En 12 ans d’existence, la saga BLACK MIRROR est devenue une référence du monde sérielle et plus en encore du format anthologique. Après deux premières saisons british et radical qui ont contextualiser son propos cette satire sur les technologies a fait un lifting chez le géant Netflix pour ses saisons suivantes. Des saisons 3 et 4 globalement grandiose avec quelques épisodes culte. En 2019, elle revient pour une salve plus courte de 3 épisodes assez fade et depuis plus rien. (Si on exclut le bancal film interactif).
4 ans plus tard, quasiment jour pour jour, la saga S.F fait son grand retour, avec toujours Charlie Brooker pour la superviser. Le journaliste et scénariste nous interrogent toujours un peu plus (mais finalement un peu moins) sur l’incidence des nouvelles technologies, avec espoir et désespoir. Il tente également de se renouveler avec 5 nouveaux épisodes majoritairement gourmands. Mais ce retour fait-il mouche ?
SYNOPSISAvec des histoires tordues qui traversent les époques et répandent la terreur, cette saison est la plus imprévisible de la série d’anthologie qui a révolutionné le genre.
Allociné
épisode 1 : JOAN IS AWFUL
Une femme ordinaire découvre qu’un service de streaming mondial a adapté son quotidien, ainsi que ses secrets, en un drame télévisé interprété par la star Salma Hayek.
Netflix
EN DEUX MOTS : Pour ouvrir sa saison le showrunner propose une alternative plutôt cocasse des dérives sur la propriété d’image. Sur le papier. Avec une volonté d’anarchiste désinvolte Charlie Brooker use de l’image même de Netflix pour donner corps à sa plateforme fictive. Une nouvelle satire bien sentie pour un géant du streaming qui multiplie les laxatifs télévisuels, autour duquel s’articule un épisode finalement assez léger.
Durant une petite heure, où chaque scène sera quasiment réinterprétée Joan is Awful navigue sur des touches de critique humoristique. Tout en relativisant sur l’évolution des I.A durant notre ère technologique. De quoi faire sourire malgré la chute annoncée que subit notre tête d’affiche interprétée par la savoureuse Annie Murphy. Face à elle, dans son « propre rôle » la mondialement connue Salma Hayek joue de son image de star. Pour un résultat moyennement convaincant.
Certes c’est tout le propos de cet épisode satirique, mais force est de constater que le dénouement manque d’un esprit purement corrosif. Avec le choix d’une tête d’affiche issue de la comédie cette dérive S.F amuse plus qu’elle ne choque. Qu’il s’agisse donc de la descente en enfer de Joan, à son craquage cathartique, jusqu’à sa conclusion aux accents métaphysique.
Sous une réalisation assez anecdotique (de la méconnue Ally Pankiw) comme ses thèmes musicaux, ce retour commence par décevoir. Au même titre que l’inutilisation de ses nombreux guest. Loin d’être un mauvais épisode grâce à son synopsis en or, mais une occasion manquée, simplement.
MA NOTE :
RÉALISATION : Ally Pankiw / SCÉNARIO : Charlie Brooker
AVEC : Annie Murphy & Salma Hayek, mais aussi : Michael Cera, Avi Nash, Himesh Patel, Rob Delaney, Ben Barnes, (…)
DURÉE : 58mn
épisode 2 : LOCH HENRY
Alors qu’il tourne un documentaire nature dans une petite ville paisible d’Ecosse, un jeune couple entend parler d’une rumeur locale liée à de terribles événements passés.
Netflix
EN DEUX MOTS : Pour son deuxième épisode anthologique Charlie Brooker se lie curieusement au premier via une toute autre dérive télévisuel. Ce nouvel épisode de BLACK MIRROR y reflète notamment, avec un arrière-goût vintage, les dérives humaines et la surexploitation des tragédies. Là où cet épisode s’avère être une satire réussie c’est par son aspect vendeur des documentaires policiers, dont raffole les plateformes. Et notamment Netflix…
Y apercevoir à nouveau la plateforme fictive Streamberry n’est donc pas une surprise, et en moins d’une heure Loch Henry consolide son intrigue qui berce doucement vers le thriller morbide. Une jolie manière de prouver que l’enveloppe de ce deuxième épisode use de son potentiel de vente.
