
Après un retour d’apparence timide, mais solide, The Last of Us saison 2 à gentiment enclenché les premiers rouages de sa thématique sur la vengeance. Ce faisant, sa rupture dramatique s’annonce d’autant plus probante, vu la distance émotionnelle qui sépare ces deux têtes d’affiche. Ainsi, son deuxième épisode retranscrit-il fidèlement l’un des moments les plus choquants du jeu qu’il adapte ? Ou, pour ma part, du monde du jeux vidéo tout court. Oui, et avec intensité. Mais en plus, ses showrunners y incorporent un petit (ou plutôt énorme) plus en amont…
Dans tous les cas, le créateur Craig Mazin rempile à l’écriture de cet épisode et c’est cette fois le Britannique Mark Mylod qui réalise ce segment. S’il s’agit de sa première mise en images pour le show post-apocalyptique, celui-ci s’est distingué pour son travail sur deux autres mastodontes de l’écurie HBO : la saga fantastique Game of Thrones, et plus largement encore Succession. La présence du metteur en scène s’avérait donc exaltante à mes yeux. Le résultat ne déçoit pas et nous amène même sur le terrain de l’action avec un épisode inoubliable.

ÉPISODE 2 : Through the Valley
Comme son épisode introductif, ce second épisode s’ouvre sur le personnage d’Abby (Kaitlyn Dever). D’une haine en sommeil qui anime sa motivation jusqu’à un rêve douloureux, ce début de saison n’hésite pas une seconde à dévoiler le mobile de cette vengeance. Contrairement au jeu.

Avec un déroulement qui s’annonce plus linéaire, afin de ne pas totalement occulter ensuite son point de vue, ce choix est cohérent. D’autant que ce mystère dans le jeu était, de loin, son seul élément d’intrigue moins bouleversant. (même s’il contribuait ensuite à renforcer le capital sympathie de son antihéroïne).
Quoi qu’il en soit, « Through the Valley » qui tire son titre du morceau bien connu, fait mention de passer à travers la vallée de la mort. Chose que ce second épisode va faire allégrement, avec brio, grâce à sa démonstration d’action étourdissante. Dans un déferlement de fureur complètement inédit, les showrunners y ont vue l’opportunité de tester les fondations solides de Jackson.

Et force de constater que cette double menace explose à l’écran, durant (presque) une heure, sous nos yeux meurtris. Une bien belle réponse à, comme je le mentionnais : un premier épisode faussement calme.
L’épisode 2 de la saison 2 de The Last of Us dévoile ainsi un rythme très soutenu. Une dynamique assez peu commune, notamment pour une série qui se porte sur le drame plutôt que l’action, mais qui ne l’empêchera pas de s’imposer comme une masterclass du genre aujourd’hui.

Une tempête gronde dans le Wyoming
Tournés sous des conditions difficiles, un élément largement perceptible à l’écran, ce début d’épisode démontre toute la motivation d’Abby. Et ce, malgré les difficultés (météorologique comme numérique, vu la structure que représente Jackson) qui s’ouvrent aux Fireflies Five. Très vite, ce petit groupe se retrouve scinder en deux, dont une partie est uniquement composé d’Abby. Seule contre les éléments extérieurs.

Pour le moment, le récit ne cherche pas à trop caractériser ses partenaires, resserrant ainsi l’attention sur Abby. Leurs silences et leurs regards suffisants à faire le contrepoids nuancé de son déferlement de haine à venir. Très rapidement, notre chimère, à la recherche d’une patrouille à capturer, se retrouve face au danger. Très intelligemment, tandis que nos Jackson’s Five (je fais référence au cinq crédités du générique) sont répartis en trois groupes, l’intrigue nous apprend que les infectés parviennent à survivre en masse, malgré le froid. Comme quoi, la nature est bien faite.

Le personnage d’Abby va vite le découvrir dans une scène fantastique. Dans des sables mouvants (enneigés) dans lesquels notre antihéroïne s’enfonce inexorablement, une horde d’infectés surgit. Malgré l’antipathie qu’on peut dès lors ressentir pour son personnage, cette scène de survie est aussi grandiose que brillamment réalisée. L’attaque sur Jackson va le prouver bien plus largement, mais la production à mélanger VFX et cascadeurs maquillés pour sa représentation d’infectés en masse. Et le résultat s’avère bluffant.

La course effrénée d’Abby l’amène ainsi jusqu’à l’iconique scène du grillage. Qui parvient ici à être d’autant plus réussie que l’original grâce à sa longueur et son intensité. Avec cette rage des infectés largement perceptible et le calvaire physique d’Abby, Mark Mylod filme un segment intense qui s’achève par un sauvetage symbolique* de la main de… Joel (Pedro Pascal).
Les Jackson’s Five passe à l’action.
Parallèlement, « Trough the Valley » dévoile un moment d’envergure qui risque de convaincre ceux en mal d’action. Mais plus largement, à peu près tout le monde. Si sa première aventure disposait, à mi-saison, d’un moment similaire, force est de constater que la série pousse les curseurs (pyrotechniques, épiques, vfx…) à son paroxysme cette fois. Une démonstration apocalyptique, du combat des vivants contre les morts, qui n’est pas sans rappeler la Longue Nuit dans la dernière saison de Game of Thrones.

Bien loin de la mollesse d’un The Walking Dead, les infectés de The Last of Us disposent d’une rage endiablée qui se ressent à l’écran. En s’entrechoquant sur les parois de Jackson, puis en grimpant les uns sur les autres, leurs dynamiques d’actions est efficientes au possible. Tout autant que les défenses et la survie de Jackson, largement préparées et organisées, comme le narré Tommy (Gabriel Luna) plus tôt dans l’épisode.

