GAME OF THRONES – saison 8 (finale)

Quand le devoir est la mort de l’amour… ! Au grand dam de nombreux fans.

AVIS & ANALYSE : Voici venu le temps pour le phénomène planétaire GAME OF THRONES de s’achever. Après presque deux ans d’attente et une absence des écrans en 2018 cette saison 8 signe le final de la saga fantastique. Un retour à son fidèle créneau d’avril, via 6 épisodes qui risquent de faire grincer des dents. Mais aussi faire couler beaucoup de sang et d’encres.

La saga la plus chère de l’histoire, jusqu’à présent, puisqu’elle cumule 630 millions de dollars de budget, avait la lourde responsabilité, ou la tâche (impossible), de ne pas décevoir (ou de rassasier) ses nombreux (un euphémisme) fans. Elle délivre la plus courte saison de sa saga. Même si 4 de ses épisodes (du 3ème au final) durent approximativement 1h20 chacun. Promesse tenue pour des épisodes rallongés et maintien de la ligne directrice que s’étaient fixés les showrunners avec un Acte III ainsi composé de 13 chapitres.

Après diffusion et une attente monumentale, le constat tombe : GOT a révolutionné la télévision en ce jour. Et notamment avec une dernière saison contrastée. Courte, intense, bâclée, surprenante, larmoyante, puissante, révoltante (…) peu importe le nombre d’adjectifs qu’on peut lui attribuer, cette saison marque les esprits. Quoi qu’il en soit, les dorénavant bien connus David Benioff & D.B. Weiss ont assurément partagé leurs visions d’une saga qu’ils se sont eux-mêmes appropriés. Pour un résultat qui divise sa fan-base. Avec de tels enjeux, le constat ne pouvait en être autrement. 

Cette critique relativement détaillée demeure subjective, étant un fan du genre médiéval fantastique et de la saga dès la première heure. 
Toutefois, un certain recul (10 ans entre sa découverte en 2012 et la réécriture de ses lignes en 2022) m'ont permis d'en parler de façon beaucoup plus objective. 
Cela intervient après de nombreux visionnages des épisodes et d'une lecture des différents romans dont s'inspire la série.

THE BEGINING OF THE END

L’ultime saison débute par un court épisode de 53 minutes sous la direction de David Nutter, qui a réalisé le plus d’épisodes sur la saga (neufs, dont trois cette année). Sobrement intitulé  »Winterfell » qu’on redécouvre notamment via de superbes plans aériens, l’épisode s’ouvre sur une scène (parmi d’autres) qui fait directement écho au premier épisode de la saga  »Winter is Coming ». On l’y suit un petit garçon grimpé à un arbre pour apercevoir l’impressionnant cortège militaire qui débarque dans la capitale du Nord.

Sous la mélodie inédite de Ramin Djawadi intitulé  »Arrival at Winterfell » on y découvre le non-officiel couple royal Jon (Kit Harington) / Daenerys (Emilia Clarke) arrivés de façon majestueuse, sous le regard de l’intrépide Arya (Maisie Williams).

L’accueil, assez crédible dans sa forme de racisme pour les étrangers, nourrira une certaine défiance chez les gens du Nord. (De façon excessive et/ou inconsidérée chez les sœurs Stark). Une défiance largement alimentée par l’intransigeance de Daenerys, dont le profil psychologique sera au cœur de ce grand final. Après de chaleureuses et multiples retrouvailles en saison précédente, cette saison 8 sera celle de l’amertume. Une amertume frustrante, mais parfois nécessaire. C’est du moins mon ressenti sur le long terme.

Les tensions politiques seront une fois encore au centre de ce début de saison avec des retrouvailles fatalement amères et brèves. Comme le prouve celle de la Lady of Winterfell, Sansa Stark (Sophie Turner) et Tyrion Lannister (Peter Dinklage), ou encore Le Limier (Rory McCann) et Arya.

« Et moi pendant ce temps-là… »

Parallèlement, à la Capitale, la Reine Cersei (Lena Headey) s’offre à contre cœur à l’arrogant Euron Greyjoy (Pilou Asbæk) qui vient de lui ramener (via sa flotte) la compagnie Dorée, composée de 20 000 hommes venus d’Essos et payés par l’or Lannister. Tandis qu’on offre au délectable Bronn (Jerome Flynn) l’occasion d’être grassement payé.

« Tu veux une pute ? Achète là. Tu veux une reine ? Tu dois la gagner. »

Cersei Lannister à Euron Greyjoy en saison 7

C’est loin d’être la parenthèse la plus aboutie du show, mais elle s’avère nécessaire avant sa deuxième partie de saison explosive.

ICI, C’EST LE NORD !

L’épisode recèle toutefois de très bons moments. Comme le prouve la course des dragons où Jon  »chevauche » Rhaegal (qui porte symboliquement le nom de son véritable père). Ce qui solidifie un petit plus la relation ambiguë des deux amants. La fin de l’épisode s’attarde d’ailleurs (dans les mythiques cryptes de Winterfell) à ce que Jon apprenne enfin ses véritables origines. Via les paroles condensées de son meilleur ami Samwell (John Bradley).

Un élément qui va évidemment bouleverser le doux équilibre entre le Loup et le Dragon. J’ai également beaucoup aimé cette scène crève cœur ou le dernier mâle Tarly apprend le sort de son défunt père et frère. Nouvelle preuve d’intransigeance de la part de Daenerys.

Samwell Tarly

Plus au Nord, à Âtre-les-Confins, ce qui reste de la Garde de Nuit et de l’avant-poste de Fort-Levant (mené par l’incorrigible Tormund (Kristofer Hivju)) sont témoins de l’épouvante qu’insuffle l’armée des morts. Dans une scène d’horreur idéale à l’imagerie très réussie. Enfin, l’épisode s’achève par un autre écho du passé (qui conclut le pilote justement…) lorsque le dorénavant solitaire Jaime Lannister (Nikolaj Coster-Waldau) arrive à Winterfell et croise le regard de Bran / La Corneille (Isaac Hempstead-Wright). Qu’il avait estropié tant d’années auparavant.

ser Jaime Lannister

LE CALME AVANT LA TEMPÊTE.

