TRUE DETECTIVE – saison 4 (anthologie)

EN DEUX MOTS : Plus de 4 ans après une 3e saison sous-estimée, la saga policière et anthologique culte TRUE DETECTIVE fais un retour quasi-inattendu. Certes après plusieurs mois de teasing et une diffusion repoussée en tout début d’année, son arrivée n’est plus vraiment une surprise. En revanche, son résultat l’est.

10 ans après une première saison inégalable, la saga revient en effet sous une nouvelle direction. Le showrunner original Nic Pizzolatto quitte sa casquette de scénariste (mais demeure producteur exécutif) pour laisser la place à la méconnue Issa López. La scénariste réalisatrice d’origine mexicaine compose ainsi une nouvelle œuvre rebaptisée : NIGHT COUNTRY.

Alors qu’une longue nuit d’hiver tombe sur la ville d’Ennis, en Alaska, les huit hommes en charge de la station de recherche arctique de Tsalal disparaissent sans laisser de traces. Pour résoudre l’affaire, les détectives Liz Danvers et Evangeline Navarro vont devoir surmonter leurs propres démons et sonder les glaces éternelles à la recherche des secrets les plus profondément enfouis.

Allociné

Cette intrigante enquête glaciale, intégralement mis en scène et scénarisée par la nouvelle showrunner, dévoile deux enquêtrices chevronnées. Bien aux antipodes de caractère fleur bleue. L’illustre Jodie Foster incarne tout d’abord l’inébranlable et méticuleuse Liz Denvers. Non sans un brin de tempérament. L’ancienne championne du monde de boxe féminin Kali Reis use, quant-à-elle, de tout son charisme pour composer l’autochtone Evangeline Navarro.

Mais malgré le charme d’un projet féminin en pleine incursion dans un lieu atypique, ce retour convainc t-il réellement ? Où la pression inextricable d’une saga anthologique tel que TRUE DETECTIVE s’avère-t-elle trop lourde à portée ? Hélas un peu des deux, et à l’arrivée assurément la moins bonne saison de la saga policière.

TEMPÉRAMENT DE FEU.

Cette 4e saison rend, quoi qu’il en soit, largement hommage aux précédentes. Et notamment la première à laquelle elle fait directement référence. D’un duo d’apparat mal assorti au mysticisme qui entoure le décor. Ce mysticisme prend d’ailleurs une place primordiale dans le récit, pour un résultat à double tranchant néanmoins.

Si ça faune et sa fleur locale sévère logiquement réduite ses habitants sont à l’honneur. Du magnétisme des Amérindiens a leurs chants hypnotiques, leurs voies résonnent. Mais jamais suffisamment contre l’appât du capitalisme. De ce fait, le peuple autochtone est principalement présenté par des profils d’habitants opposés à l’exploitation d’une mine qui représente 50 % des emplois locaux. Le show n’en oublie pas ses meurtres étouffés et/ou ses tragédies locales pour cultivé le suspense. Pour un résultat en demi-teinte parfois.

En termes technique, NIGHT COUNTRY demeure une production assez solide. En revanche, la réalisation d’Issa López n’est jamais à proprement éblouissante. Quant au climax glacial du show, il est principalement dû à la force naturelle des paysages d’Alaska. Renforcé par son phénomène de nuit polaire. Une force naturelle qu’on conçoit aisément et qui contribue à son ambiance particulière.

Par exemple, les visages meurtris de ses victimes sont une image qui colle à la rétine. Contrairement aux relents fantastiques du show, qui aident peut-être à la caractérisation d’Ennis, mais ne contribue pas réellement au climax de suspense. À mes yeux.

De plus, sa bande-son s’avère bien plus pop qu’auparavant. Si le choix du registre n’est jamais désagréable (et ne manque pas de goût) il diminue la gravité latente de son récit. Pour un résultat un brin impersonnel hélas.

MENTAL D’ACIER.

Au cœur de l’enquête, on retrouve deux profils aux attraits communs de la saga. Chevronnés mais imparfaits. Charismatique et tourmentés par des démons passés et présent.

Jodie Foster s’éloigne par exemple de ses registres de prédilection, ou du moins ceux auquel on peut l’associer communément. (Et même si elle demeure bien plus discrète au cinéma depuis de nombreuses années). Son personnage s’avère surqualifié pour les cas qu’elle doit gérer habituellement dans le trou paumé d’Ennis. Ce qui ne l’empêche pas d’être partiellement désagréable ou manipulatrice avec son entourage. De sa belle-fille autochtone (Isabella LaBlanc) à un jeune inspecteur motivé (Finn Bennett, belle révélation).

