Avant-propos : après un retour tant attendu (pour mon cas) House of the Dragon s’est révélé encore tiède. Un début de saison tout de même solide, soyons honnête, mais dans une certaine retenue (en intensité à mes yeux) et qui n’a pas convaincu l’ensemble du public et des critiques. Avec des audiences décevante et quelques critiques négatives, le show fantastique d’HBO avait tout a prouver dans ses prochains épisodes.
Son second épisode a donc la lourde tâche de doublement (me) convaincre, mais, bonne nouvelle, il s’agrémente de quelques minutes supplémentaires et dépasse les une heure. De quoi faire la lumière sur d’autres personnages déjà teasé et s’aventurer plus largement à Westeros ? Dans un premier cas, oui, en revanche, l’intrigue demeure encore statique. Mais non moins exaltante.
ÉPISODE 2 : RHAENYRA THE CRUEL
Pour ce second épisode de presque 1h10 se sont deux habituées de la production qui lui donne vie à l’écran. Sara Hess se charge d’abord de son écriture, tandis que Clare Kilner le met en scène. La première tient un rôle central au côté du showrunner (et à elle-même écrit deux épisodes passés) et la seconde à déjà réalisé trois épisodes significatifs de la première saison. Dont le neuvième, lors du couronnement d’Aegon II (Tom Glynn-Carney).
Dans tous les cas, les deux femmes naviguent sur une ligne de rythme similaire au précédent épisode. Celui-ci a l’avantage d’être plus percutant dans son déroulement, notamment quand il lève le voile sur certains de ses meilleurs personnages. Après une certaine retenue, la deuxième saison de House of the Dragon se démarque dès lors en appuyant de nouvelles nuances sur deux thèmes qui lui sont sacrés : la vengeance et le deuil.
Ainsi, si on ne quitte pas encore les iconiques lieux de Port-Réal et Peyredragon, les personnages qui y évoluent brillent. Et de la même façon, si le carnage se fait attendre et que le show évite (volontairement ?) l’ultra-violence, elle se démarque par son sens du drame et ses enjeux politique. Pour preuve, son titre « Rhaenyra the Cruel » est une diffamation envers la Reine Noire (Emma D’Arcy) qui exploite magnifiquement la tragédie du premier épisode.
Un retour gagnant pour ma part, dont la magie opère malgré son rythme lent. J’ai notamment et particulièrement apprécié les élans poétiques et romanesques diffusés ici et là par la réalisatrice.
L’erreur est humaine. Et surtout Targaryenne.
À l’instar des nombreuses erreurs commises par la famille Targaryen par le passé, la mort tragique de l’héritier du jeune Aegon II est un événement (parmi tant d’autres) qui va causer la perte de cette illustre famille. Et dans la pure continuité de ce terrible « acte », comme le qualifie Otto (Rhys Ifans), cet épisode débute dans le chaos. Et une certaine confusion, magnifiée par une nouvelle mélodie au violon du compositeur Ramin Djawadi.
Le deuil sera assurément un sentiment ou un état de fait récurrent dans HotD. Et qu’elle que soit la mort rencontrée, son impact sera l’occasion d’y sonder l’âme de ses merveilleux personnages. Le résultat est, dans ce second épisode, très parlant pour le camp des Verts. La mort du petit héritier d’Aegon sera donc salvatrice pour la famille royale et lèvera le voile sur de nouvelles facettes du jeune roi. Je ne l’avais pas soulevé dans ma critique précédente, mais j’avais déjà été impressionné par l’aisance de jeu du Britannique.
Dans sa position de propulsé sur le Trône, ce roi immature et lubrique passe par une haine sourde et incontrôlé qui va nous amener ensuite à une immanquable précipitation. Une caractéristique qui semble récurrente dans son jeune règne. Évidemment ce jeune Targaryen à moitié Hightower qui scande de rage « je suis le roi » n’est jamais plus passionnant à observer que face aux membres de sa famille. Et notamment ceux qui détiennent une forme d’autorité naturelle.