D’ailleurs, l’une des nombreuses réussites de l’attaque de Jackson réside dans le fait que seulement un de ses héros y participe. (si on exclut le personnage plus secondaire de Maria (Rutina Wesley). Pourtant, la vision du combat acharné de ce couple à l’écran porte ses fruits grâce à une intensité folle. Les remparts qui croulent sous les douilles laissent ainsi place à la défense de la grande rue avec un ennemi bien connu des joueurs : le colosse.

Ce redoutable infecté que rien n’arrête (ou presque) dispose enfin d’un temps d’écran qui rend hommage à sa nature effroyable. Dans ce sens, son face-à-face avec Tommy est dantesque. Tout comme les différents moments de bravoures dont fait preuve le frère de Joel à l’écran. Et tandis que la communauté trouve son salut dans le magnifique assaut des chiens, les wolfs passent à l’action eux aussi.
La terrible vengeance d’Abby.
Cette métaphore s’applique avant tout à Abby, Luciole endeuillée devenue soldate chez les Wolfs de Seattle. Une redoutable faction qu’on découvrira largement par la suite et dont l’un des codes d’honneur est de ne pas tuer un ennemi désarmé. Et c’est tout le parallèle de son thème sur la vengeance durant cette saison (et la suivante) : lorsque la haine l’emporte sur la raison. Et ainsi « Every Path has a Price« .

Mais avant de découvrir qu’elle sera ce prix à payer pour Abby dans son choix d’abattre Joel, la série en représente sa terrible vengeance. C’était probablement la plus grande difficulté d’adaptation de cette saison, et la série s’en sort brillamment. Notamment via ses différences, tandis que son fond et sa forme demeure la même. C’était donc toute l’ironie de la chose : le salut d’Abby* par le meurtrier de son père… Tandis qu’une fois dans son antre, ce jeune loup va peu à peu l’écharper.

Je pense sincèrement qu’aux yeux du spectateur qui découvre cette terrible scène, un sentiment de haine va naître à l’égard du personnage d’Abby. Qu’importent ses motivations « justifiées ». Et c’est toute l’analogie de son acte, avant d’en découvrir le destin à Seattle. Car avant ça, son personnage fait preuve d’une rage glaciale, largement appuyer par les cris de douleur de Joel.

En son centre, Kaitlyn Dever bouffe l’écran. Ici, aucun doute sur le choix de l’actrice, qui parvient à faire transpirer de tous ses pores la haine froide de son personnage. Évidemment face à la figure, démunie, mais robuste de Joel, son acte se révèle d’une cruauté quasiment insoutenable. Et si rien n’effacera mon premier souvenir du crâne démoli de Joel (dans le jeu), la série retranscrit de façon magistrale le dernier souffle du héros en utilisant différemment l’instrument de torture utiliser par Abby. Qui tranche transperce dans le vif.

Conclusion
« Trough the Valley » nous transperce aussi, mais le cœur. Et le dernier échange entre Joel et Ellie (Bella Ramsey) mélange parfaitement ce sentiment de tragédie mêlé à la haine. Et c’est bel et bien sur cette facette miroir entre Ellie et Abby que ce The Last of Us 2 va dévoiler son fil rouge. Deux personnages animés par la haine après la perte de leur figure paternelle. C’est donc sous le thème de la vengeance, et des ravages personnels qui vont en découler que la saison va se poursuivre.

Nos Fireflies Five repartent ainsi comme ils sont venus, mais avec un léger sentiment d’amertume entre ses membres. Et c’est largement perceptible à l’écran. A contrario nos Jackson’s Five Four sont ravagés par le choc des événements. Le deuil risque d’être salvateur dans le prochain chapitre.

Avant un troisième épisode qui s’annonce calme et mélancolique, ce début d’adaptation de The Last of Us Part II a donc largement rendu hommage à ce segment central de cette suite épique. Par la même occasion, avec la direction que prend la série, son deuxième épisode à user de choix cohérent concernant ses petites associations entre personnages. Qu’ils s’agissent d’Ellie avec le solide Jessie (Young Mazino, davantage caractérisé) ou de Joel avec Dina (Isabela Merced).

Et si cette saison semble pour le moment occulter quelques scènes indispensables de son univers (le porche, et maintenant la scène de sexe entre Ellie et Dina) s’est pour mieux nous surprendre par la suite. Je mise la dessus. Toujours est-il que pour cette continuité de reprise, The Last of Us 2 frappe fort. Très, très fort. Du grand cinéma, sur le petit-écran.
Les + :
- Une heure d’action et de tension, brillamment réalisée par Mark Mylod.
- Une menace infectieuse qui fait mouche dans sa dynamique.
- De grandes scènes d’action éblouissantes, intense et explosive :
- De la course-poursuite d’Abby face à la horde…
- Jusqu’à l’attaque sur Jackson, d’une largeur impressionnante.
- Les moments de bravoure de Tommy, dont son face-à-face impérial face au colosse.
- L’intensité de Kaitlyn Dever qui dévoile une Abby animée par une haine froide.
- Une scène de vengeance froide et cruelle, qui s’achève sur un dernier échange crève cœur entre Ellie et Joel.
- La facette miroir qui unit la combative Ellie de l’intense Abby.
- Des différences narratives qui fonctionnent à la perfection.
Les – :
- … A chaud, je n’en vois aucuns.
MA NOTE :

RÉALISATION : Mark Mylod / SCÉNARIO : Craig Mazin
SORTIE (France) : 21 Avril 2025 / DURÉE : 56mn