GAME OF THRONES – saison 6

  Êtes-vous prêt pour un épique moment de cinéma ?  

AVIS & ANALYSE : Game of Thrones, la saga de fantasy la plus populaire de tous les temps à la télévision, revient comme à l’accoutumée pour avril avec sa saison 6. Cette fois, elle se livre au jeu dangereux de l’improvisation totale autour de son récit. Improvisation pour la forme, car comme relaté dans de nombreuses interviews, ses showrunners et scénaristes impliqués – David Benioff & D.B. Weiss – exécute leur plan jusqu’à un Acte III qui s’annonce salvateur.

Avant cela, cette 6ème saison va proposer dans son format habituel de 10 épisodes – de 50 minutes à une heure en moyenne – une ribambelle de rebondissements immuables. Avec vitesse et force technique. Car oui, GOT s’est transformé en saga coûteuse, mais on ne peut plus épique. Cette saison est par ailleurs parcourue par de nombreux décors (parfois furtifs) tant elle recèle d’intrigues.

Une saison gargantuesque, qui malgré quelques creux et rapidités scénaristiques, s’achève tout simplement par les deux meilleurs épisodes de la saga. Tous deux formellement différents dans leur démonstration de grandeur et d’enjeux, mais qui tirent le meilleur de leur attrait respectif : guerre et politique.

Cette critique relativement détaillée demeure subjective, étant un fan du genre médiéval fantastique et de la saga dès la première heure. 
Toutefois, un certain recul (10 ans entre sa découverte en 2012 et la réécriture de ses lignes en 2022) m'ont permis d'en parler de façon beaucoup plus objective. 
Cela intervient après de nombreux visionnages des épisodes et d'une lecture des différents romans dont s'inspire la série.

LE DEUIL ATTENDRA.

Sa reprise se fait en douceur et avec un léger sentiment de frustration. Le récit reprend précisément là où il s’achevait précédemment à Castle Black, par l’assassinat du Lord Commandant Jon Snow (Kit Harington). Travelling haut, vers des décors qu’on redécouvre presque de façon inédite, GAME OF THRONES s’impose comme une œuvre techniquement exigeante et plus inventive qu’auparavant. Là où elle perd en force narrative et en intensité verbale dans ses échanges. 

Les deux épisodes qui ouvrent cette saison illustrent parfaitement cette ultime aventure qui boucle une routine définie, depuis 6 ans déjà. Mais pour la dernière fois. Le 1er, « The Red Woman« , dresse un portrait minimaliste, mais tout en épaisseur, de la mystérieuse Mélisandre (Carice Van-Houten). De son abattement moral jusqu’à la découverte de sa réelle apparence… Une image marquante qui a l’intelligence de maintenir un rapport à la nudité réaliste. L’intrigue cultive quant à elle un certain mystère autour de son obscure divinité. Et ce, jusqu’à la conclusion du show.

C’est toutefois dans le second épisode, « Home » – toujours dirigé par Jeremy Podeswa – que l’aventure débute réellement. Et avec mélancolie, tandis que de nombreux actes meurtriers marqueront de façon indélébile l’univers de la saga.

Après le soulèvement succinct d’Ellaria Sand (Indira Varma, qu’on ne reverra que dans le final) à Dorne, avec les assassinats sanglants de Doran & Trystan Martell, d’autres familles vont être grandement marquées durant la saison. Et ce, dès le 2ème épisode. C’est le cas des Bolton où, dans un moment de cruauté dont lui seul a le secret, Ramsay (Iwan Rheon) poignarde son père (Michael McElhatton), qui dans une dernière parole le légitimait toujours. Puis celui-ci fait dévorer par ses limiers sa belle-mère et son nourrisson, fraîchement né…

ANTAGONISTE(S) EXCESSIF, MAIS JOUISSIF.

Le bâtard sanguinaire va ainsi s’imposer comme l’antagoniste principal et sans limite de cette saison. Du moins dans le Nord, et toujours de façon excessive. Si son personnage atteint ses limites d’exploitation durant cette saison, force est de constater que ses mimiques infernales nous manqueront à l’avenir.