Là encore, le camp des Verts m’impressionne dans ses interprétations. D’Olivia Cooke en reine douairière à l’autorité vacillante et rongée par la culpabilité, a Rhys Ifans plus calculateur que jamais. Celui-ci tient probablement le rôle majeur de cet épisode grâce à ses élans politique brillant et sans vergognes. Hélas balayer par la jeunesse et sa fougue en fin d’épisode.
Le peuple y voit un présage. Il se murmure que Rhaenyra devrait peut-être régner.
(Le grand Mestre) : Vous voudriez la traiter de monstre, de bourreau d’enfants ?
J’irais même plus loin. Une procession. Que le peuple voie l’enfant, qu’il contemple l’œuvre de cette prétendante au trône.
Otto Hightower lors du conseil restreint
Procession & Petit peuple
Si je n’avais pas particulièrement apprécié certains aspects de mise en scène de Clare Kilner par le passé, j’ai largement était convaincu par son travail durant cet épisode. Sa poignante scène funéraire en est l’exemple le plus concret par ses élans poétiques. Le portrait d’Halaena (Phia Saban) s’avère assez tragique dans sa solitude et reflète le fossé envers le petit peuple. Et justement, en montrant succinctement celui-ci, les scénaristes alimentent une problématique qui se profile.
À Port-Réal, plus qu’ailleurs, le petit peuple s’est toujours avéré central bien qu’au second plan. Ainsi, glisser en milieu d’épisode le portrait du forgeron Hugh (Kieran Bew) et de sa famille n’est pas anodin. Les lecteurs le seront, son personnage n’est pas une invention des scénaristes, qui l’on déjà introduit dans l’épisode 1. C’est surtout plaisant ici d’assister à une intrigue, du livre à l’écran, qui se relève à nature humaine. Et de ce fait, qui n’occulte pas les points de vue et les enjeux dramatiques de son univers.
Parallèlement, le destin du marin Alyn (Abubakar Salim) ce profil également dans l’autre camp, tandis que l’intrigue nous présente son frère, Addam (Clinton Liberty) un charpentier sympathique. On devine aisément l’importance des non-dits ici, et de plus, la mixité du casting s’avère rafraîchissante à l’écran.
Cette deuxième saison de House of the Dragon va ainsi tenter de concilier : petits et grands destins jusqu’à sa conclusion. Un exercice difficile, que son aînée était parvenue à réussir sur la durée, qui devra éclairer quelques profils distincts. Bien trop absent, encore aujourd’hui. À l’instar du charismatique Luc (Harry Collett), Baela (Bethany Antonia) et sa sœur, ou le grand Argentier Lannister (Jefferson Hall).
Défaut de caractère.
À contrario d’un manque d’éclairage envers certains profils, d’autres brillent aussi naturellement que rapidement. C’est le cas de Rhaenys (Eve Best), guerrière tranchée et inflexible et évidemment du sociopathe Daemon (Matt Smith). Après un sourire espiègle lors du conseil restreint (dans une salle majestueuse et au gigantisme impressionnant) son face-à-face avec Rhaenyra sera salvateur.
[Rhaenyra] : Nous en arrivons enfin là. Je ne peux pas te faire confiance Daemon. Je ne t’ai jamais entièrement fait confiance, malgré l’envie et les efforts. Mais ton cœur n’appartient qu’à toi seul. (…)
[Daemon (en parlant de Viserys)] : C’était un imbécile qui aspirait à la grandeur, mais rechignait à verser le sang. Tu prends le même chemin.
[Rhaenyra] : Tu as assassiné un enfant.
[Daemon] : C’était une erreur.
[Rhaenyra] : Tu es pitoyable.
Rhaenyra et Daemon
Les amants incestueux semblent atteindre un point de non-retour significatif ici, tandis que chacun s’illustre dans son registre. La colère puis l’instabilité d’un côté, la tempérance de l’autre. Dans ce balayage de vérités difficiles à entendre, Daemon est parfaitement détestable et égocentrique. Rhaenyra de son côté révèle de nouvelles palettes d’émotions. Tout en étant tiraillé par sa position de prétendante et de surcroît, de femme et de mère.
