THE LAST OF US – saison 2

EN DEUX MOTS : En janvier 2023, HBO dévoilait l’un de ses nouveaux mastodontes télévisuel avec The Last of Us. Ou l’adaptation réussie d’un monument vidéoludique composés de deux volets. En plus d’accomplir ce petit miracle sur petit écran, la série était parvenue à maintenir la force d’écriture du jeu vidéo, malgré quelques changements dans son déroulement. Une force narrative aux regards avisés et dont la suite était, dès lors, encore plus largement scrutée.

Un peu plus de deux ans plus tard, celle-ci se dévoile dans une nouvelle aventure raccourcie à 7 épisodes. Un choix qui fait naturellement grincer des dents, mais qui demeure logique vu la largeur d’adaptation du second volet, intitulé Part II. Ainsi, après une adaptation fidèle et entière du premier jeu (et son DLC, Left Behind), le show de Craig Mazin et Neil Druckman entend frapper fort. Notamment après de nombreuses critiques (fondées) sur son manque d’infectés à l’écran. Entre autres choses.

Cinq ans après les événements de la première saison, Joel et Ellie sont rattrapés par leur passé, les poussant dans une confrontation difficile l’un avec l’autre. Ils devront faire face à un monde encore plus périlleux et imprévisible que celui qu’ils pensaient avoir laissé derrière eux.

Les affres du temps

Sa nouvelle saison continue donc son aventure 5 ans après les événements fondateurs de sa première odyssée. Dans une cohérence indéniable et une intrigue resserré en lieux, cette nouvelle saison lève le voile sur bien plus de profils récurrents. L’occasion donc de retrouver le formidable Pedro Pascal dans la peau du tenace Joel et Bella Ramsey dans celle d’Ellie. Héroïne passée de l’adolescence à celle de jeune femme résolue et combative. Et plus largement peut-être, à celle d’antihéroine…

Car cette seconde saison va nous emmener toujours plus loin sur les nuances de la nature humaine. Et notamment avec le profil d’Ellie, dans un développement d’autant plus poussé.

Face à elle, cette saison, introduit le personnage d’Abby, sous les traits plus fins de Kaitlyn Dever. (dont le physique est ironiquement très proche de l’Ellie des jeux). Cette chimère, animée par la haine à l’état pure, se révèle être un personnage majeur de The Last of Us Part II, sortie en 2020. Et dont l’implication durant cette saison s’avère très rapidement et parfaitement illustré.

« Le passé c’est le passé Darling. Ça parasite le futur ... »

C’est pourtant toute la difficulté d’une adaptation maligne d’un jeu vidéo aux attraits scénaristiques aussi poussés. Mais ici il s’agit du fer de lance de cette saison qui va faire converger deux lignes en un lieu.

« Le passé c’est le passé Darling, ça parasite le présent ! Je ne veux pas te perdre ! Je ne peux pas…je ne peux plus…je ne suis pas assez fort… Et moi je dis non, même pas en rêve. (…) 

Les Indestructibles

De cette façon, l’adaptation de Part II sur plusieurs saisons se révèle indispensable, vu le nombre de moments manqués en saison 1. Même si le choix des showrunners se porte, naturellement, sur une intrigue à la dynamique bien plus dramatique que celle du jeu. Et donc plus éloigné de l’action pure. Un aspect pourtant imputable aux jeux vidéo, qui contribue à la bonne dynamique du développement des personnages grâce à ses pérégrinations apocalyptiques. Et justement, ses pérégrinations manquent aujourd’hui d’intensité pour détailler ce périple qui épuise littéralement, lessive, nos héros dans le jeu.

Dans ce sens, cette seconde saison continue d’explorer de nouveaux pans de son univers. Et notamment via quelques genèses de personnages inédites et toujours enrichissantes. Néanmoins, avec un portage sur petit écran, qui révèle des différences notables niveau sensation, la série fait ainsi le choix (logique) de faire la lumière bien plus tôt sur le profil d’Abby. Dont le passé et le parcours s’avère étourdissant et contradictoire. Du moins dans nos motivations de joueurs, manette en main.