Mais la véritable révélation vient, bel et bien, de la magnétique Kali Reis. Une vraie gueule de cinéma, qui, au-delà de la dureté naturelle de son profil personnel, apporte de belles nuances au personnage qu’elle incarne. On appréciera notamment le choix d’une production qui ne la cantonne pas au registre de l’action pour quelque chose de plus terre-à-terre. Dans tous les cas, l’actrice de 37 ans impressionne par sa présence et son aisance de jeu.

Malgré une direction secondaire assez réussie, allant de Fiona Shaw à John Hawkes, les personnages additionnels manquent d’épaisseur. Où sont caractérisés trop simplement. Qu’ils soient connus (on peut noter la présence de Christopher Eccleston qui s’est illustré dans The Leftovers) ou complètement méconnus.

Dans tous les cas, avec 6 épisodes, aussi consistant soient-ils (une bonne heure à chaque fois), l’attention du téléspectateur se focalise davantage sur son duo de tête.

CŒUR DE GLACE.

Seulement NIGHT COUNTRY demeure une anthologie policière qui gère assez mal son temps. Ou du moins son format et les mystères qui le composent. Malgré une ambiance évidente, la série se découpe en 3 parties de 2 épisodes assez formel. De l’évolution de son enquête en premier lieu, dans laquelle sont éclairés ses principaux profils, puis une mi-saison plus personnel et qui regroupe événements passés et présent, jusqu’à une conclusion qui éclaire le tout. Et qui demeure plus soutenue.

Si entremêle quelques belles nuances, toujours, autour de personnages borderline, craquelés. Ou la révélation (sommaire) de groupes financiers gangrénés par le pouvoir et l’argent. Cette fois dans un climax hivernal ahurissant d’intensité, même si cet attrait se révèle presque anodin au moment de sa conclusion.

Et pour sa résolution justement, qui amène notre duo au cœur le plus sombre de sa nuit polaire, son final d’1h15 en décevra plus d’un. En se recentrant quasi exclusivement sur son duo d’enquêteurs, cette ultime plongée au cœur de la nuit demeure très personnelle. Ce faisant, elle oscille entre quelques errances et quelques beaux moments d’introspection concernant nos héroïnes.

Dans tous les cas, cette saison, est également traversée par de ponctuelles incursions dans l’horreur sourde et des visions fantastique. Graphiquement, cela fait son petit effet. En revanche, son attrait mystique se révèle en surdose, au point d’être parfois inconsistant dans sa démonstration. D’autant que dans sa finalité, il cultive un mystère assez peu percutant et vain.

Reste son épilogue plus crépusculaire et lumineux qui appuie concrètement sa vision féministe avec tact. Une belle façon de conclure cette saison en demi-teinte.

CONCLUSION

Pour son retour, et sa réinvention sommaire, la saga TRUE DETECTIVE manque sa cible malgré des atouts évidents. NIGHT COUNTRY est en effet une petite déception compte tenu de son potentiel actuel. Cela reste un énorme succès pour la plateforme (malgré des avis très mitigés) et une production policière bien au-dessus de la moyenne.


Les + :

  • Un retour inattendu, et tout de même exaltant, dans une ambiance et un postulat qui fait forte impression.
  • L’immensité glacial et indomptable que représente l’Alaska.
  • Une direction féminine forte et complète.
  • Un nouveau duo parfaitement complémentaire et bien interprété.
  • La révélation Kali Reis. De boxeuse professionnelle à actrice emplie de magnétisme.
  • Une vision qui semble réaliste autour de la condition des Amérindiens dans un paysage si reculé.

Les – :

  • Malgré tout ses atouts la production de la nouvelle showrunner – Issa López – manque de souffle. Son format le prouve puisqu’elle n’exploite pas sa courte durée et manque d’intensité.
  • Si l’ambiance demeure glaciale, cette saison perds en personnalité propre. C’est par exemple le cas avec une bande son pop stylisé, mais moins pesante.
  • Parallèlement à son duo de tête très réussi et assez nuancé le casting secondaire fait plus pâle figure. Malgré de beaux noms du petit écran au générique.
  • Outre le genre policier plein d’indices et son postulat fort, NIGHT COUNTRY s’enlise dans une surdose de mysticisme et d’horreur trop peu convaincante.

MA NOTE : 15/20

Les crédits

CRÉATEUR : Issa López

AVEC : Jodie Foster & Kali Reis, Fionna Shaw, Finn Bennett, Isabella LaBlanc, avec Christopher Ecclestion, et John Hawkes,

mais aussi : Dervla Kirwan, Aka Niviâna, Joel Montgrand, Anna Lambe, Nivi Pedersen (…)

ÉPISODES : 6 / Durée : 1h / DIFFUSION : 2024 / CHAÎNE : HBO

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