La largeur de la première saison et le portrait de souverain de Viserys a du sens dans son énumération aujourd’hui. Notamment, quand il renvoie au fardeau que représente le Trône de Fer. En tout début d’épisode, on assistait même à la destruction, par sa descendance, de sa merveilleuse maquette qu’il avait construite méticuleusement. Parallèle imagé que les Targaryen demeure la grosse menace pour leur propre famille.
Politiquement, les choses ne vont pas mieux à la capitale lorsque le roi Aegon II, justement, décide de voler de ses propres ailes. Si son portrait porte à la nuance et révèle même une once d’attachement (comme le prouve cette scène ou Alicent se révèle incapable de le consoler), à ses côtés, le Lord Commandant (Fabien Frankel), qui est aussi l’amant de sa mère, devient de plus en plus pathétique. Si on peut, presque, avoir espoir dans son absolution face à sa culpabilité, tous ses choix prouvent le contraire. Notamment, quand cela amène à la mort des jumeaux Cargyll.
CONCLUSION
Si la scène s’avère bien chorégraphiée, mais leurs destins ne m’a pas bouleversé, j’ai davantage apprécié l’implication indirecte de Mysaria (Sonoya Mizuno), qui a disposée, dans cet épisode et de loin, de sa scène la plus intéressante. Depuis la première saison. À noter également une scène esthétiquement irréprochable avec Aemond (Ewan Mitchell), encore peu présent dans ce début de saison, mais toujours à la fois dérangeant et charismatique. Notamment dans sa position de faiblesse, en fœtus, avec son corps squelettique auprès d’une prostituée mûre.
Quoi qu’il en soit, entre son formidable début d’épisode puis la confrontation entre Rhaenyra et Daemon, l’éviction d’Otto demeure l’une de mes scènes favorites durant cet épisode. Et l’une des plus importantes. De nouvelles vérités jaillissent et l’acteur s’illustre en sortant de ses gonds. J’ai particulièrement aimé son petit rire amer face à son petit-fils. La nomination de Criston Cole est aussi absurde qu’exaltante pour l’avenir incertain de Port-Réal. Et ce qui est sûr, c’est que la discrète guêpe qu’est Larys Strong (Matthew Needham) n’a pas fini de butiner, ici et là.
[Otto] : Le sang de ton fils nous a valu leur approbation. Les larmes de ta mère ont montré notre sacrifice face aux privations à venir. Et tu as tout balayé. Après ce que j’ai fait pour toi. Tu es inconscient. Incapable ! Frivole. (…)
[Aegon] : Mon père est mort.
[Otto] : C’est vrai. Et quelle perte pour nous tous. Il avait raison à ton sujet.
[Aegon] : Il m’a laissé la couronne.
[Otto] après un petit rire : C’est ce que tu crois ?
Otto et son petit-fils, Aegon II
« Rhaenyra the Cruel » est donc un second épisode lancinant, poétique et politique qui m’a plus largement convaincu. Si ce début de saison demeure tempéré et dangereusement dense, il prouve que HotD est une œuvre au-dessus du lot. Le meilleur est à venir, assurément.
Les + :
- Ses envolées poétiques et pleines de grâce. Capté par la caméra de Clare Kilner, un jeu de lumière magnifique et une bande originale magistrale.
- Le déchirement de la famille Targaryen/Hightower et les enjeux politiques qui en découlent, magistraux.
- Malgré le peu d’empathie que représentent leurs personnages, Olivia Cooke, Rhys Ifans et Tom Glynn-Carney les subjuguent.
- Le face-à-face salvateur et déchirant de vérités entre Daemon et Rhaenyra.
- Ses petits apartés envers ses nouveaux personnages secondaires, qu’on éclaire un peu plus aujourd’hui.
Les – :
- Malgré une durée nécessaire à mes yeux, l’épisode pâtit d’un rythme assez lent.
- Encore quelques profils secondaires qui peinent à exister.
MA NOTE :
MON CAMP FAVORI DURANT L’ÉPISODE : TEAM GREEN
Les crédits
RÉALISATION : Clare Kilner / SCÉNARIO : Sara Hess
DIFFUSION (France) : 24 Juin 2024 / DURÉE : 69mn
[…] chaque épisode.(Voir mes critiques détaillés sur chacun d'entre eux, avec spoilers ICI : Ép. 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, et […]