THE IDOL (annulée)

EN DEUX MOTS : Pour sa troisième grosse série diffusée en 2023, HBO va encore faire couler beaucoup d’encre. Polémique, chaotique, sexiste, THE IDOL enchaîne les qualificatifs et s’avère être une nouvelle production sulfureuse. Une production née a divisé. Son visionnage en avant-première à Cannes a évidemment fait monter la mayonnaise, pour un résultat probablement plus hérétique qu’escompté. Notamment concernant l’avis du public.

Suite à sa dernière tournée entachée par une dépression nerveuse, Jocelyn est déterminée à récupérer son titre de pop star la plus populaire et sexy d’Amérique. Tedros, un propriétaire de boîte de nuit au passé trouble, ranime la flamme en elle. Cette nouvelle romance l’entraînera-t-elle au sommet de son art, ou la fera-t-elle basculer dans les tréfonds de son âme ?

Allociné

Fort d’un postulat moderne loin de polir le blason d’un système Hollywoodien prêt à broyée star et starlette (dans l’industrie du cinéma comme de la musique) THE IDOL dispose d’arguments de vente de taille. Sous une idée originale de, et qui officie comme co-showrunner, on découvre la mégastar pop The Weeknd. L’artiste passe également devant la caméra est y interprète la mystérieuse chimère masculine au centre de l’histoire.

Face à lui, et sous le regard principal de, on découvre le mannequin et l’actrice montante Lilly Rose-Depp. (Fille du célèbre acteur et de la célèbre chanteuse et actrice Vanessa Paradis…). Celle-ci incarne l’oiseau blessé, manipulée, et soumise par un entourage qui l’emprisonne autant qu’il tente de la guider dans une toile d’araignée géante appeler show-business.

POLÉMIQUE & ÉROTIQUE

Un projet exaltant et casse-gueule, mais somme toute excitant puisqu’il se dévoile sous la supervision de l’artiste complet et tout aussi sulfureux Sam Levinson. Un réalisateur et scénariste de génie qui s’est principalement fait connaître grâce à un autre projet TV sur HBO : EUPHORIA.

Si les auspices semblaient-elles favorables, le fond de production du show le serait un peu moins. Pour preuve, originalement la réalisatrice Amy Seimetz est attachée au projet, avant que Levinson ne reprenne la main et en face un objet, une production, dite toxique. Une image qui semble lui coller à la peau malgré tout son talent déployé à l’écran. Avec cet ensemble de spéculations et peu importe les conclusions brumeuses qu’on en tire, le mieux est d’en juger de soi-même.

À l’arrivée, oui, THE IDOL n’est pas une œuvre qui fera l’unanimité. Notamment par sa vision qui semble rétrograde de la femme. Et pourtant il y a réellement des éléments à analyser derrière des scènes qui semblent destiner à choquer. C’est le cas de ses 25 premières minutes qui nous plonge littéralement dans l’univers étouffant de Jocelyn. Une jeune star dans le creux de la vague, magnétisé par la seule interprétation de Lilly Rose-Depp. On la découvre dans un premier plan-séquence très révélateur sur son comportement et sa frustration, tandis qu’elle livre une palette d’émotions faussement outrancière.

S’ensuit un débat sur la propriété d’image et le dilemme d’un coordinateur d’intimité. Entre une volonté pour la jeune femme de se mettre à nue (chose faite allègrement pour le reste de sa saison) et l’incapacité légale de le faire. Bien ironiquement la situation a pour but de mettre le doigt sur un parallèle ambivalent où Jocelyn n’est pas propriétaire de son propre corps, de son image.

TOXIC

Ses allégories sont légion dans la série et révèlent la détresse constante de cette star. Notamment à cette période de sa vie qui fait suite à un deuil éprouvant, sertie d’une relation toxique puis d’une rupture psychologique. Qu’il s’agisse d’une mère, de managers avides, d’amis/employés jusqu’à une figure d’âme-sœur, le développement de la toxicité et l’influence négative sont des sujets délicats et tendancieux. La preuve avec l’image que renvoie la série, qui semble rendre glamour l’influence masculine, la soumission ou encore le BDSM.

En réalité THE IDOL est intéressante dans son fond plus que dans sa forme. À titre d’exemple, toujours dans son pilote, la crise de son entourage vis-à-vis d’une photo compromettante est aussi amusante dans les propos qui la justifient, que triste dans l’engouement de sa diffusion sur Internet. Et des répercussions financières qui s’ensuivent. Notamment à une époque où l’image de vente compte plus que les gens derrière qui servent de vitrine.

Le profil de Jocelyn rappelle celui, il y a 20 ans déjà, de la star pop Britney Spears. Et du foutra médiatique qui l’a consumée peu à peu en parallèle de ses dérives personnelles. THE IDOL se révèle aussi bien être une satire d’une condition d’icône qu’un melting-pot de scandales permanent. Un enfer californien moins inspiré (et poétique) qu’EUPHORIA à titre de comparaison. Néanmoins et pour ma part, la série mélange aussi bien les moments de grâce que l’ambiguïté et le ridicule.