On retiendra également le départ de son ancienne créature à jamais meurtrie, Theon (Alfie Allen). Qui part rejoindre sa famille à Pyk. Dans ses îles inhospitalières, sous une tempête de vent et de pluie, son père Balon Greyjoy périra des mains de son jeune frère, Euron (Pilou Asbæk). Un nouveau et terrible antagoniste (et figure bien connu des romans) qui vient revendiquer le Trône de Sel.

Si les Martell sont ainsi mis de côté jusqu’à la conclusion, cette ultime trame narrative autour des Greyjoy saura rendre justice à cette famille atypique qu’on avait quasiment plus vue depuis la seconde saison. Mis bout à bout ces segments ne représentent qu’une infime partie de cette saison (et se concentre sur sa première partie). Toutefois, cela se révèle suffisant pour enrichir son univers. Et bien plus que d’autres intrigues secondaires trop vite expédiés aujourd’hui.

DANS LES CRYPTES DU NÉANT. ET DE LA LÉGÈRETÉ.

« – Ensuite, après qu’ils vous ont poignardé, après que vous mourriez… où êtes-vous allé, qu’avez-vous vu ?

– Rien. »

Mélisandre à Jon Snow

Toujours dans le Nord, le retour à la vie de Jon après une longue scène d’incantation de la prêtresse rouge va alors susciter les passions autour de ce destin hors norme et iconique. Richissime intrigue de cette 6ème saison, elle permet en plus d’en apprécier les arcanes secondaires avec tact et humour. Comme vont souvent nous le prouver les délicieux personnages de Davos (Liam Cunningham) et Tormund (Kristofer Hivju).

Le 1er va se révéler être un conseiller avisé et soucieux, le second un frère d’armes fougueux. (À noter son « crush » envers la belle Brienne (Gwendoline Christie) absolument hilarant). L’homme qui va se réveiller du néant, lui, demeurera pourtant morose, et après avoir pendu les responsables de son meurtre quittera l’ordre de la Garde de Nuit.

La résurrection de Jon ne sera toutefois pas la seule touche de fantastique dans le récit, loin de là. Dans une petite scène aussi significative et cocasse que son interprète, Tyrion Lannister (Peter Dinklage), durant le second épisode, toujours, décide de pénétrer dans la crypte où sont retenus deux des Dragons de la Khaleesi. Afin de les libérés de leurs entraves. Un moment captivant, magnifiquement mis en scène et impressionnant de réussite technique.

Hélas, pour le reste de l’intrigue autour du délicieux personnage à Meereen, accompagné de son comparse Varys (Conleth Hill), la confidente Missandei (Nathalie Emmanuel) et l’immaculé Vers Gris (Jacob Anderson), on est loin de retrouver la fougue de l’intrigue politique le concernant à Port-Réal. Et ce, malgré quelques touches d’humour fort agréable. La grande satisfaction qu’on peut en retirer toutefois réside dans la rétrospective de son destin personnel, immensément riche, toujours aidé par un esprit vif et rationnel. 

FANTASTIQUE, FANTASMAGORIQUE, FRIGORIFIQUE.

Parallèlement, on retrouve Bran (Isaac Hempstead-Wright), après une saison d’absence, auprès de la Corneille afin d’en prendre la succession. Celle-ci, interprétée par le célèbre Max von Sydow, lui apprendra à voyager dans le passé. Via quelques incursions fantastiques qu’il nous sera possible de voir et qui auront une grande importance pour la suite.

Ce retour s’avère aussi grisant que satisfaisant dans sa démonstration. D’abord, car le personnage du jeune Stark a progressivement laissé sa place à un adolescent bien moins attachant que par le passé. En revanche, et avec parcimonie toujours, GAME OF THRONES étaye son propos pour le rendre crédible. Son point culminant se fait à mi-saison durant l’épisode 5  »The Door », qui s’avère aussi significatif narrativement, que déchirant d’émotion.

ACHEMINEMENT DU PASSÉ ET DU FUTUR.

Au cours d’une de ses visions d’apprentissage, le jeune estropié Stark se plonge dans l’enfance de son père à Winterfell. Dans un même temps, le Night King (qui change d’acteur ici au profit du cascadeur Vladimir Furdik qui a impressionné la production en saison passée) et son armée pénètrent dans la grotte où campe la petite bande. Outre un très bon moment d’action, l’épisode repose sur deux informations clés de son intrigue fantastique. À savoir l’origine de la création du Night King (par les enfants de la forêt) et le sacrifice du simplet Hodor.