Toujours sous la direction de David Nutter, le second épisode de 58 minutes  »A Knight of the Seven Kingdoms » s’ouvre sur le succinct procès de ce chevalier qu’on nomme Régicide et qui devra son salut à la loyale Brienne de Torth (Gwendoline Christie). Critiqué pour son manque de paroles à l’écran comparé à ses débuts, il est clair que la série optimise son montage par quelques plans et mines graves autour de nos personnages. Devenus bien plus amères avec le temps et dont les épreuves personnelles ont fait évoluer leurs points de vue.

ser Brienne de Torth

Toutefois, elle ne fait pas l’impasse sur l’émotion. C’est ce que nous prouve cet excellent moment d’avant bataille qui multiplie les interactions inédites. Du retour de Theon Greyjoy (Alfie Allen) pour défendre sa famille de cœur, jusqu’à une scène atypique autour d’un feu de cheminée qui va regrouper quelques délicieux personnages. J’aime particulièrement cet épisode. Un épisode qui rassemble, avec calme et une certaine légèreté, un nombre de protagonistes (survivants) non-négligeable.

Theon Greyjoy

Et de l’émotion en chanson.

Humour, amour et nostalgie vont se mélanger insidieusement par quelques scènes parfaitement réalisées. Elles atteignent un point culminant dans un moment d’adoubement très juste. (Et qui me fait toujours verser une petite larme avec sa musique délicieuse et le sourire rare de Brienne). Puis sous un montage astucieux bercé par un morceau a cappella du très sympathique Podrick (Daniel Portman) la mélancolie gagne du terrain.

L’épisode s’achève sur un ton plus grave qui signe l’arrivée des Marcheurs blancs, tandis que Daenerys apprend des paroles de Jon sa prétention au Trône. Dissensions avant la guerre…

UNE LONGUE, ÉPIQUE ET SOMBRE NUIT

Vient le temps de l’épisode 3. Épisode charnière, épisode imparfait, mais à la dimension drastiquement épique.  »The Long Night » qui fait directement référence à ce mythe et légende survenue huit mille ans avant les événements actuels. Celui-là même qui avait plongé l’Âge des Héros dans un long, glacial et sombre hiver. Un événement qui aurait pu découvrir depuis par le biais d’un spin-off avorté.

Cet épisode fatidique se dévoile sous une durée exceptionnelle d’1h21. Miguel Sapochnik (après son absence durant la saison 7) revient à la réalisation de ce moment gargantuesque qui fut tourné durant 55 nuits. Et sous un budget colossal (allouer à cette saison) de 15 millions par épisode.

Pas la meilleure bataille de la saga, mais assurément celle avec le plus d’intensité fantastique. Et une maîtrise totale dans son atmosphère, ainsi que de sa mise en scène. Sous la musique du compositeur Ramin Djawadi, qui parvient à varier ses ambiances avec plusieurs morceaux fabuleux qui allient émotion et tension, un orage assourdissant se prépare au plus profond de l’obscurité. D’un aveu de l’équipe technique, la bataille est ainsi découpée en trois phases cinématographiques.

1) L’indicible attaque frontale, invisible et monstrueuse.

La 1ère se prête aux films de monstres, avec l’attaque presque invisible et déchirante de l’armée des morts. Dans un plan mémorable d’une horde Dothrakis aux araks enflammés (conféré par les pouvoirs d’une Mélisandre (Carice Van-Houten) de retour à Winterfell pour y périr) chargeant l’armée en question dans la pénombre. Le résultat s’avère aussi grandiose qu’incongrus en termes de stratégie de guerre.

Qu’importe, l’artifice fonctionne à merveille et après une retraite désespérée, la mort se dirige vers les lignes défensives. Une attaque de front face aux fantassins, à l’extérieur de l’enceinte du château, et qui s’avère fracassante. Le parti-pris se veut confus, violent et largement en faveur des morts.

Mélisandre

À mesure de revoir cette première longue scène d’attaque, et malgré sa trop faible lisibilité, l’incrédulité de nos combattants face à cette horde enragé demeure jouissive. Et très bien chorégraphié. Les Dragons, montés par Jon et Daenerys fondent alors le ciel et carbonisent l’incommensurable horde avant qu’ils ne soient stoppés par un épais brouillard hivernal qui rabat alors les cartes. Le chaos est total, les forces humaines dépassées se retranchent dans Winterfell.

C’est à ce moment, pour la seconde fois, que Mélisandre prouve son utilité et embrase elle-même les tranchées autour du château. Seules défenses face à la horde. Des défenses qui ne durent qu’un temps, au moment où les morts se sacrifient eux-mêmes pour atteindre les remparts, sur ordre du Roi de la Nuit (Vladimir Furdik).

2) Le(s) jeu(x) du chat et de la souris

Outre une défense des remparts qui s’avère plus lisible et procurent de nouveaux (fugaces) moments de bravoure à nos héros, un jeu du chat et de la souris s’effectue dans les airs entre les trois dragons. Aussi mince que dense, ces moments s’avèrent grandiose pour la rétine (on pense aux nuages éclairés par la lune dans les cieux) et démontre toute la richesse technique mise en œuvre en post-production.

The Night King

La seconde phase demeure aussi inattendue que bien exécutée. L’attaque des remparts met en scène la très habile Arya Stark dans une belle démonstration de ses talents à la lance. Obligée de se retrancher dans la bibliothèque du château, l’action la suit alors pour une partie de cache-cache avec les morts. Une longue scène mutique et bien ficelée qui bascule le téléspectateur dans le film d’épouvante (la 2ème phase). Et ce, jusqu’à un moment haletant de course-poursuite dans les couloirs de Winterfell.

Nouvelle scène d’association avec son protecteur Sandor, durant laquelle Béric (Richard Dormer) se sacrifiera avec héroïsme pour laisser Arya accomplir son destin. Un destin surprise est alors suggéré par la prêtresse rouge dans ce qui nous amène à la dernière partie de l’épisode.

« Que dit-on au Dieu de la Mort ? Pas aujourd’hui’. »

Syrio Forel, Mélisandre

3) La défense et l’impuissance.

Car enfin, la dernière phase – la plus stressante et frustrante – nous plonge dans le film d’action pure et dure. Alternant combat au sol ou dans les airs face au Roi de la Nuit et son dragon. Une ultime démonstration de force esthétique et bestiale où les dragons se déchirent en lambeaux. Arrive ce moment tant attendu où Jon se dirige vers le Night King dans l’espoir de le pourfendre.

