THE LAST OF US : épisode 4 « Day One » – saison 2

En 3 épisodes, la saison 2 du mastodonte The Last of Us a déjà beaucoup accomplis. Elle a mesuré les affres du temps, proposer un moment d’action titanesque, fait tomber le couperet sur une vengeance choquante et dresser le portrait d’une antihéroïne en quête de sang. Entre autres choses. Et malgré un retour dont le rythme en dents de scie fait un peu grincer des dents, difficiles d’occulter la finesse d’écriture de la série. Une série aux accents bien plus dramatiques qu’horrifiques, même si elle a su se montrer brillante sur plusieurs domaines.

Et justement, arrivé à mi-saison, cette suite (ré)intensifie son récit dans une nouvelle démonstration d’action aux accents cauchemardesques. La quête douloureuse d’Ellie (Bella Ramsey), accompagnée de Dina (Isabela Merced), nous emmène de façon pérenne à Seattle. Pour un voyage qui débute plutôt solidement.

Mais contrairement au jeu vidéo, accès sur la découverte progressive, le showrunner Craig Mazin décide d’apporter d’emblée de la consistance aux forces en place dans ce nouveau terrain de jeu. (À l’instar des motivations d’Abby (Kaitlyn Dever), qui ouvrait la saison). Une direction qui devient fréquente pour la série, qui vise l’essentiel, de façon plus choral. Du moins c’est l’impression que donne cet épisode, aux premiers abords, tandis que sa suite restreint son regard.

C’est cette fois sous la direction d’une réalisatrice d’apparat plus anecdotique – Kate Herron (qui a réalisé quelques épisodes de Loki ou Sex Education) que ce 4e épisode se dévoile. Pour un résultat à la fois musclé et intimiste. Si le choix de cette jeune réalisatrice peut d’abord surprendre, sa touche féminine révèle une belle cohérence dans cet épisode. Et notamment vu le stade que va atteindre la relation entre Ellie et Dina aujourd’hui.

ÉPISODE 4 : Day One

EN DEUX MOTS : Jusqu’à présent cette adaptation du jeu vidéo culte à briller par ses différences narratives, mais surtout par ses ajouts concernant sa mythologie. À l’image de l’émergence de l’épidémie ou de la naissance d’Ellie en première saison. Mais aussi par les visions succinctes, mais révélatrices, des différents opposants qui ont croisé la route de nos héros. (C’était par exemple le cas à Kansas City ou avec le clan de l’inquiétant David, pasteur et cannibale à ses heures).

Une bien belle manière d’appréhender l’âme humaine dans toutes ses déviances, une fois le monde mis à genoux. Cette saison 2 réitère l’exercice, comme le démontre « Day one » qui fait la lumière sur une rencontre entre deux factions opposées. La FEDRA, ce système militaire abusif et un groupuscule mystérieux, dont l’appartenance plane en premier lieu. L’épisode s’ouvre ainsi sur une scène se déroulant 10 ans dans le passé, en 2018, dans la Zone de Quarantaine à Seattle.

L’apparente camaraderie de la scène laisse place à un dialogue de fond sur l’oppression et la violence. D’où s’y détache un Sergent de la FEDRA silencieux : Isaac Dixon (Jeffrey Wright, qui reprend son rôle brillamment). Cette scène est un ajout significatif au récit puisqu’elle permet de dresser un portrait plus concret de ce redoutable antagoniste, passer de soldat désabusé à membre de la résistance après le massacre détaché de son unité.

« Day One » va succinctement – 53 minutes – mettre en relief la nuance des actes au nom d’une cause justifiée. La violence amenant pourtant à la violence. Ce parallèle, on va pouvoir le distinguer dans les méthodes et dans les motivations de son duo d’héroïnes, ainsi que dans celles du leader du W.L.F.

L’oppresseur oppresser. Qu’importent les méthodes, le résultat reste le même.

Cette scène – flashback – d’ouverture aura d’autant plus son importance ensuite, puisqu’elle va permettre de mesurer la radicalisation qui s’est faite sur ses forces en place. Ainsi que le contexte de guerre qui fait rage à Seattle durant l’arrivée de nos deux héroïnes. Avec d’un côté, les Wolfs, menés par un Isaac adepte de la torture et de l’autre, les « Scars ». Cette secte religieuse reconnaissable par ses cicatrices sur les joues et sa Foi inébranlable.