En termes narratifs, son intrigue demeure mystérieuse dans les motivations du glacial antagoniste. Par chance, sa grandeur fantastique en est renforcé. Hormis la sympathie que suscite ce doux  »géant », c’est également l’origine de son handicap qui nous est expliqué en images. Dans une scène pleine de tristesse. Une piste narrative étourdissante, mais qui hélas ne sera pas exploitée à l’avenir. 

« Hold the Door ! »

TOUT FEU, TOUT FLAMME.

[AND GIRLS POWER].

Juste avant, l’épisode 4,  »The Book of Stranger », s’ouvre sur une nouvelle scène d’émotion avec les retrouvailles de Sansa (Sophie Turner) et Jon à Castle Black. S’ensuivra une motivation toute particulière pour reprendre le Nord à l’infâme Ramsay. On peut féliciter les deux acteurs pour leurs implications émotionnelles dans leurs personnages respectifs. Un élément qui fonctionne indéniablement à l’écran.

Cela est démontré par des caractères nuancés, comme le prouve la subtilité qui entoure la belle rousse. Son profil demeure une des plus belles évolutions de la saga, à n’en pas douter. En quête de vengeance et de justice, celle-ci usera d’un sens politique et manipulateur avisé. Chose qu’elle a apprise auprès du terrible Littlefinger (Aidan Gillen), qu’on reverra trop peu durant cette saison.

« Il n’y a pas de mot pour dire merci en Dothraki. »

Jorah Mormont en saison 1

Cet épisode sera également marqué par la montée en puissance de Daenerys (Emilia Clarke) à Vaes Dothrak. Tandis que celle-ci s’offre un khalasar après une démonstration de force tout feu tout flamme. Elle s’effacera ensuite de l’intrigue avant un retour en force fracassant dans la dernière partie de la saison.

Néanmoins, je reste fasciné par l’iconisation de son personnage et par la rigueur qui entoure son profil. Très subtilement, toujours, elle incarne le pouvoir vengeur féminin, sans concessions envers ses opposants. Il y a pourtant une noirceur dans sa motivation immuable. Une motivation de conquérante prête à tout pour atteindre son but. Comme le prouve son discours motivant (et entraînant) qui conclut le sixième épisode sur le cri puissant de Drogon.

La première partie de saison illustrera encore le dévouement hors-norme de Jorah l’Andal. Toujours interprété par un Iain Glen charismatique au possible. Hélas, sur une courte durée.

DENTS DE SCIE, EH OUI.

Car oui, cette saison au budget revu à la hausse – 10 millions par épisode – se révèle perfectible. Même si elle épate par ses multitudes de détails à l’écran (des décors aux plans larges). Pour cause, et réellement pour la première fois dans la saga, elle possède un rythme en dents de scie. Malgré la densité dont elle fait preuve aujourd’hui. De ce fait, elle est placée sous les signes des retrouvailles. Pour les personnages, mais aussi pour le téléspectateur.

Hormis Bran et ses compagnons donc, on retrouve notamment Yara Greyjoy (Gemma Whelan), en héritière légitime des îles de Fer. Mais également la sauvageonne Osha (Natalia Tena) ou Brynden & Edmure Tully (Clive Russell / Tobias Menzies), qu’on avait plus vu depuis la saison 3. Et enfin Oncle Benjen (Joseph Mawle), disparu depuis la saison 1, dont le sort laisse de glace.

Dans tous les cas, ses destins tertiaires ne sont là que pour alimenter les intrigues des principales figures, pour un résultat parfois modérément convaincant.

MAIS HACHE DE BÛCHERON BIEN AIGUISÉ, EH OUAIS.

Ce qui n’est pas le cas avec la plus belle des retrouvailles, lors du 7ème épisode  »The Broken Man ». Celui-ci s’ouvre, non pas sur son générique mythique, mais sur un Sandor Clegane (Rory McCann), bel et bien en vie. Un retour en grâce, toujours très bref, mais qui (re)caractérise à merveille l’un des plus passionnants protagonistes de la saga.

