vaut la peine qu’on se batte pour lui « . Je suis d’accord avec la seconde partie.
Somerset (Morgan Freeman), à la fin du film
CONCLUSION
Avec SEVEN, le réalisateur David Fincher dévoile un thriller noire d’une force brute et sauvage. Parfaitement monté, sans fioriture qui soustrait de générique additionne les deux heures à l’écran. Avec peu de recul et un grand sens du détail (ce qui va définir sa filmographie) il parvient à transcender un sujet enthousiasmant pour en faire un petit chef d’œuvre. Un don rare, une technique folle (même si sa mise en scène actuelle me sied davantage).
Quoi qu’il en soit, une référence du genre.
Les + :
- Un montage brillant, accompagné d’un sens du détail fou
- Son atmosphère et son ambiance macabre à souhait
- Un duo principal (Pitt/Freeman) et un autre secondaire (Paltrow/Spacey) idéaux
- Sa fin dantesque
Les – :
- On voudrait presque encore plus d’horreur graphique pour marquer la rétine
- Un léger manque dans la distribution secondaire, pour donner corps à un contexte politique quelconque autour de l’enquête et des décors
MA NOTE : 17/20
REALISATION : David Fincher / SCENARIO : Andrew Kevin Walker
AVEC: Brad Pitt & Morgan Freeman, mais aussi : Gwyneth Paltrow, R. Lee Ermey, Richard Roundtree, et Kevin Spacey (…)
DUREE : 2h06 / SORTIE (France) : JANV. 1996 / GENRE : Thriller, Policier
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