Après un mid-season fracassant THE LAST OF US entame sa deuxième partie de saison avec peu d’action mais beaucoup d’émotions. Une nouvel épisode d’une heure bien tassé qui marque un tournant émotionnel pour nos deux têtes d’affiches et s’avère bourré de références. Et non pas seulement vis-à-vis du premier jeu qu’il adapte encore très fidèlement, mais en ouvrant aussi des pistes bien connues du second.
Craig Mazin poursuit de manière infatigable l’écriture d’un show qu’il a su s’approprier et adapte en un épisode toute la portion »Automne » du jeu. De l’arrivée dans le Wyoming jusqu’à la sérieuse blessure de Joel (Pedro Pascal) à l’Université du Colorado.
La réalisation est cette fois confiée à la méconnue Jasmila Zbanic, une réalisatrice (enfin !) indépendante originaire de Bosnie-Herzégovine, qui va capter avec poésie les vastes territoires américains. Mais aussi le regard féminin, protectrice, et plus sensible d’Ellie (Bella Ramsey).
ÉPISODE 6 : Kin
EN DEUX MOTS : Après un succinct flashback sur le suicide choc d’Henry (Lamar Johnson) ce sixième épisode s’ouvre sur un des nombreux plans larges et vierges qui va composer »Kin ». Communément traduit par le mot »proche », Kin peut aussi représenter la parenté. Deux termes centraux de ce segment qui privilégient l’émotion et dévoilent à cœurs ouverts les peurs de nos héros.
3 mois se sont écoulés depuis les terribles événements de Kansas City. L’ouverture de cet épisode n’est pas anodine et résonne dans la tête de Joel. Chose qu’on va pouvoir découvrir dans une scène charnière face à son frère (Gabriel Luna) retrouvé.
Entre temps THE LAST OF US alimente son univers par une première scène inédite face à un vieux couple reclus amérindien (Graham Greene / Elaine Miles). Qui va notamment les informer d’un potentiel danger environnant. Notre duo va encore flirter avec les références, chose qui va largement alimenter leur dynamique en perpétuel évolution.
Dans un premier temps Craig Mazin insiste sur l’incapacité de Joel à s’ouvrir tout en rejetant l’attachement qui le relie à sa cargaison. Chose qu’on découvre dans une scène au coin du feu où il est question d’avenir. Un ranch, des moutons, l’espace, la série fait pleinement références à des éléments narratifs cruciaux de The Last of Us Part II.
C’est avant tout subtil pour les fans, c’est d’autant plus réussi en fin d’épisode lorsque Joel fait référence à un autre rêve.
JACKSON FOUR
Au détour d’une rivière maudite et d’un barrage hydraulique, c’est une autre incapacité de Joel qui est dévoilée en image. Face à des survivants méfiants, notre héros se retrouve paralysé par la peur. L’incapacité d’agir lorsque Ellie se fait renifler par un chien censé détecter sa morsure. Un sentiment que la réalisatrice capte à la perfection face au talent de son interprète.
Pourtant le destin amènera nos deux têtes d’affiches jusqu’à Jackson. Endroit iconique du jeu, une petite ville fortifiée au milieu des montagnes du Wyoming qui abritent 300 colons. Sans surprises la production met brillamment en image ce retour à la civilisation, sans désolation et avec simplicité.
L’heure des retrouvailles est arrivée, dans une scène qui ne manque pas d’émotion les deux Miller s’enlacent sous les douces notes de Gustavo Santaolalla. Ici et ailleurs durant l’épisode, les mélodies du compositeur résonnent dans nos oreilles et marquent autant la douceur que la mélancolie de ses grands thèmes. Quoi qu’il en soit, on retrouve un Tommy moustachu (contrairement à ce que l’affiche promotionnel laisser suggérer) et robuste face à une frère aînée vieillissant.
C’est sous les auspices de sentiments contradictoires (notamment entre les deux frères) que le reste de l’intrigue à Jackson va ensuite se dérouler. Entre des actes du passé impardonnable et la vision d’un avenir parental. A ce titre le rôle primordial de Maria est ici identique (sauf en apparence) sous les traits de la charmante Rutina Wesley.
Sapins de Noël et bacon. La belle vie.
Joel à Tommy
Ainsi après une rapide présentation (non sans subtilités ironiques) de la communauté de Jackson et la vision d’un poulain (paillette) bien connu (et possiblement de Dina), Kin renforce son intensité dramatique. D’abord dans une petite scène intimiste qui confronte les deux frères à des illusions mensongères.
DES PAILLETTES PLEIN LE ❤️
La sensibilité de Joel va subtilement s’insinuer à l’écran dans une tension dramatique aboutie. Des angoisses qui laissent d’abord penser à un infarctus puis la vision d’une fille perdue (Nico Parker). Toutefois la partition d’Ellie, interprétée par une Bella Ramsey avec plus de nuances, n’est pas en reste ici et risque de convaincre quelques détracteurs.