La suite de l’épisode détaillera évidemment les tenants et aboutissants de ce retour soudain. Avec à la clé une nouvelle motivation pour cet homme brisé et une association insoupçonnée avec la fraternité sans bannières dans l’épisode suivant. (Ce qui permet également de retrouver les très bons interprètes Paul Kaye et Richard Dormer pour la suite). Le destin et le caractère taciturne du Limier n’ont pas fini de nous épater.

Ainsi, au cours de trois épisodes consécutifs (du 6ème  »Blood of my Blood » au 8ème  »No One ») l’intensité se mesure avec parcimonie. La saison 6 de GAME OF THRONES délivre tout de même de très bons moments autour de son univers. Car oui, dans la saga, même quand celle-ci dévoile des épisodes plus faibles le résultat demeure excellent. Où du moins enrichissant. La preuve car même si cette deuxième moitié de saison se veut moins percutante elle enrichie grandement son univers.

PETITE DÉCAPITATION

C’est le cas à Port-Réal avec la fusion de la Couronne et de la Foi Militante. Où par une nouvelle démonstration de force de la Montagne, depuis sa  »mutation » en monstre de Frankenstein, lorsqu’il décapite à main nue un membre armé de la Foi. Dans les deux cas, ses événements amènent à du très lourds malgré une baisse d’intensité dans la fameuse Capitale.

NÉGOCIATIONS & ÉMANCIPATIONS

À Vivesaigues, lors d’un siège mené et remporté par Jaime (Nikolaj Coster-Waldau), le jumeau Lannister demeure formidable. Et formidablement ambigu dans sa détermination amoureuse. Celui-ci est toujours assisté par son bras droit Bronn (Jerome Flynn, qu’on voit trop peu) et renoue succinctement avec Brienne. Pour un résultat peu consistant cette fois, malgré un joli regard à l’arraché pour conclure ses retrouvailles.

LE TOUT DANS LE MONDE IDYLLIQUE DE WESTEROS. (ET ESSOS).

Dans le Nord, lors de difficiles négociations pour renforcer les armées Stark, on a tout de même le plaisir de découvrir la (très) jeune et hargneuse Lyanna Mormont (Bella Ramsey). Un profil atypique qui amène à de jolies tirades face à nos héros.

« Je suis peut-être petite, je suis peut-être une fille, mais je ne resterai pas à faire du tricot au coin du feu pendant que des hommes se battent pour moi. »

Lyanna Mormont

Ou encore à Braavos où Arya (Maisie Williams) s’émancipe (par le sang) des sans-visages pour faire route vers Westeros. (Après une course poursuite assez génial). C’est d’ailleurs là-bas, dans la ville du Titan, par le biais de quelques représentations théâtrales, que la série décrit toujours si bien la nuance des points de vue. Celle du « peuple » avec les vrais événements des « gens de la haute », bien plus nuancés en réalité.

VISITE DE COURTOISIE. 

Autant d’aventures mises à jour par de richissimes nouveaux lieux ou sous de nouveaux angles pour un résultat efficace et sans ambages. Mais avec toute cette opulence, l’intrigue fait la lumière sur quelques protagonistes récurrents en seulement 2, 3, ou 4 épisodes.

C’est le cas de Samwell Tarly (John Bradley) qu’on découvre dans un voyage douloureux, puis dans la demeure Tarly à Corcolline avant son arrivée, avec Gilly (Hannah Murray), à Villevieille dans le final. À mi-saison, durant son séjour dans son fief d’enfance, les showrunners narre intelligemment la nuisance paternelle dans sa dureté la plus impartiale. Son personnage, lui, continue son émancipation en tant qu’homme de science, loyal envers ceux qu’ils aiment.

C’est également le cas de Jorah Mormont donc, qui, après avoir secouru la Reine qu’il aime, doit lui dire adieu pour tenter de guérir le mal qui le ronge. Une courte scène que j’ai trouvé habilement poignante. Ironiquement, les deux hommes cités ci-dessus se croiseront habilement dans la saison prochaine.

Enfin, le formidable manipulateur Petyr Baelish va mener les chevaliers du Val dans une bataille décisive en fin de saison… Et quelle bataille !

