EN DEUX MOTS : Il y a deux ans, Matt Reeves parvenait à proposer une nouvelle vision du Chevalier Noir, malgré un panel éculé. Avec THE BATMAN, le réalisateur dévoilé une atmosphère sombre et prodigieuse d’un Gotham gangrené comme jamais. Y ressortait l’un des plus célèbres super-vilains du justicier : Le Pingouin.
Futur chapitre de la saga The Batman, cette série suit Oswald « Oz » Cobb dans sa quête pour obtenir le pouvoir et le contrôle à Gotham City.
Après cette intronisation réussie, la minisérie THE PENGUIN se centre (en apparence) sur le parcours d’Oz, toujours campé avec brio par un Colin Farrell méconnaissable. En faisant directement suite au film de 2022 ce thriller ré-embrasse à la fois son univers urbain réaliste et l’alimente en s’attardant sur le contrôle de la pègre de Gotham.
Estampillé comme une production HBO original, The Penguin demeure tout de même (de base) une série Max. Si elle reste un événement sur la plateforme (à l’instar de la série DUNE à venir et au destin similaire) sa publicité demeure légèrement mensongère. Comme l’indique son slogan « par Matt Reeves« , la série n’étant ni dirigé, ni écrite par le célèbre metteur en scène. (qui demeure producteur).
C’est pourquoi le moins renommé Craig Zobel (découvert avec The Hunt et qui a dirigé, déjà sur HBO, Kate Winslet dans Mare of Easttown) se charge de la réalisation des premiers épisodes. En parallèle, c’est la scénariste Lauren LeFranc qui supervise le projet, celle-ci s’étant uniquement démarquée avec la série Marvel : Agents of S.H.I.E.L.D.
Cette fois du côté de l’écurie D.C., la scénariste parvient-elle à délivrer une continuité aussi léchée que son aînée ? Pas vraiment non. Néanmoins, cela ne l’empêche pas d’avoir toute de suite trouver son public et que les critiques de soient montrés quasi-unanime concernant sa qualité. Pour ma part, THE PENGUIN se dévoile comme un thriller aussi haletant que nerveux. Une belle surprise pourtant borderline.
Quand la pègre paye.
Par le biais d’un pilote conséquent d’un peu plus d’une heure, THE PENGUIN marque son territoire. En gravitant autour d’une dynamique d’après-chaos qui a conclu le film The Batman, la minisérie débute par une plongée agréablement surprenante dans le quotidien mouvementé de l’atypique « Oz Cobb ». Ne lâchant pas d’une semelle ce mafieux clopinant, mais pas nécessairement désagréable, la série use avec brio du caractère d’anti-héros que lui offre son univers.
Un potentiel qui se révèle comme une des plus belles forces de son récit criminel. S’y détache la prestation du renommé Colin Farrell. Toujours couplés d’un maquillage aussi impeccable qu’impressionnant et affublé d’un léger accent italien, l’acteur irlandais dévoile un jeu d’action délectable. Le récit, lui, parvient aussi bien à éclairer sa vulnérabilité que sa force de caractère. Une belle nuance assurément.
Manipulations, mensonges, violences, orgueils, mais également bienveillance et respect envers une partie de son entourage. Oz bourlingue dans les rues de Gotham et de sa banlieue dans un combat permanent. Si la série est loin de détenir le même esthétisme prodigieux que le film de Matt Reeves, sa plus grande simplicité lui procure quelques avantages. Par exemple, une légère ironie dans la découverte de ses nombreux caractères mafieux opposés à notre tête d’affiche. Ou même le profil d’une mère un peu désaxée (Deirdre O’Connell, idéale dans son choix).
La showrunner use également de l’outil très commun de « l’initié » pour un point de vue complémentaire. En soit, une petite frappe attendrissante (Rhenzy Feliz, plutôt convaincant), qui suit les pas du Pingouin. Un parallèle qui rappelle forcément le duo de Batman et Robin et fonctionne bien plus qu’il ne pourrait ralentir l’aventure heureusement. Même s’il demeure un levier d’humanisation pour notre fameux antihéros. Mais pas que…
Rude concurrence.
Malgré quelques facilités, et un esthétisme moins étoffé (et sombre naturellement), THE PENGUIN lève le voile sur un caractère inédit exquis. Parmi les différents profils qui donnent vie aux différentes familles mafieuses de Gotham, aucun ne surpasse l’étonnante Sofia Falcone (Cristin Milioti). Ancienne détenue d’Arkham et fille de, feu, Carmine Falcone. (qui change de cast et d’apparence sous les traits de Mark Strong, étonnant !). L’actrice méconnue (à l’opposée de son rôle dans Fargo saison 2, par exemple) bouffe l’écran dans une proposition de haute volée. Et pour un jeu du chat et de la souris exaltant.