Une différence narrative majeure, bien plus linéaire et (un peu) moins percutante dans sa finalité, mais qui demeure compréhensible puisque sa troisième saison à venir ne sera pas visible avant quelque temps. (Si on prend en compte les délais moyens actuels). Ce qui pourrait donc réduire l’impact des révélations sur son cheminement personnel.

…Mais ça motive le présent. Celui de la vengeance.

Cependant, malgré son montage qui diffère quelque peu, cette saison demeure très fidèle et pour cela elle adapte, globalement, la première partie du jeu. Qui se place quasiment exclusivement sous le point de vue d’Ellie. Alors certes, ce changement de direction, naturellement présent dans Part II, a fait grincer des dents. Par le passé comme aujourd’hui. Et au fil des semaines, ce parti-pris et le rôle plus restreint de Joel, ont énormément diviser le public.

C’est compréhensible, mais pour autant, cela renforce l’intérêt de sa deuxième partie qui prendra une direction nouvelle. Toujours est-il que pour son retour tant attendu, The Last of Us 2 dévoile une nouvelle aventure post-apocalyptique très solide. Dans un rythme en montagne russe (notamment émotionnelle), mais qui ne lésine pas sur l’action.

Ce faisant, cette suite gomme l’un des défauts majeurs de sa saison précédente. Un constat qu’on peut rapidement constater, grâce à un moment d’action grandiose qui rappelle à bien des égards, Game of Thrones.

Thérapie apocalyptique

Et si l’action et l’épouvante (comme le prouvent deux, trois scènes savamment exécutées) s’avèrent cruciales dans l’illustration de cet univers cauchemardesque, The Last of Us n’en demeure pas moins une série purement dramatique. Et surtout à échelle humaine.

Pour preuve, son contexte d’après-fin du monde à l’atout de nous amener vers des thèmes sombres concernant la nature humaine. Celui de cette saison réside dans sa vision de la vengeance. Mais aussi du cycle de violence (vicieux) qui s’ensuit. Plus largement, la série aborde la notion de choix, de sacrifice, et de leurs conséquences à effet personnel. Mais pas uniquement.

The Last of Us apporte une vision particulière sur la légation, qu’ils s’agissent d’un comportement violent comme plus artistique. La série révèle néanmoins beaucoup de nuances et de niveaux de lecture à ce sujet et ces nombreux ajouts narratifs le prouvent et étayent ses différentes tonalités. Souvent de façon aussi brillante qu’éphémère.

L’ajout inédit de Catherine O’Hara dans le personnage de Gail le prouve à merveille puisqu’elle sert la psychologie de Joel dans un premier temps, puis dresse un portrait nuancé et pragmatique d’Ellie ensuite.

Parmi ses autres différences notables, cette seconde saison incorpore quelques guests jamais inutile (de Tony Dalton en père ambigu à Joe Pantoliano en mari esseulé) et redéfinit ensuite (et en partie) le parcours des principaux membres de Jackson.

Jackson’s Five & cie

En plus d’offrir au frère de Joel, le valeureux Tommy (Gabriel Luna) quelques moments de bravoures épiques, ce sont ses nouveaux membres – Dina (Isabela Merced) et Jesse (Young Mazino) qui trouvent une place dans le cœur du récit (et dans le générique).

Néanmoins, c’est bel et bien la chanteuse Isabela Merced qui dispose d’une place de choix dans ce nouveau récit. La jeune actrice impressionne par son naturel de jeu et notamment car le profil de Dina s’avère diablement bien remanié aujourd’hui.

Et si la distribution de Jackson complète en grande partie ce récit, cette saison décide dès lors d’introduire (secondairement) le terrible Isaac, sous les traits de l’excellent Jeffrey Wright. (celui-là même qui prêtait déjà sa voix grave a l’antagoniste dans le jeu).

Apocalypse Now

Cette saison 2 fait aussi le choix (crucial) d’incorporer les « spores » dans son intrigue. Après avoir été absent de sa première saison. Une caractéristique majeure de l’infection du cordyceps et d’autant plus dans le parcours d’Ellie, vis-à-vis de son immunité et des conséquences que cela implique sur son entourage. Au-delà de ça, la série prouve un savoir-faire impressionnant côté technique.