FIRE, FIRE, AND FIRE.

Cette bataille nous est présentée dans le 9ème épisode  »Battle of the Bastards ». Le dernier de la saga, puisque la série n’adoptera plus le format de 10 épisodes par saison. Le dernier, mais aussi le meilleur parmi les cinq précédents. Un épisode en deux temps et qui révèle de grandioses moments d’actions et de stratégies de guerres.

Sous la direction de l’inspiré Miguel Sapochnik qui avait déjà fait des merveilles l’an passé, ce segment débute avec 10 minutes de pyrotechnie époustouflante. Où se mêlent bombardements sur la grande pyramide de Meereen et destruction d’une flotte ennemie par la puissance de trois dragons adultes…

Grandiose, virtuose et moment tant fantasmé pour les fans de la saga avec un résultat qui dépassent nos espérances à l’écran. Encore une fois, l’intransigeance de Daenerys Targaryen pour l’anéantissement de ses ennemis se voit ici réguler par les conseils de Tyrion. Toujours très malin ce nain.

DU CIEL A LA TERRE : DANS LES ENTRAILLES DE LA GUERRE.

[1]

Ce qui s’annonce ensuite se révèle étonnamment encore plus étourdissant. À 8 000 contre à peine 3 000 la bataille des bâtards qui oppose Ramsay à Jon s’annonce féroce. Plus singulier et d’une maîtrise sensationnelle. Sansa avait mis en garde Jon : le sadisme de Ramsay le pousserait à l’erreur et c’est chose faite aux prémices de cette bataille lorsque Ramsay laisse courir le (plus tout) jeune Rickon Stark vers le camp opposé.

Dicté par son honneur et sa bêtise, Jon se précipite à son secours à dos de cheval tandis que Ramsay accule de flèches son précédent captif. Un dernier petit jeu sadique pour le bâtard Bolton qui parvient à ses fins en exécutant Rickon au dernier moment et en bloquant Jon sous une pluie de flèches. Le sens du tempo est idéal et contribue à la réussite, totale, de la maestria à venir.

Vient alors le plan fixe en semi-ralenti : le plus beau et épique qu’il m’ait été donné de voir dans ma jeune histoire de cinéma. On y découvre un Jon de dos, dégainant  »grand-griffe » en faisant face à des dizaines de cavaliers ennemis fonçant de sa direction. La direction artistique se révèle indispensable dans la réussite de tout ce qui s’ensuit et ce qui a précédé, avant la cohue. Ramin Djawadi nous bercent de nouveaux morceaux inédits tout aussi épiques qui nous happent le cœur. 

Suite à deux cavaleries qui s’entrechoquent entre un commandant esseulé, un plan-séquence qui allie force, confusion, sauvagerie, sang et sueur, le téléspectateur retient sa respiration au côté de Jon durant quelques minutes. L’action s’avère bel et bien féroce, sauvage, sanglante, intrépide et avant toute chose, semble retranscrire à merveille la confusion qui peut régner dans un t’elle moment d’horreur.

[2]

Ensuite, on suffoque littéralement, à l’image de son héros et de ses compagnons d’armes Davos & Tormund (dans de nouvelles partitions expressives irréprochables). Plans plus resserrés, montage plus rythmé, le résultat technique et narratif se montre ingénieux. Dans une démonstration toujours plus féroce, plus nerveuse. Acculé de face et en tenailles et par un amoncellement de corps derrière eux, la petite armée doit son salut à la cavalerie du Val, qui, dans un moment de beauté guerrière et un plan aérien précis, déroute puis broie l’armée Bolton.

Petites et grandes tragédies de guerre, les showrunners et leur réalisateur ont parfaitement su nous faire ressentir l’oppression d’une bataille de façon épique, inédite et inventive. Le tout s’achève par la reconquête de Winterfell, dans l’enceinte du château et grâce au sacrifice (très poignant) du dernier géant WunWun. La dernière démonstration de force d’un géant dans la série après quelques moments très réussi entre la fin de la saison 4 et celle-ci.

Dans une dernière scène très cocasse, Sansa obtient vengeance envers le dernier antagoniste significatif de la saga, lorsque celui-ci est ironiquement dévoré vivant par ses propres limiers affamés. Un moment aussi jouissif que carnassier pour nos sens.