Pour prouver son efficacité Loch Henry déploie plusieurs outils pour convaincre. Sa forme de faux documentaire d’abord, qu’on découvre en première puis dernière partie d’épisode pour ne pas trop en dévoiler. Son casting principalement britannique ensuite, où brille 5 récurrents, dont le frêle Samuel Blenkin, la pleine de charme Myha’la Herrold (découverte dans INDUSTRY), le dorénavant charpenté Daniel Portman (GOT), l’incorrigible John Hannah, ou la méconnue et surprenante Monica Dolan, dans un rôle frigide et faussement docile.
Enfin, comme à chaque épisode de BLACK MIRROR, le twist à son importance. Non dénué de peu d’originalité celui-ci fonctionne à merveille et nous amène de façon logique et appréciable à sa conclusion. Pas une claque pour la saga, mais une belle petite friandise qui rappelle quelques vieux épisodes précédents.
MA NOTE :
RÉALISATION : Sam Miller / SCÉNARIO : Charlie Brooker
AVEC : Myha’la Herrold, Samuel Blenkin, Daniel Portman, avec John Hannah, et Monica Dolan
DURÉE : 55mn
épisode 3 : BEYOND THE SEA
Dans une version alternative de 1969, deux astronautes chargés d’une mission high-tech périlleuse composent avec les conséquences d’une épouvantable tragédie sur Terre.
Netflix
EN DEUX MOTS : Le blockbuster de cette saison c’est bien lui, l’épisode central. Fort d’un pitch S.F intrigant et deux têtes d’affiche (Aaron Paul / Josh Hartnett) bien connu, Beyond the Sea conjugue quelques atouts de la franchise. On y retrouve également quelques touches de poésies qui ont su nourrir les saisons précédentes, et dans lesquels brille au milieu la douce Kate Mara, centrale elle aussi.
Malgré une longueur non-négligeable d’1h20 cette épisode de Science-fiction vintage se révèle intimiste. Et ne fait qu’effleurer son contexte S.F qui sert uniquement d’instrument narratif. De plus Beyond the Sea n’a quasiment que pour décors que deux principaux lieux (la ferme et le vaisseau). Le cœur de l’histoire se veut alors éminemment dramatique et exclut quasiment son contour politique de l’époque. (La course dans l’espace, le fanatisme…).
Avec un temps d’écran conséquent et uniquement trois principaux noms au générique nos acteurs ont une panoplie d’accessoires émotionnels à leur portée. D’autant que le premier twist de l’épisode annonce la couleur concernant les tragédies de ce monde (à venir). Cette boucle et le cordon invisible qui maintiens les deux astronautes s’avère aussi subtil que monstrueux. C’est pourquoi il est un peu dommage que son contexte S.F manque d’épaisseur.
Quoi qu’il en soit Aaron Paul délivre une prestation dramatique encore très aboutie, dans la veine de Breaking Bad ou Westworld. La bonne surprise vient du plus discret (dorénavant) Josh Hartnett traverser par le deuil jusqu’à une zone plus sombre et torturé ensuite. Il manque à l’épisode une suite d’événements réellement perturbants, là où son dénouement s’avère juste mais manque de surprise.
MA NOTE :
RÉALISATION : John Crowley / SCÉNARIO : Charlie Brooker
AVEC : Aaron Paul, Josh Hartnett, Kate Mara (…)
DURÉE : 1h20
épisode 4 : MAZEY DAY
Une starlette hollywoodienne fait tout pour échapper à une meute de paparazzi alors qu’elle encaisse le contrecoup d’un délit de fuite.
Netflix
EN DEUX MOTS : Si son second épisode avait des airs cheap qu’on pouvait notamment associer au genre du faux documentaire, celui-ci représente LE vrai petit nanar de sa saison. Probablement l’un des épisodes les moins audacieux de la saga. Dans son message comme sa conclusion.