Car, de manière plus globale, cette deuxième saison de The Last of Us est une aubaine visuelle et technique. Si cette aventure compte 7 metteurs en scène différents (dont 3 déjà familiers de la production) la série révèle une belle cohérence dans sa mise en œuvre. Certes, le budget alloué par HBO est celui d’un blockbuster du petit écran. Toutefois, force est de constater que la direction artistique du show est sensationnelle. (par sa largeur comme son sens du spectacle.)

Dans un premier temps, cette saison donne vie aux deux villes qui servent son récit : Jackson et Seattle. Deux décors dont l’environnement diffère en taille, en climat comme en infrastructures, mais qui prennent vie grâce à ses bâtiments alentours détaillés. Bien souvent, les décors présentés demeurent à l’abandon et son rempli de vestiges du passé – la série accordant de l’importance aux différents items de son univers – à l’instar du jeu.

(and After)

Néanmoins, après 25 ans d’épidémie, la série présente de manière réaliste les fondations d’un nouveau monde. Aussi instable soit-il. Qu’ils s’agissent de force armés (le W.L.F.), d’un Conseil municipal d’après-crise jusqu’à ses hordes d’infectés qui déferlent à l’écran, The Last of Us 2 ne manque pas de gigantisme pour asseoir son propos.

Et comme je le mentionnais plus haut, cette suite muscle son jeu sur ce dernier point. Outre un épisode gargantuesque et sous tension pendant une heure, cette saison multiplie la menace infectée et la diversifie. Cela passe donc par les spores, magnifiquement (bien que brièvement) représenté, mais aussi par d’autres types de prédateurs. (les effrayants stalkers !). Après des CGI conséquents, on peut applaudir le travail des prothésistes qui rendent ces différentes menaces plus vraies que nature.

Interlude

Vous retrouverez ici les critiques de chaque épisode :
Attention garantie full spoilers

. Ép. 1 : Future Days
. Ép. 2 : Through the Valley
. Ép. 3 : The Path
. Ép. 4 : Day One
. Ép. 5 : Feel Her Love
. Ép. 6 : The Price
. Ép. 7 : Convergence

Trio sur HBO et haine sur commande.

De manière plus globale et au vu de ses nombreuses caractéristiques, cette deuxième saison de The Last of Us semble plus maîtrisée. Pas plus complète en revanche, et c’est naturellement (et vainement) ce qu’on pourrait lui reprocher puisqu’elle était forcée de diviser son aventure en (au minimum) deux parties. Et si la suivante sera consacrée au personnage d’Abby, cette saison 2 à en effet eu la lourde tâche d’apporter une transition difficile à son histoire.

En resserrant cette saison sur Ellie le récit à ainsi déplut à de nombreux fans, nouveaux comme anciens. Néanmoins, il paraît inconcevable, encore aujourd’hui, que l’orientation sexuelle de son personnage soit encore un problème pour une partie du public. Comme le fait que Bella Ramsey soit une artiste non-binaire joue assurément dans la balance des commentaires haineux à son égard.

Pour ma part, c’est l’image que renvoie son personnage, plus disgracieux et éloigner des jeux, qui me déplait. Depuis la saison 1. Toutefois, je reste impressionné par l’intensité dont fait preuve son interprète quand il s’agit de mettre en images l’ambiguïté de son personnage.

À ses côtés, en revanche, Pedro Pascal demeure magistral en tout temps. Et l’intrigue le lui rend bien, notamment dans un épisode spécial qui lui est (en partie) consacré. La relation du duo atteint même un stade qui donne lieu à une scène mémorable et crève-cœur avant son final. Au risque de surprendre les joueurs…

Conclusion

Cette deuxième aventure gomme donc la grande majorité des reproches qu’on avait pu lui faire par le passé. (sa violence trop restreinte, sa faible menace d’infectés, le montage d’une adaptation qui fait l’impasse sur de nombreux passages…). En revanche, elle souffre inévitablement de la division de son histoire, notamment en restant (globalement) très fidèle à la construction du jeu qu’elle adapte.

Son final le prouve allégrement avec un cliffhanger d’envergure. Ce qui est sur, c’est qu’il me tarde de découvrir le rôle d’Abby plus en profondeur. Kaitlyn Dever (si elle n’a pas la carrure) dispose de l’intensité nécessaire pour nous éblouir, sa présence (aussi courte soit-elle) la largement prouver durant cette saison.