Or celui-ci, inarrêtable, ressuscite les morts une dernière fois (dont la courageuse Lyanna Mormont (Bella Ramsey), broyée au combat contre un géant mort-vivant) sous une opulence et des monticules d’ennemis qui acculent nos survivants. Survivants qui se battent avec courage et évitent la mort à maintes reprises, de façon parfois surréaliste bien que parfaitement efficace, tandis que la tension monte crescendo.

Les minutes s’enchaînent à une vitesse folle, tandis que la menace semble inexorable et filme les acteurs et les nombreux figurants fugacement. À chacun de se souvenir, ou pas, de quelques plans mémorables. Pour ma part, le sourire du Night King imbrûlé, l’envolée de Drogon acculé d’une nuée de mort-vivants, ou la fascination qu’exerce un dragon mort-vivant (et à la mâchoire fendue) qui amène Jon dans l’incapacité de rejoindre son frère Bran.

Ser Jorah Mormont

Car quand arrive la fin, sous la magnifique mélodie du titre  »The Night King » de presque 9 minutes, GOT parvient, encore et toujours, à nous surprendre ! Les ultimes sacrifices ne le font pas, mais fonctionnent à merveille. À commencer par celui de Theon qui périt et agonise en défendant Bran dans le bois sacré. Puis celui du valeureux Jorah (Iain Glen) – armé de Corvenin que lui a offert Samwell – seul pour protéger sa Khaleesi, face aux multiples morts.

Rester, de glace.

Après une lente et puissante marche du Roi de la Nuit, Arya parvient jusqu’à lui, puis à asséner un coup fatal avec sa dague en acier valyrien… Stupeur et étonnement, la longue nuit s’achève ainsi, avec une héroïne complète et inattendue. Tandis que dans un dernier plan poétique, Mélisandre rejoint son maître dans l’oubli.

Arya Stark

Cela conclut une moitié de saison et un épisode fondamental, qui fascine autant qu’il frustre. Pour ces déplaisirs, on pourrait donc regretter l’absence totale de combat singulier face aux lieutenants Marcheurs blancs. Malgré un certain nombre de combattants prédisposés. Ou encore d’une scène de fuite dans les cryptes face aux cadavres ambulants.

Le manque (voulu) d’éclaircissements durant les scènes de combat – qui favorisent l’ambiance et les couleurs, ou les éclairages naturels – est évidemment un sujet qui revient souvent chez le public. Et qui coupe fatalement une partie du (gros) plaisir de l’épisode. Il y a pourtant aussi la conclusion de l’intrigue fantastique majeure de la série et tout le mystère qui entoure la fameuse volonté du maître de la Lumière. Ce qui est, à mon sens, une très bonne chose, et permet aux derniers épisodes de se focaliser sur la chute du Trône de Fer. Un dernier acte qui demeure au centre de tout.

Il y a là une vraie maîtrise du cinéma. Qui a su se renouveler et prendre des risques dans sa composition épique pour un résultat gigantesque à l’écran. À mes yeux, cette longue demeure l’un des meilleurs moments de la saga.

HOMMAGES, BANQUET (…)

Première moitié de saison passée, menace des Marcheurs Blancs vaincus, une page se tourne pour la saga. Celle-ci entame alors ses dernières hostilités dramatique et politique en revenant à ses fondamentaux : la Guerre pour le Trône. L’ivresse du pouvoir. Ce nouvel épisode  »The Last of the Starks » de près d’1h20, à nouveau réalisé par David Nutter, se découpe en deux parties.

La première s’ouvre sur un gigantesque bûcher funéraire rendant hommage aux vivants ayant péri durant la Grande Guerre. (Ce qui équivaut à la moitié des troupes). Une longue scène nécessaire, personnellement poignante (bercée par la bande originale magnifique de Ramin Djawadi avec  »Farewell »). Et surtout belle à en crever, malgré sa sobriété. Des dialogues simples, concis, pour une mise en scène qui s’attarde sur les visages endeuillés. Personnellement, cette scène fait mouche.

Durant sa longue scène suivante, scène mythique du genre, scène chorale de banquet et qui change de ton à différentes reprises, se trouve un nouvel élément crucial. Une scène tout d’abord amère, puis joyeuse. Après une manœuvre politique maligne (visant à déclarer le bâtard de Robert Baratheon – Gendry (Joe Dempsie), Lord d’Accalmie). Nos personnages échangent, philosophes, relâchent la pression et les interactions demeurent croustillantes. De l’hilarant Tormund, à un jeu à boire révélateur de vérité jusqu’au morose Limier face à un ancien petit oiseau.

AMOURS, GOSSIP, STARK

Les multiples profils de personnages tourbillonnent toujours avec tact pour des échanges teintés d’humours et d’émotions. On y voit par exemple les Chevaliers Jaime et Brienne s’employait maladroitement à un acte charnel, enfin.

Mais arrive une cassure mentale lourde de conséquences. Dans toute cette joie maussade, s’éveille un mal sans nom, dû à la menace grandissante de la révélation des origines de Jon Snow… Une amertume planante magnifiquement mise en scène, que j’ai particulièrement appréciée.

L’état d’esprit de Daenerys vacille petit à petit, tandis que Jon se refuse à garder ce secret pour lui-même. Celle qui rêve d’être la souveraine de tous constate que le peuple de Westeros l’adule, lui, et non elle, une étrangère. Ce face-à-face charnel puis amer entre les deux amants est fortement révélateur. Mais aussi annonciateur de tragédie. Une idée qui ne plaît pas à grand monde, mais que j’ai trouvé pertinente sur papier, comme à l’écran.

« J’essaie d’oublier. Ce soir, j »ai réussi un moment, et puis, je les ai vus autour de toi. J’ai vu comme ils te regardaient. Je connais ce regard. On m’a souvent regardée ainsi, mais jamais ici. Jamais de ce côté de la mer. » (…) Ne dis rien à personne, jamais. Ne dis pas qui tu es. Garde le secret où il s’éventra et tu seras incapable d’en contrôler les conséquences, malgré tes serments d’allégeance, malgré tes promesses.

Daenerys à Jon

Tiraillé entre son amour impossible pour sa Reine et celui de sa famille, Jon décide de s’absoudre en disant la vérité à ses sœurs. Un secret qui s’évente dangereusement jusqu’aux conseillers de la Reine des Dragons. Cependant, GOT n’est pas à son meilleure quand il s’agit d’épancher un secret en seulement quelques scènes. C’est précisément ici, puis au début de sa seconde partie d’épisode, qu’elle manque de contenu.

Et manque de contenu.