Non pas face à Maria, sous les couleurs d’un anorak atypique (et toujours fidèle), où l’adolescente se montre irrémédiablement insolente et méfiante. Mais ensuite. Après une séance de cinéma qui ne semble pas si normale pour la jeune fille.
Arrive une scène viscérale entre Joel et son frère. Ou celui-ci se montre cette fois sincère. Et réaliste sur son parcours avec Ellie. Jusqu’à craquer en dévoilant ses rêves qui le ronge chaque nuit (une idée de son interprète par ailleurs). Un monologue glaçant, un aveu de faiblesse plein d’intensité.
On a réussi à atteindre Kansas City. Elle ma sauvé, là-bas. Un gamin m’a attaqué. Il y a 5 ans, je l’aurais démoli. Elle a dû tirer pour me sauver. Elle a 14 ans. J’ai été trop lent et je l’ai pas entendu arriver. (…) Aujourd’hui j’ai cru que le chien allait la bouffer. Et j’ai rien fait. J’étais… tétanisé. J’arrivais plus à réfléchir. J’étais terrorisé. Tu crois que je suis solide, mais je ne suis plus le même. Je suis faible. J’ai des angoisses qui surgissent sans prévenir. C’est comme si… mon cœur s’arrêtait. (…)
Joel se confiant à son frère
Il faut saluer l’immense performance de Pedro Pascal qui parvient à condenser la tristesse de Joel lorsqu’il dévoile ses craintes. Quasiment uniquement en parole, et dans une intensité de regard assez bluffante.
Suite à cette scène inédite, la confrontation entre Joel et Ellie n’en est que plus réussie. Et bien que cette scène (comme tant d’autres) recycle des dialogues cultes du jeu, l’artifice fait mouche. Des craintes d’échouer pour l’un, d’abandon pour l’autre, jusqu’à la colère due à la perte. Le duo retranscrit ses peurs avec la force de ses interprètes. Majestueusement.
-Pas un mot de plus.
– Je suis désolée, pour ta fille. J’ai aussi perdu des proches.
– Non, tu n’a pas idée de ce qu’est la perte.
– Tous ceux qui comptaient pour moi sont morts ou m’ont abandonnée. Tous, sauf toi !
Joel & Ellie
PROMENADE DE SANTÉ (SANS INFECTÉS)
Et finalement le dernier quart d’heure de ce riche épisode marque le début d’une relation attendrissante concernant Joel & Ellie. Après des adieux représentatifs entre les deux frères, l’obtention d’un nouveau fusil et d’un cheval, notre duo s’en va pour le Colorado. Entretemps cette nouvelle dynamique fait des merveilles par son énergie.
Séance de tirs improvisée, révélation sur l’ancien travail de Joel, explication des règles du football américain, ou bien rêve d’être chanteur. Le tout se fait avec humour et légèreté. Pour capturer ses moments simples, la réalisatrice use de focal et de plans tout aussi naturel et se repose avant tout sur la beauté de ses paysages. Ceux-ci convainc encore à merveille, jusqu’à son université déserte. De toute vie et d’espoir.
Si jusqu’à présent THE LAST OF US s’est montrée extrêmement fidèle au premier jeu, elle continue dans cette voie avec la blessure de Joel. La seule différence notable s’effectue dans son intensité et ses situations d’action. C’est le gros défaut de cet épisode, et l’un des principaux de cette adaptation. Face à un petit groupe de pillards, la scène s’avère relativement anecdotique. Et n’expose pas Ellie dans une folie du danger et du courage.
Le retournement dramatique demeure fort, contrairement à sa mise en abyme. Toujours est-il que ce sixième épisode est globalement une réussite. Avec l’ajout réel de deux personnages secondaires clés et l’avancée significative dans la relation au centre du récit, la série trouve le ton juste. Hommages, références, forces émotionnelles, décidément Craig Mazin accomplit un travail titanesque ici.
CONCLUSION
Les + :
- L’intensité dramatique qui entoure Joel & Ellie dans la révélation de leurs craintes avec une mention pour l’intense Pedro Pascal
- Des seconds rôles plus en retrait pour favoriser l’exploitation du duo au centre du récit
- La grande beauté des paysages parfaitement mis en perspectives, renforcés par la b.o du compositeur Gustavo Santaolalla
- La nouvelle dynamique en fin d’épisode
- Un épisode bourré de références et de clin d’œil
Les – :
- Une dernière partie qui manque cruellement d’intensité et d’action
MA NOTE :
RÉALISATION : Jasmila Zbanic / SCÉNARIO : Craig Mazin
DURÉE : 59mn / SORTIE : 20 Février 2023 (France)
[…] ÉPISODE 6 […]