Sous cet aspect nuancé et borderline se place le couple formé par nos deux têtes d’affiche. Et idéalement en influenceur toxique Abel Tesfaye. Ou de son nom d’artiste The Weeknd. Il y interprète l’insondable, magnétique (charismatique) et pathétique (queue-de-rat) : Tedros. Aussi énigmatique que parfois caricatural. Un rôle sur-mesure et galvanisé par un égo évident. Pour un résultat clairement en demi-teinte.

HOLLYWOOD NIGHTMARE

Si on s’éloigne de ses principales composantes, (à savoir son intrigue et la relation de son duo star), THE IDOL brille de quelques prouesses. Auditives et visuelles. Resserré sur un format relativement court de 5 épisodes, allant de 45 minutes à 1h05, le récit s’avère avare en lieux pour mieux centraliser son propos. Propos qui peine à décoller à mi-saison toutefois.

En son centre il y a la villa luxueuse de notre star (qui appartient à The Weekend et vaut 70 millions de dollars), chaude mais glaciale et qui semble se pervertir à mesure qu’on l’a parcours au fil des épisodes et sous la présence du pitoyable Tedros. Ponctuellement et méthodiquement les autres décors a priori luxueux eux-aussi débordent de toxicité. Même s’ils sont trop peu nombreux. C’est le cas d’un club où se baladent des regards de prédateurs, d’un studio galvanisé par l’excellence, ou encore des bureaux où se signent des promesses qui font et défont des carrières.

Dans tous les cas, si ses différentes gammes visuelles manquent de renouvellement pour les aficionados du cinéma de son auteur, la nouveauté qui entoure sa bande originale ne lasse pas. Chaque épisode s’accompagne de quelques nouveaux titres modernes électriques, magnifié par les lyrics de The Weeknd, du génial Moses Sumney (qui tient un rôle récurrent ici), ou encore de la solaire Suzanna Son.

Un mot par ailleurs sur son casting qui se compose d’un certain nombre d’artistes, et dont les profils sont parfaitement représentatifs de notre ère actuelle. Variée, excentrique, délectable ou détestable. S’y détache les géniaux Jane Adams, Da’Vine Joy Randolph, ou Hank Azaria.

Enfin, pour le montage total de la série THE IDOL semble être un projet largement avorté. Juste après la diffusion du quatrième épisode HBO annonce même que la saison s’achèvera la semaine suivante. Sois au terme du cinquième épisode, contre six prévus au total. Dans sa finalité la série apparaît bel et bien comme inaboutie, et manque de substances dans son propos.

CONCLUSION

Son final divisera lui aussi, assurément. Que beaucoup jugeront inutile. Notamment avec son twist durant ses dernières minutes. Néanmoins ce dernier rempli ses conditions narratives et la ligne de son auteur, qu’elle nous plaise ou non.

Curieusement avec THE IDOL une partie de son public semble oublier comment le réalisateur arrive à traverser son récit par quelques moments de cinéma rares. Comme décrit dans ses lignes. Le bad-buzz semble intensif et dérisoire si on le compare à d’autres projets sans âmes.

Pourtant la série, tout au long de sa diffusion, récolte une moyenne aux alentours de 5/10 sur IMDb. Une hécatombe qui semble écourter la durée de vie du show et son avenir, c’est certain, et c’est bien dommage.

La série a bel et bien était annulée, et ceux dès la fin de l'été.

Les + :

  • L’acidité et la frontalité de son propos : la chute et la refonte d’une star de la pop
  • Le magnétisme et l’immersion de Lilly Rose-Depp dans son rôle
  • Quelques prouesses visuelles et surtout une nouvelle bande originale pleine de grâce moderne
  • La collaboration du showrunner avec de vrais artistes

Les – :

  • Son enveloppe de bonbon triptyque et outrancier trop appuyé
  • La performance et l’implication à double tranchant de l’artiste Abel « The Weeknd«  Tesfaye
  • Un montage qui plane sur la longueur malgré sa courte durée et qui manque de substances
  • Un quasi huis-clos qui aurait mérité plus de décors extérieurs et l’implication de seconds rôles trop peu présents

MA NOTE : 14.5/20

CRÉATEUR(s) : Abel Tesfaye & Sam Levinson & Reza Fahim

AVEC : Lilly Rose-Depp & Abel Tesfaye, Suzanna Son, Jane Adams, Troye Sivan,

mais aussi : Moses Sumney, Jennie Kim, Rachel Sennott, Hari Nef, Da’Vine Joy Randolph, Dan Levy, Eli Roth, Mike Dean, Karl Glusman, Ramsey, et Hank Azaria (…)

ÉPISODES : 5 / Durée (moyenne) : 55mn / DIFFUSION : 2023

GENRE : Drame / CHAÎNE : HBO

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