Après des adieux touchants entre Jon et ses plus proches amis, lorsque celui-ci fait route vers le Sud, les rebondissements se précipitent. Avant ça, on retrouve même succinctement l’incorrigible Bron face aux deux frères Lannister pour conclure un dernier pacte. Qui s’avérera fort lucratif. Malgré cela, la faible présence du roturier s’avère bien dommage dans cette dernière salve d’épisodes.

Tout bascule quasiment définitivement vers un destin funeste pour le peuple de Westeros suite à une deuxième partie plus courte (à peine 30 minutes). Plus courte, mais cruciale. En arrivant à Peyredragon, le dragon Rhaegal, encore convalescent, est abattu de façon inattendue en vol par les ‘’balistes’’ installées sur les bâtiments maritimes d’Euron Greyjoy et sa flotte. Une scène qui se finit par la destruction sommaire de la flotte de Daenerys et la capture hors-champ de Missandei (Nathalie Emmanuel).

Euron Greyjoy

Un rebondissement bien trop expéditif dans son montage, ce qui amoindrie fatalement la force émotionnelle de cet acte choc. Dans tous les cas, cela amènera la Reine des Dragons à se présenter devant les remparts de Port-Réal pour demander la reddition complète de Cersei. Des négociations illusoires durant lesquelles Tyrion Lannister brillent une fois encore par ses traits d’esprits et sa sincérité.

« Dracarys« . Où la dernière volonté qui mène au chaos.

Hélas, il ne parvient pas à arrêter sa sœur dans son impartialité puisqu’elle fait décapiter Missandei sous leurs yeux. Dans un dernier mot, la belle dame de compagnie, pacifique et avisée, lance un ‘’Dracarys’’ destiné à sa Reine. Ce simple mot scellera, en partie, le sort de milliers d’innocents étrangers à ses yeux.

Missandei

Ce 4ème épisode se révèle bien plus qu’une simple passerelle vers un final explosif et choquant. La preuve, il démontre comment à ce stade d’une saga si dense, cela paraît logique d’éclairer le téléspectateur sur un fait qu’ils n’ont jamais voulu voir. Le jaillissement d’un mal présent chez un personnage culte et aimé par la plupart.

De plus, il dresse le portrait de profil héroïque dans l’incapacité de gérer des événements tragiques. Comme le démontre celle d’un Jon dépassé par les événements et l’enchaînement de désillusions pour Tyrion, tentant de temporiser. Notamment les paroles censés de Lord Varys (Conleth Hill). L’épisode combine parfaitement la richesse et les défauts de cette saison étourdissante par un grand moment imparfait et amère. Ainsi, entre la fin de cet épisode et le début du suivant, le vacillement psychologique de Daenerys aurait mérité d’être approfondi.

Comme l’annonce son générique 3D entièrement refaçonné cette année, mais aussi par les visions de Bran au cours de la saga, le Feu et le Sang rôde sur la Capitale au moment d’un avant finale brûlant.

PILE OU FACE

Un épisode pivot et destructeur où jamais les showrunners de GOT n’auront eu à prendre une décision aussi terrible et radicale. Dans ce 5ème épisode intitulé : « The Beels« , le réalisateur Miguel Sapochnik s’impose comme LE réalisateur d’envergure de la saga. À mon sens, cet épisode d’1h18 s’inscrit parmi les trois meilleures de toute la série. Après les deux merveilles qui clôturent la saison 6. C’est assurément celui qui finira de diviser les fans.

Il s’ouvre sur la trahison de Varys dans un enchaînement de scènes où l’humble Araignée fait, comme toujours, passé le bien du peuple avant sa loyauté envers son suzerain. Tyrion, loyal, bien que tiraillé, dénonce la trahison à sa Reine dans une scène glaciale qui démontre son état d’isolement mental. (Une imagerie que j’ai trouvé assez éblouissante). Seule comme jamais, elle condamne le maître chuchoteur à la mort et le brûle vif dans une scène de nuit sobre et puissante. Comme elle le lui avait promis en saison précédente.

Lord Varys

Selon la légende chaque fois que naît un Targaryen, les dieux jouent à pile ou face.

La veille de la confrontation, Daenerys Targaryen, qui n’aura jamais autant ressemblé au père qu’elle n’a pas connu – The mad King – promet à Jon qu’elle atteindra son but par la peur. Morosité, ambiguïté, le fantasme de voir Jon lui succéder semble épineux. Tandis que Tyrion, dans une dernière supplication, demande à sa Reine d’arrêter le carnage une fois que  »les cloches » auront sonnées.

Celui-ci sera à nouveau guidé par son cœur, quitte à en subir les conséquences, lorsqu’il libère son frère et lui offre une porte de sortie. À lui et à Cersei pour échappée à un sort funeste. Cela nous apporte une belle et sobre scène d’adieu et d’accolade entre les deux frères Lannister, dans laquelle Peter Dinklage impressionne encore par son talent d’interprète.

FIRE

Après 25 minutes d’épisode, les deux tiers restants s’annoncent ravageurs. Je regrette ici un élément déclencheur plus imagé pour le basculement mental de la terrible Daenerys. Tout comme la facilité déconcertante avec laquelle elle pulvérise les forces ennemies. Néanmoins, le réalisateur et les showrunenrs dévoilent un sens du chaos grandiose à l’écran. Divers plans qui m’ont réellement marqué la rétine. Visionnage après visionnage.

La tension monte, en musique, tandis que les forces attendent le signal de Daenerys à l’extérieur de la Capitale. Drogon, qui arrive par surprise grâce à l’éblouissement du soleil, fond sur la flotte Greyjoy et la pulvérise. Le signal d’attaque pour les forces du Nord, Immaculés, et Dothrak se fait alors par l’éclatement d’une brèche dans les remparts de Port-Réal. Et l’annihilation totale de la Compagnie Dorée par le feu. Les nombreuses balistes sont détruites tour à tour et les forces Lannister finissent rapidement par être surpassées dans la ville.

La mise en scène occulte volontairement l’interprète de Daenerys et transforme Drogon en arme dévastatrice. Tandis que chaque personnage avance peu à peu vers le chaos. On passera le fait de l’inutilité totale des 20 000 mercenaires à la botte de Cersei, si vite annihilée.

