AVIS & ANALYSE : Ces dernières années, en parallèle à la saga GAME OF THRONES qui s’est achevée en 2019, HBO a lancé la production de plusieurs spin-offs. Dans un même temps la chaîne câblée américaine s’est également lancée dans la bataille du streaming avec HBOmax. Aujourd’hui elle accouche ainsi de la saison 1 du 1er spin-off de sa riche histoire : HOUSE OF THE DRAGON. Tout aussi motivé par le succès fulgurant de son plus gros HIT, il y a déjà plus de 10 ans.
Celui-ci intervient après l’avortement d’un spin-off – BLOODMOON, qui devait couvrir la brumeuse période de la Longue Nuit, 8000 ans auparavant. Un projet dirigé par Jane Goldman (au scénario de Kingsman) et qui aura coûté 30 millions à HBO avec son pilote.
Tout aussi important, le spin-off actuel s’intéresse notamment à un moment majeur du règne TARGARYEN et survient 3 ans après la fin controversée de la saga culte.
Cette critique se divise en deux parties, la seconde étant publiée après la diffusion du finale de la saison le 24 octobre 2022 : ICI
PRÉLIMINAIRE
HOUSE OF THE DRAGON adapte une partie du roman FIRE & BLOOD de George R.R. Martin. Il couvre la trouble période intitulé La Danse des Dragons se déroulant approximativement 170 ans avant les évènements de GAME OF THRONES. C’est le nom attribué à une guerre civile sanglante et meurtrière pour le pouvoir du Trône, qui conduit inexorablement à la chute des Dragons plusieurs années après.
Cette nouvelle production mastodonte évaluée à 200 millions de dollars a ainsi l’avantage de se baser sur des écrits déjà intégralement publiés. Qui ont tout de même la subtilité (à double tranchant) de ne pas s’étendre sur de nombreux détails de son histoire. Les deux romans étant subjectif dans leurs écritures – se basant tels des faits relatés par des Mestres ayant recueilli des hauts faits et divers ragots.
Tout était là pour exciter les fans de la saga, avare d’une nouvelle dramaturgie fantastique à grande échelle. Le choix de Ryan Condal comme showrunner était beaucoup moins exaltant, vu son travail sur des productions mineures tel que Colony à la télévision, ou Rampage au cinéma. Malgré tout, les retours de l’auteur à la production, du réalisateur Miguel Sapochnik, ou du compositeur Ramin Djawadi, peuvent rassurer.
C’est donc pour fin août, avant la fin d’un été torride, que HBO tente de mettre le feu. Tout en concurrencent la tout aussi attendue, et plus gargantuesque encore, production d’Amazon – Les Anneaux de Pouvoir (en V.F) – sortie tout début septembre.
PAN DU PASSÉ
HOUSE OF THE DRAGON se révèle avec un premier élément crucial de son intrigue : une timeline tout d’abord très large. Afin d’étoffer l’envergure, la compréhension et la genèse qui entoure la guerre intestine qui opposa les deux clans de la famille Royale Targaryenne. Et le royaume. D’une trentaine d’années précisément, et notamment durant le règne de Viserys 1er (Paddy Considine), 100 ans après la conquête d’Ageon sur Westeros.
Ce préquel s’ouvre sur un pilote puissant de plus d’une heure, intitulé « The Heirs of the Dragon ». Sous la voix-off d’Emma d’Arcy qui interprète la princesse Rhaenyra (adulte) l’histoire revient sur la position du règne Targaryen lors du grand conseil de 101, à Harrenhal.
Dans une courte scène sobre et imposante, le Vieux Roi annonce que les seigneurs ont élu Viserys héritier de la Couronne. Premier exemple avant tant d’autres de la place laisser à la femme à cette époque. Vient alors une citation informative pour débuter la série, et qui aura du sens vis-à-vis de la série mère, Game of Thrones.
Le règne du Roi Viserys 1er entre dans sa neuvième année.
172 ans avant la mort du Roi Fou, Aerys, et la naissance de sa fille la princesse Daenerys Targaryen.
House of the Dragon, citation épisode 1
PROMESSE DU FUTUR
Sans générique et sous la caméra experte de Miguel Sapochnik, l’épisode s’ouvre réellement sur le vol du dragon Syrax, monté par la jeune Princesse Rhaenyra (Milly Alcock, véritable révélation). Un parallèle qui nous permet toujours de découvrir la Capitale de Westeros sous différents angles. Chose largement exploitée au cours de ce pilote et première saison. Mais aussi de donner du contexte à une époque où les dragons était davantage synonyme de pouvoir et fascination plutôt que de peur et carnage.