Enfin, difficile de nier la grande qualité d’écriture (et d’exécution) dont fait preuve The Last of Us. Assurément une masterclass made in HBO. Qu’elle redynamise le genre post-apocalyptique ou tout simplement en livrant des moments de cinéma poignant. Du drame intime jusqu’aux plus ambiguës nuances sur l’être humain via une partie thriller percutante. Avec un futur récit qui arrive sur une opposition de point de vue, la saga n’a pas fini de surprendre. Et tant mieux.


Les + :

  • Une nouvelle saison qui adapte fidèlement la première moitié du second jeu, avec toutes les difficultés qui vont avec.
  • Plus d’actions, moins de moments manqués grâce à la division de son récit en plusieurs saisons.
  • Une force d’écriture qui explore à merveille les grands thèmes de son histoire : les affres du temps, le cycle vicieux de la vengeance, les choix et leurs conséquences, etc.
  • En son centre, les portraits de Joel et Ellie impressionne par leurs justesses. Pedro Pascal livre une performance crève-cœur et Bella Ramsey impressionne par l’ambiguïté de son caractère.
  • Face à eux, Kaitlyn Dever impressionne par l’intensité de son personnage fondateur, en effet miroir avec Ellie.
  • Une distribution plus large et chorale qui fait mouche. Allant de l’impétueuse Dina (Isabela Merced), dans un portrait remanié et naturel au valeureux Tommy (Gabriel Luna), époustouflant dans quelques moments de bravoures haletant.
  • Des ajouts narratifs toujours enrichissants, et notamment via quelques guests bien trouvés. Mention spéciale à Catherine O’Hara en psychanalyste débridée qui dresse un portrait d’antihéroine d’Ellie très juste.
  • Une vision beaucoup plus large et fournie du cordyceps qui passe par (beaucoup) plus d’infectés à l’écran, l’arrivée des spores ou d’autres types d’infectés.
  • Quelques scènes d’épouvante parfaitement réalisées et qui brillent par leurs atmosphères à suspense.
  • Une mise en œuvre technique éblouissante. De ses effets spéciaux d’envergure jusqu’au travail des prothésistes pour des maquillages plus vrais que nature.
  • La vision cohérente (politique et social) d’un monde d’après-épidémie.
  • Un épisode absolument grandiose rempli d’action et d’intensité. (Spoilers : ICI)
  • Un épisode spécial qui atteint un point culminant niveau émotion. (Spoilers : ICI)

Les – :

  • Une saison qui a la (très) lourde tâche d’adapter une première partie du jeu qui manque de recul sur la complexité émotionnelle de son histoire.
  • Un rythme en montagne russe, même si jamais ennuyant.
  • Le profil d’Ellie toujours un peu trop antipathique – sous les traits de Bella Ramsey – et qui ne parvient pas totalement à porter une (bonne) partie du récit sur ses épaules.
  • Quelques émotions contrites au fil des épisodes.
  • Quelques arcs narratifs qui manquent un peu de surprises. Et d’autres adaptés un peu trop rapidement pour pleinement convaincre. La preuve : ICI (spoilers)
  • En découle une adaptation qui manque d’intensité émotionnelle quand il s’agit de mettre en œuvre le périple de nos héros sur ce court laps de temps.
  • Avec son montage assez linéaire et exigu, le manque de présence de Kaitlyn Dever dans la peau d’Abby s’avère un peu grisant.

MA NOTE : 17/20


Les crédits

CRÉATEUR : Craig Mazin & Neil Druckmann

AVEC : Bella Ramsey & Pedro Pascal, Gabriel Luna, Isabela Merced, Young Mazino, et Kaitlyn Dever,

mais aussi : Rutina Wesley, Jeffrey Wright, Spencer Lord, Ariera Barer, Danny Ramirez, Tati Gabrielle, Robert John Burke,

Michael Abbott Jr., Alanna Ubach, Hettienne Park, Ben Ahlers, Tony Dalton, avec Joe Pantoliano, et Catherine O’Hara (…)

ÉPISODES : 7 / Durée moyenne : 55mn / DIFFUSION : 2025 / CHAÎNE : HBO

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