Vient alors la décision charnière de cet épisode, de cette saison, peut-être même de la série. Pour des conséquences qui seront à l’origine de l’ordre établi dans l’épilogue du show. Alors que les forces de Cersei jettent leurs armes à terre, et que les ‘’cloches’’ sonnent la reddition, Daenerys fait le choix d’attaquer les soldats dispersés dans la ville et par la même occasion la population entière de Port-Réal. Une véritable pluie de feu et de sang. La série atteint alors un niveau de puissance physique défiant toute concurrence et un réalisme de peur redoutable au stade suivant de l’épisode.

AND BLOOD (CARNAGE)

Vers-Gris (Jacob Anderson), endeuillé, lance lui-même le massacre des soldats désarmés et du pillage qui va s’ensuivre. Sous la stupeur et l’impuissance de Jon et Davos (Liam Cunningham). Outre le choc assourdissant, on assiste à un massacre violent et incommensurable qui perdure et bascule dans l’horreur humaine la plus insondable.

Vert-Gris

Entre confusion, peur, pillage et viol. L’imagerie s’avère ici ultra-violente. Une différence de taille par rapport aux minutes précédentes, qui réduisaient volontairement le taux d’hémoglobine. Notre héros du Nord dispose également d’un point de rupture, lorsqu’il est contraint de tuer l’un de ses propres hommes, sur le point de violer une civile.

Parmi tous ces sentiments contrastés, demeure un mal réellement choquant. Mais avant tout d’une logique sans failles, quand on pense au passif et aux choix de Daenerys ces dernières années. Si les scénaristes se sont toujours amusés à faire évoluer l’empathie envers un personnage initialement peu apprécié, le processus inverse divise de façon impartiale le public. Malgré son audace.

Dans tout ce chaos, plusieurs destins arrivent à leur conclusion dans des dénouements tragiques.

Le « Clegane Bowl« 

C’est le cas du cultissime et délicieux Limier, accompagné d’Arya Stark. Un duo atypique qui s’est infiltré jusqu’à l’enceinte du Donjon Rouge pour accomplir leurs vengeances respectives. Avant une confrontation écrasante, cet homme brisé parviendra à convaincre l’intrépide et jeune tueuse de faire marche arrière. Et ainsi, ne pas périr dans les décombres inutilement. Une scène intimiste et parfaitement interprétée pour clôturer une relation épatante entre deux destins sur mesure.

« Sandor… Merci. »

Arya au Limier

Le  »CLEGANE BOWL » comme surnommé par beaucoup survient ainsi dans des escaliers en ruines en proie à la destruction. Ce combat oppose naturellement les deux frères dans un terrible duel. Après une émancipation sanglante de son créateur – Qyburn (Anton Lesser) – il nous est permis de contempler pleinement l’atroce visage du monstre : La Montagne (Hafþór Júlíus Björnsson), devenue dorénavant (quasiment) increvable, comme le prouve le coup d’une dague en plein visage.

Sandor Clegane

Un combat crépusculaire et magistralement violent à l’image des deux hommes. Celui-ci ne m’a pas déçu et il soulève même un début de fureur quand le Limier se fait enfoncer les yeux dans les orbites. Entre exaspération et ironie, le Limier parvient tout de même à achever la Montagne en les faisant tous deux basculer dans les flammes ardentes à l’extérieur du château… Magnifiquement poignant. 

Parallèlement, le montage s’avère astucieux et s’entrecoupe par la douloureuse survie d’Arya dans les rues de Port-Réal. Les images d’horreurs se succèdent.

Des regrets prêts à être ensevelis.

Dans un second temps, après avoir été ralenti et mortellement blessé par un Euron Greyjoy désaxé qu’il est parvenu à étriper, Jaime Lannister retrouve son amour de toujours, en larmes. Des retrouvailles courtes entre les deux amants qui finiront coincés dans les catacombes du Donjon et ensevelis sous les gravats.

Une scène pleine d’émotion et de beauté, bien que brève. Elle marque la fin de deux personnages majeurs de la saga, tout en déjouant les attentes. D’un côté, une grande partie du public attendait une mort brutale pour l’actuel Reine. Tandis que de l’autre, le Régicide paiera de sa vie son amour inconditionnel pour elle, pourtant conscient de son éternelle cruauté à laquelle ce mélange une fine couche de sensibilité.  

Cersei Lannister

J’ai personnellement apprécié cette douce fin pour les amants Lannister. Grand partisan du profil nuancé de Jaime Lannister, j’ai aimé cette fenêtre de sortie mélancolique et sans hémoglobine. De plus, malgré l’animosité latente dégagée par Cersei, son personnage à suffisamment était développés pour fissurer le masque. Chose que prouve magnifiquement cet épisode. Mon seul regret concerne l’emploi de son personnage durant cette saison, bien trop restreint dans ses différentes interactions.

Génocide. Quand la mort et la peur viennent du ciel.

Enfin, pendant que son protecteur se bat sans vergogne, que deux amants meurent enlacés, et que les soldats du Nord se replient, l’épisode s’achève sous le point de vue d’Arya. Luttant inlassablement pour sa vie dans les rues en flammes de la Capitale. Dans deux ultimes faux plans séquences, la jeune Stark tente de survivre au chaos qui s’abat autour d’elle.

Les dernières minutes sont étourdissantes. Et aussi tournées sous le point de vue de la population, tandis qu’on assiste à l’extermination d’hommes, de femmes, d’enfants, et de vieillards. Magnifiquement crédible et nous laissant un goût de cendre dans la bouche, les showrunners réalisent enfin la vision du Dragon survolant la Capitale, non pas pour la sauver, mais pour la détruire.

Une autre vision réalisée à laquelle s’ajoute celle du Trône sous un mélange de neiges et de cendres dans le final de la série. Pour cela et pour avoir transformé un personnage mythique en antagoniste principal pour son final, « The Beels » demeurera l’un des épisodes les plus marquants de la série. Et par extension de la télévision.

LE SILENCE

L’aventure GAME OF THRONES s’achève ici. Au terme du 73ème épisode de la série, et donc le 6ème de cette saison. Un 6ème épisode d’1h20 qui porte le titre du symbole final du pouvoir : ‘’The Iron Throne’’. Scénarisé et réalisé (pour la première fois) par les showrunners eux-mêmes.

Scindé en deux parties distinctes, cet épisode final débute face au visage d’un Tyrion morose. Suivit de près par Jon et Davos, qui s’aventurent doucement dans une Capitale ravagée. Vide de vie, vide de son, et recouverte de cendres et de corps calcinés. Une scène lente et silencieuse qui n’est pas sans rappeler l’horreur des dégâts qu’aurait pu causer une catastrophe nucléaire. Il y a d’ailleurs un homme qui ère entièrement brûlé dans les rues (et dont on aperçoit la colonne vertébrale) dans un résultat surréaliste.