Le synopsis et le titre de cet épisode s’articulent sur une jeune star (Clara Rugaard) qui va connaitre une énième chute. Et pourtant durant les 40 petites minutes qui composent l’épisode c’est principalement sous les yeux d’une paparazzi désabusée (Zazie Beetz) que l’histoire se déroule. Si c’est un plaisir de retrouver la fougueuse actrice découverte dans Atlanta ou Deadpool 2, le scénario peine à convaincre. Au même titre que le message corrosif du scénariste sur les dérives de la nocivité que représente la célébrité.
Mazey Day n’a beau duré que 40 minutes le déroulement de son intrigue avant son twist suit une forme bien trop classique. Ses dix dernières minutes qui nous plonge dans un cauchemar insoupçonnée manquent quand à elle de mordant. Entre une assez mauvaise exécution et un carnage à peine jouissif, ce BLACK MIRROR du cliché parfait n’a rien de réellement percutant. Anecdotique, oubliable et décevant.
MA NOTE :
RÉALISATION : Uta Briesewitz / SCÉNARIO : Charlie Brooker
AVEC : Zazie Beetz, Clara Rugaard, Danny Ramirez (…)
DURÉE : 40mn
épisode 5 : DEMON 79
Nord de l’Angleterre, 1979. Une humble vendeuse apprend qu’elle doit commettre de terribles méfaits pour empêcher une catastrophe imminente.
Netflix
EN DEUX MOTS : Pour le dernier épisode de sa saison cette salve de BLACK MIRROR embrasse pleinement son postulat fantastique et métaphysique. Avec Demon 79 et ses 1h15 au compteur son showrunner (accompagné cette fois de la scénariste TV du MCU Bisha K. Ali) délivre un récit old school et frétillant. Une proposition marquée tout de même d’une certaine cassure avec le reste de la saga, en délaissant son postulat S.F.
Comme l’indique très simplement son titre ce dernier épisode incorpore l’idée d’un démon à une époque bien particulière. Cette période à l’aube des années 80 s’illustre dans une mouvance du slasher vintage, au moment d’une remontée du parti fasciste. Deux éléments distincts mais qui vont coïncider avec les idées de meurtre de notre jeune tête d’affiche. La jeune Anjana Vasan par son physique et son attitude discrète colle à merveille au profil recherché. Son duo avec le démon en question – qui apparaît sous les traits du génial Britannique Paapa Essiedu – est d’ailleurs exaltant.
Dans une mouvance grave mais comique le duo se plonge doucement dans un petit massacre qui lève le voile sur des individus assez malveillant. C’est relativement jouissif mais pourtant parfaitement vain. C’est toute la limite de cet ultime épisode qui part pourtant sous de bons auspices. La mise en scène et l’ambiance du plutôt cool Toby Haynes (qui avait déjà réalisé l’excellent épisode USS Callister en 2017) le prouve.
Quoi qu’il en soit et malgré son charme de production british/vintage Demon 79 ne convainc qu’en partie. Et s’avère bien trop long. Un lourd constat qui fait de cette sixième saison une seconde salve assez décevante. Un renouvellement hélas imparfait et surtout une satire qui semble s’adoucir méchamment.
MA NOTE :
RÉALISATION : Toby Haynes / SCÉNARIO : Charlie Brooker & Bisha K. Ali
AVEC : Anjana Vasan & Paapa Essiedu
DURÉE : 1h14
CONCLUSION
Les + :
- De nouvelles anthologies enthousiasmantes
- De belles brochettes d’acteurs variés et souvent bien exploités
- Un petit retour aux sources avec deux récits britannique bien enveloppé
- Un mélange des genres et un goût prononcé pour les productions vintage
Les – :
- Des twists efficaces, mais attendus ou sans chocs glacials
- Moins corrosifs, de poésies et d’émotions, et plus de légèreté
- Des récits qui délaissent bien trop l’aspect psychologique de la Science-fiction
MA NOTE (global) : 14/20
DIFFUSION : 2023 / CHAÎNE : Netflix
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