La scénariste parvient donc à écrire un vrai profil féminin atypique, avec même en prime une origin story très solide. À contrario du reste de la distribution, plus commun. Tous composent, plus ou moins de façon utile, l’univers criminel du Pingouin et dynamise ses enjeux. Ainsi, malgré ses incartades lumineuses (et cohérente) THE PENGUIN use d’un univers de thriller qui (ré)empreinte à son aînée des décors urbain humide et tamisé.
Une atmosphère parfois humide et poisseuse, froide et idéale pour une série qui se complaît naturellement à être comparé au classique : The Sopranos. Heureusement, c’est aussi (et surtout) pour ses instruments narratifs que la série est citée au côté du chef d’œuvre d’HBO. En effet, quelques similitudes amusantes connectent Oz au mythique Tony Soprano : sa carrure, ses racines italiennes, son rapport ambigu avec sa mère et son lien avec la pègre…
Pour le reste, THE PENGUIN se démarque par son sens du genre soutenu, aussi bien dans son rythme que ses rebondissements. Une bien belle composition qui nous amène avec exaltation jusqu’à son final fatidique.
Conclusion
Le problème dans tout ça, c’est que malgré l’intensité du personnage d’Oz, celui de Sofia lui vole la vedette. Du moins un temps. Ce qui s’avère, au départ, exaltant pose ensuite la question de sa conclusion. Et justement celle-ci conjugue chaque atout de la série limitée et effectue des choix cohérents. Qu’ils se répercutent sur la mère d’Oz, son protégé, jusqu’à la sulfureuse Sofia.
Un final qui tire à quatre épingle notre Pingouin dans un jeu de fausse vérité déchirante. De plus, il laisse suffisamment d’ouverture à son univers pour être exploité sous différents formats. Pour celui qui est du spin-off et de minisérie en huit épisodes, THE PENGUIN rempli t’elle son contrat ? Bien plus que prévu. Notamment dans sa forme de pur thriller.
Et pour ce qui est d’enrichir l’univers de la nouvelle franchise, le show se suffit a lui-même par sa simple démonstration de genre. Même si, dans sa finalité, il se révèle avare en caméo. En soi, la série est, de base, affreusement casse-gueule. Et pourtant, la production tire le meilleur de ses différentes caractéristiques et révèle tout son potentiel dans son exécution. Une bien belle prolongation du formidable film The Batman.
Les + :
- La bonne idée de l’exploitation d’un univers D.C. éculé version criminelle grâce à son antagoniste.
- Une caractérisation idéale du profil atypique d’Oz Cobb, dit succinctement « Le Pingouin« . Ou les nuances d’un anti-héros qui demeure manipulateur et tueur.
- Colin Farrell, toujours délectable et méconnaissable.
- Un déroulement d’un truc très efficace et qui rappelle, sous de nombreux aspects, la cultissime The Sopranos.
- Le profil épatant de Sofia Falcone joué par Cristin Milioti. Un caractère féminin passionnant qui vole la vedette et dispose d’une origin story très réussie.
- Le genre du thriller mafieux dans ce qu’il a de moins en ronronnant. Un rythme soutenu, des rebondissements, et un rapport à la violence suffisant.
- Une conclusion idéale.
Les – :
- Quelques facilités scénaristiques ou caractéristiques, notamment autour de ses seconds rôles.
- Un esthétisme une mise en scène moins étoffées que le long-métrage de Matt Reeves.
MA NOTE : 16.5/20
Les crédits
CRÉATRICE : Lauren LeFranc
AVEC : Colin Farrell & Cristin Milioti…, Rhenzy Feliz, Deirdre O’Connell, Carmen Ejogo, Clancy Brown, Theo Rossi, et Michael Kelly,
mais aussi : Scott Cohen, Michael Zegen, James Madio, Shohreh Aghdashloo, Jared Abrahamson, guests stars : Emily Meade, Aria Shahghasemi, et Mark Strong,
ÉPISODES : 8 / Durée (moyenne) : 58mn / DIFFUSION : 2024 / CHAÎNE : HBO / MAX
Terminé la série hier soir
The Penguin est finalement le monstre absolu, la soif du pouvoir a n’importe quel prix !!