Les soldats Lannister survivants alors sont exécutés par les forces Immaculés, sous les yeux impuissants de Jon et Davos. Premières dissensions guerrières après la victoire, pour une victoire au goût de cendres. Tyrion tente, de son côté, de rejoindre les sous-sols du Donjon Rouge, où il y découvre les corps sans vie de son frère et de sa sœur, ensevelis par des gravats. Une scène froide et cruelle, magnifiée par l’énorme expressionnisme de Peter Dinklage, au summum de son art.

Tyrion Lannister

TARG(ARYENNE)

Dans la séquence suivante, dorénavant culte, Daenerys se présente à ses armées (dans un plan fabuleux, mais diabolique avec Drogon en fond) en les félicitant pour leurs victoires. Dans un effrayant discours, en hommage direct aux paroles de Khal Drogo en 1ère saison. La Reine des Dragons se promet libératrice de la tyrannie à travers le monde dans les guerres à venir.

Une scène exemplaire et parfaitement illustrée, puisqu’elle démontre l’aveuglement du pouvoir pour Daenerys. Sans remords pour ses actes commis. Pire, tout, des couleurs rouge et noir à ses paroles, nous rappelle une imagerie d’un régime purement totalitaire et fasciste. Absolument effrayant.

Enfin, Tyrion s’avance vers elle pour jeter son épingle de Main de la Reine pour ensuite être fait prisonnier. « Vous m’avez trahie » lui dit-elle, « Et vous avez massacré une ville entière » lui dit-il en retour. Dans une certaine tension quant à sa future exécution, Jon Snow lui rend visite dans une scène à l’enjeu culminant. Sous forme de retour aux sources pour le nain.

Logique et clairvoyant, Tyrion dresse le portrait complexe de Daenerys convaincue de faire le bien, en expliquant ses propres erreurs, et en tentant de convaincre Jon de la stopper. Encore une scène que je trouve personnellement fabuleuse. Loin d’un dénouement idyllique pour des personnages aimés depuis des années.

« L’amour est la mort du devoir » dit le Stark tiré d’une citation de feu, Mestre Aemon, auquel lui répond posément Tyrion : « Parfois, le devoir est la mort de l’amour. »

Jon Snow

« Parfois, le devoir est la mort de l’amour ».

C’est dans ce sens que s’achèvera le drame le plus shakespearien de la série : la relation d’amour entre Jon et Dany.

Sous une magnifique mélodie  »Master of War », Daenerys réalise sa prophétie et touche de la main le Trône. Chose qu’elle a toujours désirée. Un Trône recouvert de neiges, mais aussi des cendres dont elle est responsable. Cela nous renvoie à la fin de la deuxième saison et prouve le pouvoir de persuasion que la série entretient. Mais au fil des années.

Le Loup rejoint le Dragon dans une salle du Trône entièrement vide et dévastée. Et ce, après la vision d’un dragon qui s’éveille. De quoi donner des frissons avant cette dernière entrevue. De manière presque enfantine, Daenerys de convaincre Jon de la rejoindre pour qu’à eux deux, ils mettent le monde à genoux.   

«Reste avec moi, bâtis ce nouveau monde avec moi. C’est notre raison d’être depuis le début. […] Nous détruirons la roue ensemble.»

Daenerys Targaryen

«Tu es ma reine, maintenant et pour toujours»

Jon Snow

Dans une fougueuse dernière étreinte, Jon choisit le devoir à l’amour et lui enfonce sa dague en plein cœur. Si elle manque d’émotion, puisque le dénouement s’avère incontestable, la beauté et le choc de la scène se révèle dramatiquement irréprochable.

Alors, Drogon surgit dans l’enceinte de la salle, mais ne parvenant pas à éliminer le dernier Targaryen, fait disparaître dans une pluie de flammes et de rage le Trône de Fer. Symbole du pouvoir absolu. Dans un dernier plan, le dragon attrape le corps inanimé de Daenerys et s’envole au loin… Un coup de maître qui met fin à la tyrannie. 

Daenerys Targaryen

UN RÊVE DE PRINTEMPS

Dans la deuxième partie du final, à l’égale moitié de l’épisode, les 40 dernières minutes s’ouvrent, comme les premières, sur le visage de Tyrion et sa barbe hirsute. Toujours prisonnier politique à Port-Réal. Amené par Vers-Gris jusqu’à Fosse-Dragon, le nain se retrouve face aux derniers représentant(e)s des plus puissantes familles de Westeros. Composés de visages bien familiers chez nos héros, jusqu’à des nouveaux venus. Ou encore d’autres plus secondaires, comme Edmure Tully (Tobias Menzies), toujours prompt à se ridiculiser, ou l’intraitable Yara Greyjoy (Gemma Whelan).

Les semaines ont passé, il n’y a ni Roi, ni Reine au pouvoir. Le temps est adouci, composé d’un ciel bleu et de nuages blancs. Dans une longue scène cocasse et humble, le nain fait, une fois n’est pas coutume, preuve d’un avis avisé sur la question. Dorénavant, pour la prospérité du Royaume, le pouvoir ne sera pas héréditaire.

Ce seront donc les plus puissants de Westeros qui choisiront leur suzerain. Le sort décide, sous la proposition de Tyrion, que ça sera Bran, dit ‘’le Brisé’’ Mémoire du monde, des hommes, et d’une sagesse avisée malgré son utilité bridée. La Corneille à trois yeux accepte son destin et fait, ironiquement, de Tyrion Lannister sa Main.

« Qu’est-ce qui unit les gens ? Les armées ? L’or ? Les bannières ? Non, ce sont les histoires. Il n’y a rien de plus puissant qu’une bonne histoire. Rien ne peut l’arrêter. Aucun ennemi ne peut la vaincre. Qui a une meilleure histoire que Bran le Brisé ? Tombé d’une tour, il a survécu. Il savait qu’il ne marcherait plus, alors il a appris à voler. Il est allé au-delà du mur, un jeune infirme, et il est devenu la Corneille à trois yeux. Il est notre mémoire, le gardien de nos histoires […] Qui de mieux pour nous guider vers l’avenir ?« 

Tyrion Lannister
Bran le Brisé

Ne nous mentons pas, dans cette scène cruciale, le choix de Bran au pouvoir peut paraître déconcertant et décevant. Tout d’abord. Pourtant, avec du recul, ce choix s’avère avisé quand on se penche sur ses aptitudes et le choix de sa Main (sans nul doute). C’est le manque d’éclaircissement sur son pouvoir et ses interactions qui déçoivent énormément ici. En revanche, la position stratégique et la rédemption de Tyrion, apparaissent à mes yeux comme des éléments idéaux pour cette douce fin qui m’enivre le cœur.

