EN DEUX MOTS : Petit événement d’Halloween et rendez-vous quasi annuel sur Netflix, la cinquième (et dernière) mini-série de Mike Flanagan, intitulée « The Fall of the House of Usher », avait tout pour plaire aux fans. Dans une adaptation revisitée d’un classique d’Edgar Allan Poe, La Chute de la Maison Usher (en v.f) s’avère exaltante. Petit fait amusant, et histoire de boucler la boucle, celle-ci est mise en ligne le 12 octobre de cette année. Soit 5 ans, jour pour jour, après celle de sa première série à succès.
En 1980, Roderick et Madeline saisissent l’occasion d’asseoir leur fortune, mais en payant le prix. Des décennies plus tard, les héritiers Usher en subissent les conséquences.
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Seulement voilà, après 4 mini-séries aux qualités très variables, le showrunner semble incapable de reproduire le frisson de Hill House. Assurément dotée d’un joli sarcasme, la série se révèle néanmoins amputée de l’émotion d’un Midnight Mass par exemple et de sa beauté gothique. Demeure une très belle récréation, divertissante, avec ses faux airs de Succession, comme le souligne très justement de nombreuses critiques. Hélas, est-ce suffisant pour convaincre ? Nop.
SUCCESSION MACABRE
Avec huit épisodes avoisinants les une heure chacun, la nouvelle production de Mike Flanagan prend le temps de décortiquer la chute de la maison Usher. Une narration idéale pour un auteur réalisateur toujours très impliqué (il signe le plus gros des scripts et assure la réalisation de 4/8 épisodes, et confie le reste à son ancien directeur de la photographie – Michael Fimognari). Il dévoile alors plusieurs lignes de narration.
L’histoire est avant tout contée par le leader de cette famille (Bruce Greenwood), qui semble désireux de s’absoudre de ses péchés face à une vieille chimère (Carl Lumbly, en procureur de la vieille école). Ses péchés nous sont également décortiqués dans une intrigue secondaire à l’intérêt moindre. Cette fois, Zach Gilford donne ses traits au personnage dans les années 80.
Enfin, et concernant le plus gros de l’intrigue de la série, chaque épisode (du second à l’avant-dernier) nous dévoile les déroulements qui ont conduit aux terribles accidents ayant coûté la vie aux Usher. Ainsi, la série se compose d’un rythme méthodique, qui varie les différentes caractéristiques du showrunner. On y découvre notamment la caractérisation de nombreux personnages, de longs face-à-face entre eux, des affres familiales, ou une certaine notion de l’épouvante-horreur.
Sauf qu’en choisissant de moderniser son propos de nos jours, et en dévoilant des personnages d’autant plus exécrables, Mike Flanagan transforme sa série horrifique en récréation amusante. C’est ce qu’on découvre dans des mises à mort plus sordides les unes que les autres qui s’avèrent réjouissantes. Et non tragiques. Le plus agréable dans tout ça demeure le visage de la mort, sous les traits de la bien familière Carla Cugino. L’actrice peut se targuer d’interpréter une panoplie de figurants qui s’immiscent de près, ou de loin, dans la vie de ses victimes. Et parfois sur plusieurs épisodes.
UN AIR DE FAMILLE
Ses faux airs de Succession, on les découvre justement via ses victimes. Les enfants Usher sont nés dans l’opulence, conditionnés dans l’adversité et dans l’égoïsme. Sauf qu’il manque la nuance aux personnages. C’est ce qui la différencie avec le chef-d’œuvre d’HBO. Cette nuance s’explique néanmoins pour son postulat d’horreur fantastique, qui fait des dérives du capitalisme un sujet central, mais secondaire.
Son large casting se compose, aux deux tiers, de visages familiers des productions made in Netflix/Flanagan. C’est par exemple le cas avec sa femme/muse Kate Siegel dans un nouveau rôle sur mesure. On peut principalement noter les retours d’Henry Thomas, Rahul Kohli, T’Nia Miller, ou Samantha Sloyan (formidable) dans les rôles principaux.
Néanmoins, et parmi la vingtaine de récurrents, quelques nouveaux visages tirent leurs épingles du jeu. Outre la présence du bien connu Mark Hamill (et son timbre de voix légendaire), Bruce Greenwood inonde le récit par son charisme. Tout comme son homologue (Carl Lumbly) en quête de justice. Même si on peut un peu regretter le manque de présence de Mary McDonnell à l’écran (sa version jeune (Willa Fitzgerald), en revanche, est superbe), Mike Flanagan parvient encore à tirer le meilleur de ses acteurs.
Son écriture y contribue grandement. Tout comme sa mise en scène élégante solidifie l’ensemble. Bien que le metteur en scène n’use pas toujours de sa maestria d’antan, il mélange modernité et style gothique. Un hommage évident à Edgar Allan Poe contre la rigidité clinique de notre époque. Le parallèle des décors est flagrant : la grandiloquence des sublimes penthouses des personnages reflète la laideur de leurs âmes.
L’évolution de l’intrigue au fil des épisodes demeure suffisamment addictive pour maintenir en haleine. Des secrets peu à peu dévoilés aux jeux macabres qui annihilent petit à petit la famille Usher.
CONCLUSION
Dans tous les cas, THE FALL OF THE HOUSE OF USHER est loin d’être la meilleure série de son créateur. Probablement la plus amusante et sarcastique, mais aussi celle qui se rapproche le plus de la formule Netflix insipide par excellence.
C’est peut-être la fin d’une ère sur la plateforme avec le départ du réalisateur chez Amazon. Espérons que là-bas ce génie de l’horreur puisse revenir à ce qu’il fait de mieux. Quelque chose qui nous file sévèrement la frousse, mais chatouille aussi nos émotions. Ce qui n’est pas le cas aujourd’hui.
Les + :
- Son postulat d’horreur qui implique les secrets d’une famille d’ultrariches détestables.
- Un casting XXL qui brille par les prestations des anciens acteurs familiers des productions sérielles du créateur. Mais aussi par les nouveaux visages qui complètent les récurrents.
- Des mises à mort à la Destination Finale jubilatoires et macabres à souhait.
- Une intrigue suffisamment méthodique et bien construite pour tenir en haleine durant plus de 8 heures.
- L’enveloppe glaciale de ses somptueux décors modernes, qui s’allient parfaitement aux âmes de la famille Usher.
Les – :
- Contrairement à plusieurs de ses précédentes productions, le showrunner peine à insuffler de l’épouvante à son récit, et encore moins de l’émotion.
- Malgré ses faux airs de Succession assez délectables, le récit contemporain de Mike Flanagan manque d’une véritable nuance.
- Son postulat moderne s’avère à double tranchant, de ses décors à son propos. La preuve son sarcasme envers notre ère capitaliste et tordue manque de mordants.
- Si sa mise en scène ne manque pas d’élégance, elle est (quasiment) dépourvue d’envolés graphiques.
MA NOTE : 14.5/20
Crédits
CRÉATEUR : Mike Flanagan
AVEC: Bruce Greenwood, Mary McDonnell, Carla Cugino, Henry Thomas, Kate Siegel, Rahul Kohli, Samantha Sloyan, T’Nia Miller, Ruth Codd, Sauriyan Sapkota,
Carl Lumbly, Zach Gilford, Willa FitzGerald, Michael Trucco, Katie Parker, Crystal Balint, Matt Biedel, Kyliegh Curran, et Mark Hamill (…)
ÉPISODES : 8 / Durée (moyenne) : 1h / DIFFUSION : 2023
GENRE : Drame, Thriller, Epouvante-horreur / CHAÎNE : Netflix