« Quand la neige tombe, et souffle le vent. Le loup solitaire meurt, mais pas la meute. »

Sansa Stark

Après sa technique, GAME OF THRONES transcende l’un de ses autres gros points forts : sa narration. (Enfin, après une saison 5 puis 9 épisodes plus inégaux que les premières saisons).

Dans un final intitulé  »The Winds of Winter » – qui renvoie directement au titre du roman en attente de parution après tant d’années – David Benioff & D.B. Weiss nous subjuguent par la maîtrise de leurs artifices narratifs.

LA REINE QUI RÉGNA PAR UN FEU ANCIEN. CELUI DE L’AMERTUME.

Dans un montage millimétré, et toujours sous la direction de Sapochnik l’épisode 10 débute par 20 minutes d’une réussite incontestable. Bercé par le morceau Light of the Seven (long de 9 min 49) qui mélange piano, orgue, violons et chant choral, on assiste à la vengeance ultime de Cersei Lannister (Lena Headey). Pourtant confinée depuis sa marche de l’expiation au Donjon Rouge.

Attendue pour son procès au Septuaire de Bealor, celle-ci use des  »oisillons » – des enfants des rues – de Qyburn (Anton Lesser) pour annihiler ses ennemis. À commencer par le vieux et espiègle Grand Mestre (Julian Glover), sauvagement poignardé par une ribambelle de bambins. Un moment diablement satisfaisant malgré sa sauvagerie infantile.

S’ensuit la prodigieuse explosion du magnifique Septuaire et de tous ses occupants – Le Grand Moineau (Jonathan Pryce), la Reine Margaery (Natalie Dormer), Kevan Lannister, Loras & Mace Tyrell, de nombreux les nobles, et (presque) tous septons et septas de la Capitale… Une annihilation totale et grandiose sous le joug du feu grégeois entreposé en masse sous le bâtiment. La montée en tension est idéale, la force des images marque la rétine et le dénouement final est tout simplement admirable.

Cette longue introduction ne s’achève pourtant pas là, mais par une scène tout en nuances et en force, elle aussi. On assiste, dans un plan fixe, à la défenestration du Roi Tommen (Dean Charles Chapman), impuissant face à la tragédie et qui avait été confiné dans ses appartements. Dans toute cette ironie cruelle, c’est en voulant protéger son dernier enfant et fils que Cersei l’a conduit au suicide. Elle accède au Trône de Fer, amputée du peu de bonté qui lui rester en son for intérieur. Un dénouement absolument glaçant, sans limites.

UN DOUBLE FINAL, DOUBLEMENT MÉMORABLE.

Le final n’a pas fini de nous transcender et de jouer avec nos émotions avec de nouvelles grandes comme petites scènes. Notamment par le détour de quelques conversations et regards intimes.

On y découvre Davos qui confronte Mélisandre sur le sort de la princesse Shôren, dans une partition pleine de sincérité. Daenerys qui renvoie un amant encombrant (Michiel Huisman, qui n’aura jamais su tirer son épingle du jeu) et déclare Tyrion Main de la Reine. (Dans un moment qui m’émeut toujours, je dois dire). Une Olenna Tyrell (Diana Rigg) en deuil et qui conclut un pacte avec les Martell & Varys. Ou encore Arya, qui exerce une terrible vengeance vicieuse et méritée envers Walder Frey.

La narration cultive cette passion incandescente dans un tourbillon d’efficacité. Mais ne s’arrête pas là.

L’épisode dévoile également – par le biais d’une ultime vision de Bran – une vérité renversante qui remet en cause toute la révolte même de Robert au moment de la chute des Targaryen. Et qui éclaire un triste mensonge qui a gangréné le loyal Ned Stark durant des années. Celle de la naissance de Jon, né non pas d’une quelconque fille d’auberge, mais de Lyanna Stark, morte en couches sous le regard d’un frère acculé par une dernière promesse (volontairement) étouffée.

