Après « Faire un film » de Lumet, on continue encore une fois avec un livre publié chez Caprici, qui décidément regorge de pépites sur le cinéma. Aujourd’hui, c’est donc au tour du livre « En un clin d’œil » écrit par Walter Murch. Ce dernier étant le célèbre monteur derrière de nombreux films de Coppola père.
Résumé du livre
« Rien n’est plus fascinant que d’écouter des heures durant ses théories sur la vie et le cinéma. Walter sème derrière lui des graines de sagesse comme Hansel et Gretel leurs miettes de pain – orientation et nourriture. » Francis Coppola
Walter Murch est le monteur et le mixeur attitré de Francis Coppola. Depuis quatre décennies, il a observé, pratiqué, analysé et transformé le montage cinématographique. Partant de la question « Pourquoi les raccords fonctionnent-ils ? », Murch raconte les aventures les plus extraordinaires de sa carrière, dont celle d’Apocalypse Now, et se concentre particulièrement sur le passage de l’analogique au numérique.
En un clin d’œil rend compte des méthodes qu’il n’a cessé d’inventer pour composer avec ses « propres volcans et glaciers intérieurs ». Le clin d’œil, mais aussi la cuisine, les chimpanzés, la médecine, la danse, les étoiles… sont quelques-unes des images convoquées afin de rendre irrésistiblement claire une pratique pourtant complexe.
Walter Murch livre la théorie d’un inventeur, mais aussi une approche unique du passé, du présent et des perspectives du montage.
Pourquoi vous devriez lire « En un clin d’œil »
L’auteur
Le livre provient à l’origine d’une transcription d’une conférence que Walter Murch a donné en 1988 à l’UCS de Los Angeles (célèbre école de cinéma aux États-Unis). Puis il a subi plusieurs modifications afin de le compléter, de corriger ce qui n’était plus d’actualité, et surtout d’ajouter une partie conséquente sur l’arrivée du montage numérique.
Concernant l’auteur en lui-même, Walter Murch est un monteur célèbre ayant remporté plusieurs oscars et ayant été nominé plusieurs fois également. On retiendra notamment son travail sur le Patient Anglais dont il a reçu l’oscar du meilleur montage et celui du meilleur mixage son. Rien de moins.
Dans sa filmographie, on peut aussi citer la trilogie du « Parrain », « Apocalypse Now », « Le Talentueux Mr. Ripley », ou encore « Ghost ». Nous sommes donc face à quelqu’un qui sait de quoi il parle.
Ça parle de quoi ?
Walter Murch s’offre ici un retour sur sa carrière et sa manière de monter. Il nous explique de manière très pédagogique comment il a travaillé toutes ces années, mais aussi les difficultés de ce métier.
Il explique notamment la nécessité d’identifier ce qu’il appelle les « mauvais morceaux » pour les supprimer du montage final. Et à l’inverse, il nous enseigne sa règle des 6 pour identifier les « bons plans » à conserver.
Murch témoigne aussi magnifiquement du travail d’équipe qu’il doit opérer, particulièrement avec le réalisateur. À bien des égards, le travail de monteur s’effectue seul ou presque. Mais le film sera le résultat d’un dialogue entre les deux coéquipiers. Le réalisateur doit faire comprendre sa vision du film, mais le monteur doit pouvoir expliquer en quoi un plan spécifique répond ou non à cette vision, et pourquoi il faut l’exclure ou au contraire l’inclure à cet endroit précis.
Le monteur a aussi suivi l’évolution des techniques et les modes. Il ne se contente pas de nous abreuver de son expérience passée. Murch porte aussi un regard critique sur le présent et le futur du montage. Il aborde longuement, dans un nouveau chapitre présent dans la dernière édition, la place du numérique.
L’auteur du livre conclut plus largement sur l’avenir du cinéma, dont il reste très optimiste. Je vous laisse d’ailleurs sur cette citation, qui même si elle a été écrite il y a plusieurs années, est encore criante d’actualité.
Une vision pessimiste a vu le jour au milieu du XXᵉ siècle, qui prévoyait la mort du cinéma et le triomphe de la télévision. On oubliait néanmoins de prendre en compte un facteur décisif : le désir – au moins aussi vieux que le langage lui-même – qu’ont les Hommes de quitter leur foyer et de se réunir autour d’un feu avec des inconnus pour écouter des histoires.
Walter Murch à propos du futur du cinéma