Alternative(s) nordique.

Si le choix de Sansa Stark sur le Trône aurait eu beaucoup plus d’impact, le résultat de la supplication de la belle rousse s’avère bien meilleur. Après 300 ans, l’indépendance du Nord. Chose qu’elle obtient par le nouveau Roi des dorénavant Six Couronnes.

Sansa Stark

Le destin de Jon s’avère plus amer. L’homme que tout le monde voulait sur le Trône, de façon légitime. Et qui aurait peut-être pu régner sous la terreur avec la Reine qu’il aimait dans une relation incestueuse et charnelle. Emprisonné pour le meurtre de celle-ci, le Nordien se retrouve exilé (ironiquement encore) à la Garde de Nuit. Afin de conclure un semblant de paix entre les Immaculés et le Nord. Une décision qui fera encore grincer des dents et que le personnage de Tyrion relativise indirectement :

« Personne n’est très heureux, ce qui signifie que c’est un bon compromis, je suppose« .

Curieusement, j’ai eu beau avoir beaucoup aimé le personnage de Jon au fil des saisons (j’ai particulièrement été touché par sa mort dans les derniers instants de la saison 5), j’ai tout autant apprécié une fin peu idyllique pour ce héros tout désigné. Justement car cette voie aurait celle de la facilitée, chose que la saga à souvent contourner pour une issue plus ambiguë.

On assiste ainsi à de longs et réellement poignants adieux entre les derniers membres Stark, au port de la Capitale. Tous guidés et séparés vers un destin qui les éloigne géographiquement les uns des autres. Des adieux sincères qui font parfaitement bien écho aux parcours respectifs de chacun.

« Je suis entré dans un bordel une fois, avec un âne et du miel… »

Toujours à Port-Réal, Brienne, devenue Lord Commandant(e) de la Garde Royale, rend hommage à Jaime Lannister dans le livre des Chevaliers. Celle-ci recueille ses actes de guerre et termine par humblement ‘’mort en protégeant sa Reine’’. Une scène courte, puissante, mélancolique et douce, et un vibrant hommage à l’un des personnages les plus réussis de la saga.

S’ensuit la dernière scène à Port-Réal, tandis qu’un nouveau conseil restreint débute. Présidée par Tyrion, l’ambiance se fait légère et douce. Sans être dénuée d’humour, elle permet d’introduire certains héros dans leurs nouvelles fonctions. Ainsi, Davos est Grand Amiral, Samwell Grand Mestre, et enfin le filou de Bronn Maître du Bief, Seigneur de Hautjardin, et Grand Argentier. Une scène trop simple et trop enfantine, mais qui réchauffe le cœur. À mes yeux.

Ser Davos

Outre ce retour aux fondements de la série, qui s’achève sur une tirade astucieuse de Tyrion (une blague non achevée depuis le début de la série), c’est l’occasion pour le show de rendre de multiples hommages. Premièrement, à l’auteur même des romans, George R.R. Martin, avec l’ouvrage ‘’A Song of Ice and Fire’’. Mais aussi à l’univers entier par ses nombreuses références aux saisons antérieures. 

Retour morose à Casteblack, cheveux à nouveau détachés, les portes se ferme sur Jon, avant un ultime montage centré sur les derniers Stark, la famille de cœur des fans.

Épilogue  

Sous une mélodie remaniée et hypnotique de Ramin Djawadi  »The Last of the Starks », Arya vogue à la découverte des contrées situées à l’Ouest de Westeros. Sansa est couronnée Reine du Nord, vêtue d’une robe magnifique et lourde de sens. Jon, accompagné de Tormund son compagnon d’arme, des sauvageons, et de son fidèle loup, choisit la liberté et s’en va dans les contrées lointaines Au-delà du-Mur.

Une image douce-amère pour un homme au destin brisé. Ce qui nous renvoie au constat de ce final s’achevant sur un plan quasi-identique auquel il s’était ouvert, 9 ans auparavant. On aperçoit un brin d’herbe sorti de neige, hommage à  »A Dream of Spring », le dernier ouvrage de l’auteur qui clôturera la saga littéraire (s’il sort un jour), avec le morceau « A Song of Ice and Fire ».

CONCLUSION

En soi, cette dernière saison aura fait couler énormément d’encres dans la presse et sur les réseaux sociaux. Pour l’achèvement du phénomène de pop culture qu’elle représente, et pour les nombreux fans se disant déçus par sa conclusion. Jugé : bâclée, expéditive, et parfois incohérente, cette ultime saison n’est pas exempte de tout défaut. C’est certain. Pourtant, au même titre que les précédentes saisons qui révèlent d’autres faiblesses, cette conclusion respecte scrupuleusement la vision première de ses deux créateurs.

Si un ou deux épisodes supplémentaires, ou même le rallongement des 4 derniers, auraient suffi à apporter plus d’épaisseur à l’ensemble, la série ne peut qu’être traitée avec respect par la force de sa narration. Le constat d’une telle haine de certains se ressent principalement par le syndrome du fan. Fan, qui, après tant d’années, se retrouve frustré que ses idées scénaristiques n’aboutissent pas à l’écran.

Et bien que cette 8ème saison laisse beaucoup de mystères sur ses intrigues et ses enjeux purement Fantastique, elle accentue intelligemment les enjeux politiques liés au pouvoir du Trône.

Quoi qu’il en soit, cette dernière saison de GAME OF THRONES se révèle intensément passionnante. Mutique quand elle pourrait s’avérer inutilement bavarde. Grave dans son pessimisme et sa force émotionnelle. Et techniquement renversante. De manière personnelle, cette saison, s’avère plus que satisfaisante dans le dénouement des destins de personnages chers à mon cœur. Comme notamment l’emblématique Tyrion Lannister, interprété par Peter Dinklage.