Hormis une formidable scène funéraire sur Peyredragon, l’intégralité de l’épisode va alors se dérouler à Port-Réal. A une époque prospère, de richesse et de luxure. Car HOUSE OF THE DRAGON remplit allègrement son cahier des charges sur la présentation d’un univers médiéval réaliste et brutal. Quelques fulgurances d’hémoglobine nous le prouvent encore, celles qui avait tant séduit il y a quelques années. Sauf qu’aujourd’hui, la série joue dans la cour des (très) grands.
Décors extérieur comme intérieur. Costumes et armures. Dragons sous différentes formes et couleurs, le travail et le rendu de la série impressionne pour sa profusion de détails. On assiste au travail étroit d’une production experte en la matière paye. Technique d’abord, comme de l’auteur lui-même et les souhaits qu’il a fait au showrunner sur la cohérence de son univers. Et ce qu’on redécouvre avant-tout, et qui marque la rétine, c’est une version bestial du Trône de Fer. Une enfilade d’épées à l’image et au pouvoir dangereux.
MAGNÉTISME & NUANCES
En présentant le portrait de la Cour à cette époque, la première saison plante également les graines de la furieuse guerre à venir. Les personnages demeurent le nerf dramatique de cet univers fantastique. Découvrir différents profils de la famille Targaryen s’avère être un régal et non une redite. En quelques scènes, Ryan Condal définit notamment la relation conflictuelle des deux frères à sa tête : Viserys et Daemon (Matt Smith).
Nul doute que la prestation du second (illustre Prince Philip dans The Crown, et génial Doctor dans Doctor Who) risque de faire des émules tant sa présence s’avère magnétique à l’écran. Il suffit de voir l’intensité de son aura salvatrice à chaque moment d’irrévérence et de cruauté. Sans surprises cependant, car son parcours et son caractère ambigu demeurent fascinants. Son formidable interprète s’occupe du reste. À cela, Matt Smith fait tout de même la différence et s’avère le choix parfait pour ce riche personnage.
Personnellement, c’est la prestation de Paddy Considine dans la peau de ce Roi obnubilé par ses rêves et son destin qui, pour moi, engendre parfaitement la genèse du conflit grandissant. D’abord par sa faiblesse de caractère. Pourtant ponctuée par quelques fulgurances d’autorité ultra convaincante, mais qui font de lui un homme (principalement) tempéré et érudit. Ensuite par son destin teinté de tragédie comme va-nous le prouver la terrible scène de joute/accouchement au milieu du premier épisode.
SUCCESSION
Dans un montage parallèle, le sang coule à flot. Viserys doit choisir de sacrifier sa femme pour sauver son fils à naître par le biais d’une terrible césarienne. Tandis que son frère joute avec entrain contre un jeune arriviste charismatique (Fabien Frankel). Les deux frères vacilleront.
Par la suite, une succession d’événements amènera le Roi à écarter son tempétueux frère. Au profit de sa fille qu’il proclame héritière légitime du Trône de Fer. Un choix non sans conséquences, inédit dans l’histoire de Westeros et qui va alors commencer à diviser le royaume.
Pour conclure son épisode, une révélation que ce père va faire à sa fille s’avère, elle aussi, inédite. Même pour les lecteurs. Et par conséquent un élément crucial qui définit les règnes Targaryen.
D’après notre histoire, Aegon regarda au-delà de la Néra et vit des terres riches à saisir. Mais c’est autre chose qui l’a poussé à la conquête. C’est un rêve. Aegon a vu la fin du monde des hommes. Cela commencera par un hiver terrible qui déferlera depuis le Nord lointain. (…) Quand cet hiver viendra, tout Westeros devra se dresser contre lui. Pour que l’homme survive, il faut un Targaryen sur le Trône de Fer. Un Roi ou une Reine capable d’unir le royaume contre le froid et l’obscurité. Ce rêve est le chant de la glace et du feu. C’est un secret qui se transmet de Roi en héritier depuis Aegon.
Viserys à sa fille Rhaenyra
SECONDE MAIN, DOUBLE MESURE.
HOUSE OF THE DRAGON dispose ainsi (pour l’instant à plus petite échelle) de ce souffle épique pour son histoire shakespearienne. Seuls quelques personnages sont toutefois fort bien représentés, malgré des interprétations secondaires non négligeables, mais servant de prime abord de charismatiques figurants.
Rhys Ifans se démarque toutefois du lot dans son rôle d’Otto Hightower, la Main du Roi au sens politique avisé. L’acteur britannique use de son charisme toute en nuance et s’impose gentiment comme le véritable homme de pouvoir à la Capitale. Et l’ennemi numéro 1 de Daemon Targaryen.
La suite de la série va rapidement mettre en avant cette opposition tout comme le jeux politique sournois de ce père qui exhorte sa fille, Alicent Hightower (Emily Carey) d’approcher le Roi, suite à la perte de sa femme. Un jeu de pouvoir habilement mis en lumière dès le second épisode « The Rogue Prince ». Il présente en surface quelques personnages importants issus de deux grandes familles de l’époque : Hightower et Velaryon.
L’ÉTOFFE DES (ANTI)HÉROS.
Et tandis que le temps passe inexorablement entre les épisodes – de quelques mois à parfois quelques années – les familles qui gravitent autour du pouvoir s’agrandissent. Le casting s’agrandit lui aussi petit à petit même si encore les seconds rôles manquent de scènes pour les illustrer. Les profils Targaryen eux évidemment passionnent et permettent une narration resserrée inédite et passionnément dramatique.
Chaque épisode réserve son lot de nuances sur ses principaux profils. Les doutes jaillissent dans l’épisode 3 « Second of His Name » après la naissance du Prince Aegon II naît de l’union fructueuse entre le jeune couple royal. Et bien qu’imparfait cet épisode se pose en démonstration de force dans ses idées d’intimités. De confidences multiples jusqu’à la mise en image brutale d’un affrontement dans les Degrés de Pierre. Matt Smith se pose toujours là, dans la nuance la plus ahurissante de réussite.
La suite va d’ailleurs nous le prouver à différentes reprises. Qu’il s’agisse d’un apprentissage incestueux aux arts de l’amour ou le meurtre déguisé d’une épouse encombrante. (Voir détails des épisodes 4 & 5 : ICI). Daemon demeure une étrange et fabuleuse créature, a l’image de son hypnotique Dragon Caraxès.
TOURS D’IVOIRES
Cette première partie de saison conserve son crédo d’intimité, peu enclin aux fulgurances scénaristiques. Néanmoins ce qu’elle dévoile, elle le dévoile avec réussite et nuances. A l’image même de ses principaux personnages. Parmi eux se dressent les deux révélations qui interprètent respectivement Rhaenyra & Alicent. Si le charme de la première n’est plus à prouver par son caractère et son destin, la seconde dispose d’une belle transformation.
Au centre de cette fable féminine se dresse une fabuleuse sororité. Sa mise en images, puis sa lente déconstruction s’avèrent être une genèse intestine et personnelle très juste dans le récit. Qui l’éloigne de son modèle, Game of Thrones et de sa largeur. Ainsi, si HOUSE OF THE DRAGON ne nous étourdis pas (encore), elle dispose d’atouts formidables pour sa continuité.
CONCLUSION
Les + (de la première partie) :
- Une fabuleuse distribution. Notamment avec la révélation Milly Alcock
- Le pouvoir des images et d’un univers crue et richissime
- Le caractère intime de cette fable tragique, qui l’éloigne de son aînée
Les – (de la première partie) :
- Un casting secondaire prometteur mais peu exploité
- Un manque de grand moments forts
MA NOTE (de la première partie) : 17.5/20
CRÉATEUR(s): Ryan Condal & George R.R. Martin
AVEC : Paddy Considine, Emily Carey, Milly Alcock, avec Rhys Ifans, et Matt Smith,
Steve Toussaint, Eve Best, Fabien Frankel, Sonoya Mizuno, Graham McTavish, Matthew Needham, Jefferson Hall,
mais aussi : David Horovitch, Bill Paterson, Gavin Spokes, Ryan Corr, Wil Johnson, Theo Nate, Steffan Rhodri, Daniel Scott-Smith, Sian Brooke (…)
ÉPISODES : 5 / Durée (moyenne) : 1h / DIFFUSION : 2022
GENRE(s) : Drame, Aventure, Fantastique / CHAîNE : HBO
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