Mais qui s’est aussi farouchement endurcie dans ses méthodes après la mort de sa « Prophétesse ». Sa vision de plusieurs pendaisons et éviscérations, plus tard dans l’épisode, va nous le prouver allégrement. Cette ultra-violence était largement palpable et inquiétante dans le jeu. Une violence graphique que la série avait jusqu’à présent eu du mal à assumer, tandis que cette seconde saison assombrit plus radicalement la vision de son monde post-apocalyptique.

« Feel Her Love »

Slogan Séraphites

Et comme chaque acte de violence se justifie par un autre acte de violence, le dialogue semble vain entre ses deux factions ennemies. Un parallèle évident entre la vengeance d’Ellie et celle d’Abby. L’oppressé de cette scène parvient tout de même à faire vaciller son oppresseur grâce à un fait accablant : la transition de certains membres du W.L.F à rejoindre les Séraphites. Et non l’inverse. Ou la chute progressive d’un système – militaire – défaillant pour une radicalisation vers une secte religieuse.

C’est dans tous les cas une bien belle manière d’appréhender la décision future d’Isaac dans cette guerre, mais aussi de souligner une réalité effrayante de certains individus qui se tournent vers des extrêmes. Ce 4e épisode est aussi et surtout l’occasion de pleinement apprécier la dynamique du duo Ellie/Dina. Mais aussi de le voir en action. Deux profils combatifs confrontés au pire dans cette ville aux dangers multiples et qui y pénètre, l’air de rien.

Tour d’horizon (touristique)

Avant cela, ce nouvel épisode va mettre en scène un des rares moments doux de ce segment. Scène iconique du jeu retranscrit encore de manière très fidèle aujourd’hui, « Day One » met en action une Ellie prise d’un élan artistique dans ce magasin de musique abandonné. Face à une Dina émerveillée. Un moment idéal pour le futur couple, dont on peut souligner l’apprentissage personnel (et réussi) de Bella Ramsey pour l’occasion.

Cette parenthèse enchantée est également l’occasion de mesurer la légation de Joel durant cet épisode, sous différents angles et instruments. Musicale et meurtrier. À ce stade, la série fait encore le choix d’écarter la présence de Pedro Pascal dans des scènes flashbacks références. Le choix d’un déroulement linéaire qui a ses avantages – comme celui de placé pleinement Ellie au centre du récit – mais qui pourrait vite s’avérer frustrant s’il s’étend trop à l’avenir.

Les clins d’œil sont, quoi qu’il en soit, encore nombreux. Et la mise en images de cet épisode gomme largement ce manque de présence. (même si l’aura de son personnage dégouline de son antihéroïne). Quoi qu’il en soit, le parcours de nos aventurières les mènera à la découverte d’une nouvelle scène de massacre. De quoi y laisser quelques tripes et renvois nauséeux. Et après la vision de son prisonnier nu et torturée, The Last of Us se rapproche invariablement de son matériel. Tout en s’en affranchissant.

Ce passage dans la station télé est naturellement remanié et raccourci ici, mais il mène à la même finalité : la dangerosité des deux factions en guerre à Seattle. Et c’est ici que nos deux personnages vont faire couler le sang « d’innocents » pour la première fois. Et déclencher la colère du W.L.F., ainsi qu’une petite course-poursuite rondement menée. Un déroulé d’action relativement efficace, à l’instar de son suspense.

« Subway… eat fresh« 

La série réadapte très fidèlement le chapitre horrifique le plus marquant de « Day One ». A savoir sa fuite dans le métro. Si ce segment occulte (pour le moment ?) la découverte des abominables « puants », et qu’il raccourcit drastiquement ce moment de survie, il n’exclut pas la fureur des infectés en milieu hostile. Notamment avec sa pénombre, ses Wolfs dévorés, et ses fusées rouges reconnaissables. C’est, dans tous les cas, une nouvelle occasion de voir en action ce jeune duo bourré d’entrain.

Tout ce déroulement d’action cauchemardesque débouche sur une course-poursuite exigus à travers les wagons et les squelettes, puis à la découverte de l’immunité d’Ellie sous le regard incrédule et terrifiée de Dina. Et une fois n’est pas coutume, Craig Mazin apporte une constante à cet élément narratif majeur. Comme ici avec la réaction de Dina, bien plus réaliste, ou du moins troublée, posée.