Réflexions

Anecdotiquement, c’est le final de la série qui est parvenu à battre le record historique de la chaîne HBO qui la diffuse. Avec 13.6 millions de téléspectateurs américains devant leur poste de télévision ce soir-là, la chaîne câblée parvient à battre le record établi par une autre de ses séries culte : Les Sopranos. Un détail anodin pour certains, mais qui en dit long sur l’importance de cette saga, qui demeurera, assurément, la plus riche de la décennie.

On ne peut également lui amputer les 59 Emmy qu’elle a cumulés et qui s’établissent comme un record phénoménal pour la série. Avant qu’elle ne soit effacée de notre inconscient, probablement pas avant longtemps, il nous restera en mémoire qu’elle est une aventure grandiose et épique. Et pour longtemps encore.


Les + (partie 1) :

  • Une amertume ambiante qui sied à merveille a cette dernière saison.
  • L’aboutissement d’une saga d’exception qui multiplie les références et les clins d’œi aux précédentes saisons.
  • Une maîtrise de cinéma grandiose. Cela vaut pour son atmosphère, glaciale comme doux-amer jusqu’à sa mise en scène épique.
  • Un racisme (envers Daenerys et ses troupes) survolé, mais très réaliste.
  • Beaucoup d’émotions. Parfois de manière simple et passionné. Son deuxième épisode le démontre bien dans un calme d’avant tempête grâce à quelques interactions délicieuses.
  • Son troisième épisode « The Long Night ». Ultime démonstration de mise en scène et de la puissance de son atmosphère. Si sa faible lisibilité demeure parfois frustrante, la puissance est là.
  • Le découpage en trois parties de cette grande guerre contre les morts. Mention spéciale à la partie de cache-cache parfaitement exécutée.
  • La mort inattendue du Night King (pour ma part). Un peu expédié, mais drôlement efficace.
  • Une nouvelle composition grandiose de la part de Ramin Djawadi.

Les + (partie 2) :

  • Sa grande scène de banquet, du calme, de l’humour, de la joie et de l’amour jusqu’au malaise grandissant de Daenerys. Celle-ci se dévoile alors dans une scène poignante face à Jon.
  • La mort subite du second dragon de Daenerys. Puis la décapitation de Missandei.
  • La noirceur qui précède l’attaque de Port-Réal. Notamment avec l’exécution de Varys et le choix cornélien de Tyrion.
  • À ce propos, l’immense et ultime prestation de Peter Dinklage, éblouissant de bout en bout.
  • Le carnage de la Capitale par le Feu et le Sang. Grand moment de pyrotechnie d’une cruauté indicible.
  • Le profil psychologique de Daenerys passionnant. D’icône libératrice à antagoniste désaxé.
  • Le « Clegane Bowl », baroud d’honneur sans pitié pour l’illustre Sandor Clegane. Avec en prime et parallèlement la survie d’Arya au côté d’une population en proies à la désolation.
  • Les dernières retrouvailles en larmes des deux amants Lannister. Plus douce et mélancolique qu’escompté.
  • La révélation d’une prophétie faite de cendres et de sang. Avec l’intronisation d’une conquérante aux airs farouchement fasciste.
  • Le dénouement du « devoir comme mort de l’amour ». D’un tête-à-tête censé entre Tyrion et Jon jusqu’au meurtre de Daenerys.
  • Le souffle épique de Drogon et la destruction du Trône de Fer.
  • L’accomplissement des derniers Stark et le départ de Jon au côté des sauvageons.
  • « Un rêve de printemps ». L’aboutissement doux-amer après la tragédie. De la nomination comme Main du Roi de Tyrion jusqu’aux différents destins des survivants.

Les – :

  • Une amertume nécessaire, mais qui renforce la cassure d’une fin de saga conséquente.
  • Une dernière saison fatalement trop courte. Bâclé, serait purement subjectif, mais assurément elle manque de contenu. Certains points auraient mérité d’être approfondis :
  • Dès son début de saison (et trop succinctement) les sœurs Stark font preuve d’une animosité un poil trop appuyé envers Daenerys. Une retenue compréhensible pour beaucoup de raisons, mais trop pratique dans le cadre de l’intrigue.
  • Le point de vue de Cersei est ici complètement occulté. De possibles interactions inexistantes jusqu’à sa présence globale dans cette dernière saison, amoindrie.
  • En dévoilant une expérience d’horreur extrême avec « la longue nuit », l’équipe de production occulte une partie du plaisir des images. Aussi grandiose soient elles.
  • Quelques manques durant cet épique épisode. Tel que plusieurs affrontements contre les Marcheurs Blancs. Des combats aériens approfondis. Ou une vraie scène de survie dans les cryptes.
  • La révélation du secret sur les origines de Jon, mal exploités avec les Stark et jusqu’à sa conclusion.
  • La transition vers la deuxième partie de cette saison et la chute de Port-Réal. Trop précipitée (à l’image de la mort du Dragon Rhaegal ou la capture de Missandei).
  • Le basculement psychologique de Daenerys, trop peu appuyé parfois, malgré son immense richesse narrative.
  • L’annihilation expéditive des forces armées de Daenerys. De la flotte Greyjoy à la Compagnie Dorée et ses 20 000 hommes.
  • Parallèlement, l’inutilité et la sous-exploitation de Bran / La Corneille. Trop léthargique pour convaincre malgré son potentiel richissime. D’où la frustration de son intronisation.

MA NOTE : 17.5/20

Les crédits

CRÉATEURS(s): D.B. Weiss & David Benioff

AVEC : Peter Dinklage _ Kit Harington, Emilia Clarke, Lena Headey, Sophie Turner, Maisie Williams _ et Nikolaj Coster-Waldau,

avec Iain Glen, Rory McCann, John Bradley, Liam Cunningham _ Gwendoline Christie, Kristofer Hivju _ Alfie Allen _ Conleth Hill,

Isaac Hempstead-Wright _ Jerome Flynn _ Hannah Murray, Pilou Asbæk, Joe Dempsie, Richard Dormer _ Carice Van-Houten,

Vladimir Furdik _ Nathalie Emmanuel, Hafþór Júlíus Björnsson _ Jacob Anderson,

mais aussi : Gemma Whelan, Anton Lesser, Tobias Menzies, Bella Ramsey, Ben Crompton, Daniel Portman (…)

ÉPISODES : 6 / Durée (moyenne) : 1h10 / ANNÉE DE DIFFUSION : 2019

GENRE : Drame, Aventure, Fantastique / CHAÎNE : HBO

Un commentaire

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *