THE CROWN – saison 5

Dans l’ombre du temps

EN DEUX MOTS : 2 ans séparent chacun des Actes de la saga royale de Netflix : THE CROWN. L’un des rares joyaux de la plateforme encore en diffusion. Aujourd’hui, celui-ci arrive à l’un de ses moments névralgique avec une cinquième saison qui renouvelle intégralement son casting. Pour la troisième fois. Et la dernière fois.

En se rapprochant inexorablement de notre ère contemporaine, son retour cette année à d’autant plus de sens avec l’actuel décès de la Reine. Un décès survenu le 8 septembre dernier, à l’âge de 96 ans et après 70 ans de règne. La mythique Élisabeth II est dorénavant remplacée à l’écran par l’actrice britannique Imelda Staunton. (Bien connue pour son rôle iconique de Dolores Ombrage dans la saga Harry Potter).

TIME TO TIME

Cette Acte III débute par un épisode solide bien que peu renversant.  »Queen Victoria Syndrome » place cette nouvelle intrigue en 1991. Une année rapprochée d’autres qui mettront à mal la famille royale, et l’image de la monarchie par l’opinion publique. Au-delà que cette reprise nous permettra de nous acclimater sommairement avec un nouveau casting récurrent, il va aborder une thématique centrale. Celle du temps qui passe.

Et c’est bel et bien une saga qui parle du temps dont il s’agit. D’un règne qui dure et d’une famille hors-norme qui évoluent en biais d’époques changeantes. Son créateur, Peter Morgan (toujours à l’écriture des différents épisodes), va alors dresser un parallèle simple sur l’opposition des générations royales. Au cours de son épisode de reprise, et de la saison entière.

« A House Divided »

Intitulé de la saison 5 de The Crown

Les premiers instants de cette nouvelle saison s’ouvrent sur un discours de la Reine durant sa jeunesse royale. Sous les traits de la stupéfiante Claire Foy, naturellement. (Nostalgie, déjà). Le parallèle en question ce fait sur le Britannia, splendide yacht inauguré en 1947 et qui, en 1991, est sur le déclin. A l’image du portrait royal, largement critiqué pour son esprit conservateur.

Ce qui nous renvoie en opposition à la nouvelle génération. Mûre et pleine de vigueur, encore. Ici représentée par l’irascible successeur Charles III (Dominic West) et la fissurée Diana (Elisabeth Debicki). Et pourtant par-delà tout cette magnificence le tableau se fissure peu à peu. Et l’écart se creuse toujours abondamment entre les époux royaux. Rien de bien neuf thématiquement, surtout après les débuts fracassants d’un jeune mariage déjà décortiqué en saison précédente.

Ô MA JOLIE MONARCHIE

Non la GRANDE force de THE CROWN n’est plus dans son propos. Qui fait largement polémique auprès de la famille Windsor et des tabou liés à leur statuts. Sa principale force réside dans sa démonstration technique aussi gracieuse que les décors qu’elle dévoile en permanence. Car dans cette démonstration de haute volée se glissent les portraits parfois aussi empathiques que antipathiques de la famille royale. 

Et pour incarner ses principaux membres, tout le talent de la production était (encore) de trouver chaussures à son pied. Chose qu’elle réussit haut la main (majoritairement) avec un nouveau casting cinq étoiles.

Outre les trois figures centrales déjà évoqués on y découvre notamment Jonathan Pryce en Duc d’Edimbourg. Bien moins magnétique que par le passé, mais très juste de son développement. Et particulièrement avec le recul d’un mariage pétri de compromis mais d’un profond respect mutuel. Malgré la division. Parallèlement, c’est Lesley Manville qui parvient à rendre sa grâce au personnage de Margaret. La sœur frivole, sœur malheureuse en amour, toujours.

Reste le curieux portrait central, incarnée par la rigueur froide d’Imelda Staunton, qui se retrouve en partie dans l’ombre. Si physiquement l’actrice de 66 ans colle à merveille avec le portrait de la Reine au début des années 90, on ne peut que s’étonner de sa plus faible présence à l’écran. Un retrait qui a naturellement pour intérêt de se pencher sur les profils de Charles & Diana qui ne cesse d’apparaître dans les tabloïds au cours des années 90. Suite aux déboires liés à leur mariage.

J’ai tout particulièrement apprécié une certaine nuance à mi-saison sur le profil de Charles. Puis en fin de saison. Moins détestable qu’auparavant et surtout qui colle parfaitement aux personnages défaillants qu’a toujours su interprété Dominic West. (on pense à The Wire et The Affair).

ÉMOTIONS ENTERRÉS

Néanmoins, et comme toujours au cours du déroulement de la saga, THE CROWN parvient à se détacher de sa ligne centrale pour mieux la définir. Ce faisant le temps d’un épisode, parfois deux, ou avec la moitié d’un autre, elle présente des figures secondaires exquises. C’est ainsi que la magie de la production agit le plus et dévoile ses meilleurs moments d’émotions. Cette saison on se souviendra notamment du portrait d’Al Fayed (Salim Daw) lors de l’épisode 3 « Mou Mou ».

Ce qui va nous amener à une délicieuse rencontre en fin d’épisode et à un concours de circonstances funeste. Car l’émotion se dévoile encore sous plusieurs nuances dans ce drame. Et en plus d’être une fable historique et un biopic sur la famille royale, sa partie dramatique n’est pas en reste. Le destin tragique de Diana en est le point d’orfèvre. L’actrice australienne qui l’incarne aujourd’hui s’avère bouleversante. Et sera sans aucun doute convaincre l’ensemble du public.

Se sont dans ses moments le plus simples que la série brille le plus. Notamment dans un divorce royal ponctué de différents portraits publics. Alors que deux anciens mari et femme se laisse bercer par la simplicité d’un repas improvisé. Jusqu’à l’éclatement inévitable.

On pourra regretter quelques portraits secondaires un brin sous-exploités. Malgré des acteurs de valeurs. Comme Jonny Lee Miller dans le rôle d’un premier ministre sympathique, ou Olivia Williams en Camilla, la femme de l’ombre. Et surtout le nombre restreint de moments réellement éblouissants durant cette saison. Comme l’inévitable décès de Diana qui apparaîtra finalement dans la prochaine (et dernière) saison.

THE CROWN maintient néanmoins sa grandeur et sa maîtrise inégalées dans le genre. Grâce à sa technique de cinéma léché, et son sens du drame intime mais tentaculaire.


CONCLUSION

Les + :

  • Un délicieux et permanent moment de cinéma
  • Un nouveau casting mûr et très globalement convaincant
  • La nuance parfaite des différents portraits royaux
  • La grande simplicité intime et tentaculaire d’un récit qui décortique une monarchie unique en son genre

Les – :

  • La première saison qui semble (très) légèrement composé de quelques épisodes de remplissage
  • Un manque d’éblouissement dans un récit pourtant richissime

MA NOTE : 16/20

CRÉATEUR : Peter Morgan

AVEC : Imelda Staunton, Jonathan Pryce, Dominic West, Lesley Manville, Jonny Lee Miller, Claudia Harrison, Olivia Williams, Marcia Warren, et Elizabeth Debicki,

mais aussi : Khalid Abdalla, Salim Daw, Timothy Dalton, Natascha McElhone, Prasanna Puwanarajah, Bertie Carvel (…)

ÉPISODES : 10 / Durée : 52mn / DIFFUSION : 2022

GENRE : Drame, Historique, Biopic / CHAÎNE : Netflix

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