Ainsi, les différences sont nombreuses entre le profil de Dina dans le jeu et celui dans la série. De son relationnel avec Joel d’abord, jusqu’à la naissance de son histoire d’amour avec Ellie. Puis par quelques détails plus général, à l’instar de sa religion et sa sœur disparue, tout deux non mentionnés ici. Même si la série va aborder plus directement la question de sa (bi)sexualité, et notamment grâce à un monologue réussi (où elle fait référence à une mère dans le déni)

Enfin, malgré sa hardie reconnaissable, le comportement de Dina semble plus pragmatique dans le show, comme le démontre ensuite sa scène dans le théâtre via un face-à-face mémorable. Dans le jeu, elle transpire d’un amour aveugle pour Ellie, l’accompagne sans brocher à Seattle et est prête à se sacrifier pour elle.

Dis oui, Dina.

Ici, son showrunner mixte le tout, met justement Ellie en position de sacrifice, et fait l’impasse sur l’amertume de la découverte de la grossesse de Dina. C’est beaucoup, et sa finalité se révèle être à double tranchant.

Les spores du métro laissent ainsi (pour le moment) la place à une nouvelle morsure bénigne pour Ellie. Tandis que la peur, elle, laisse la place à la tendresse dans une première scène lesbienne idéale. Et qui, comme la vision du quartier gay et « optimiste » dans Seattle plus tôt dans cet épisode, risque (inutilement) de faire grincer des dents.

Sans trop s’étendre sur le moment, la série fait une nouvelle percée lumineuse autour de ses deux personnages en se concentrant sur « l’après ». Autour d’un réveil attendrissant et la possibilité d’un futur bucolique. L’alchimie entre les deux actrices compense un quasi-trop-plein d’optimisme. D’un sens, ce trop-plein d’optimiste est aussi présent pour mieux nous accabler d’amertume dans sa résolution. Et j’espère que cette adaptation continuera de faire les choix justes pour y parvenir. C’est bien parti pour.

Craig Mazin fait ainsi le choix d’un amour qui jaillit en plein cauchemar, à contrario d’un avant cauchemar dans le jeu. Ce choix peut paraître précipité (et ce, malgré le petit jeu de séduction qu’on avait pu découvrir dans les épisodes précédents), notamment vu la légèreté avec laquelle est abordée le sujet sur la grossesse de Dina. C’est discutable. Dans les deux cas, le duo se solidifie d’autant plus et suit (presque) la même trajectoire. Le même avenir incertain.

Conclusion

Et dans tous les cas, Isabela Merced confirme aujourd’hui tout le bien que je pensais d’elle depuis sa première apparition. Tandis que Bella Ramsey assoit sa position d’une Ellie plus sauvage et intransigeante, obnubilée par la vengeance avant toute chose. Ce vecteur de toutes les destructions à venir.

Avec « Day One », la série se rapproche de l’exercice d’adaptation fidèle, mais concis, qui me rappelle sa première saison. Brillante, mais légèrement imparfaite. Ses personnages transpirent d’authenticité heureusement, et comble le manque de surprises malgré ses différences narratives.

Au vu de son trailer, son 5e épisode vise une certaine continuité tout en intégrant un élément fondateur de l’infection. Quitte à étriquer le point de vue de son aventure ? Et ce, avant un épisode flashback qui risque éclairer de nombreux sous-entendus et tirer quelques larmes ? Cela reste à définir.


Les + :

  • L’apparition succincte et efficiente d’Isaac, leader intransigeant et inflexible des Wolfs. Notamment grâce à un flashback idéal et l’interprétation tout en intensité de Jeffrey Wright (qui incarnait déjà Isaac dans le jeu).
  • Un épisode qui met brillamment en perspective cette boucle infernale de violence qui engendre la violence.
  • Mis bout-à-bout, c’est presque quarante minutes centrés sur la dynamique du duo Ellie/Dina. En passant par des rires, des larmes, de la poésie, de la tendresse, de la tension, du suspense et de l’amour.
  • Bella Ramsey et Isabela Merced qui s’enfoncent toujours un peu plus authentiquement dans leurs rôles respectifs.
  • Quelques scènes fidèles et réussies (le magasin abandonné, la station télé, le métro…) malgré un exercice concis.
  • Une action restreinte, mais généreuse.

Les – :

  • Une mi-saison qui se pose comme une adaptation fidèle (bien que remaniée), mais un brin trop concis pour pleinement nous immerger dans son nouvel environnement cauchemardesque.
  • Le stade précoce (et un peu précipitée) qu’atteint la relation d’Ellie et Dina pourtant merveilleuse. Malgré sa logique suite à la découverte sur l’immunité d’Ellie.

MA NOTE :


RÉALISATION : Kate Herron / SCÉNARIO : Craig Mazin

SORTIE (France) : 05 Mai 2025 / DURÉE : 53mn

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