S’il faut attendre le final de la saison prochaine pour découvrir toutes les ficelles de cette vérité, la saga prend une tournure bien plus profonde autour de sa propre mythologie tandis qu’à l’Est, une autre Targaryenne embrasse son destin. Après l’intronisation d’une glaciale Cersei Lannister sur le Trône, la saison s’achève par l’impressionnante flotte de Daenerys qui vogue vers Westeros. Survolés par ses trois dragons, bien adultes. Frissons et excitations, pas vous ?

CONCLUSION

Avec gigantisme, force et passion, GOT tient ses promesses d’enrichissement, de grand spectacle et de blockbuster intelligent. Et comme on le découvre avec Samwell lors de son arrivée à Villevieille, l’hiver est là, annoncé par une nuée de corbeaux blancs déployés à travers tout Westeros. Enfin.

Winter is Here, un futur crédo qui va faire la passerelle entre la fin de cet Acte II et le III. Un Acte II en montagne russe, imparfait, mais incroyablement dense donc. Et qui n’aura jamais autant atteint des sommets (et ne le refera plus hélas). Contentons-nous de cela : un moment de cinéma virtuose. Du grand art. 


Les + :

  • La deuxième partie très dense d’un Acte II tout aussi dense. Une densité que l’on doit à un sens épique renforcé techniquement par un budget revu à la hausse.
  • Une narration traversée par de nombreux et significatifs moments fantastiques. De genre. Le destin (et sacrifice) d’Hodor en tête.
  • Plus d’émotion vive et intense. Qui s’explique par l’aboutissement de destins hors-normes.
  • De nombreuses retrouvailles, avec des protagonistes disparus depuis longtemps.
  • La surprise de retrouver l’immense Sandor Clegane, magnifiquement interprété par le bestial Rory McCann.
  • Le plus grand moment de cinéma vu à la télévision combiné en deux épisodes. Si déroulent quelques points fort étourdissant :
  • Après de nombreuses saisons d’attente la première vraie démonstration de pyrotechnie complètement dingue et toute-puissante des trois dragons.
  • L’immersion totale et en temps réel dans une scène de bataille. Brutale, dense, épique, suffocant, sanglant et à couper le souffle par sa maîtrise des images et son réalisme.
  • La vengeance de Cersei, longue et monté avec perfection à l’écran. Le tout magnifiquement rythmé par la b.o de Ramin Djawadi.
  • Ce qui amène à la choquante défenestration de Tommen en plan fixe.
  • La puissance retrouvée d’une narration maîtrisé de bout en bout.
  • La promesse du feu et du sang pour le destin de Westeros.

Les – :

  • Quelques épisodes (un peu) moins passionnants qui font retomber la puissance de la saison. Et qui donne un rythme en dents de scie.
  • Moins de politique et moins de phrases culte durant ses épisodes. Malgré son intensité dramatique.
  • De (très) nombreuses retrouvailles vite expédiées avec des personnages disparus.
  • Le destin de nombreux personnages récurrents, parfois trop peu exploité.

MA NOTE : 18.5/20

Les crédits

CRÉATEUR(s): D.B. Weiss & David Benioff

AVEC : Peter Dinklage _ Kit Harington, Emilia Clarke, Lena Headey, Sophie Turner, Maisie Williams _ et Nikolaj Coster-Waldau,

avec Iain Glen, Aidan Gillen, John Bradley, Liam Cunningham _ Gwendoline Christie, Natalie Dormer _ Alfie Allen _ Conleth Hill,

Iwan Rheon, Rory McCann, Hannah Murray, Kristofer Hivju _ Isaac Hempstead-Wright, Jerome Flynn _ Carice Van-Houten,

Jonathan Pryce _ Dean Charles Chapman _ Indira Varma _ Nathalie Emmanuel _ Tom Wlaschiha _ Michiel Huisman,             

mais aussi : Diana Rigg _ Jacob Anderson, Julian Glover, Anton Lesser, Pilou Asbæk, Michael McElhatton _ Gemma Whelan,

Clive Russell, Tobias Menzies, Faye Marsay, Richard Dormer, Natalia Tena, Paul Kaye, avec Ian McShane, et Max von Sydow (…)

ÉPISODES : 10 / Durée (moyenne) : 55min / ANNÉE DE DIFFUSION : 2016

GENRE : Drame, Aventure, Fantastique / CHAÎNE : HBO

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