EN DEUX MOTS : Événement majeur de 2024 sur grand écran, GLADIATOR II se pose comme la suite directe du film de Ridley Scott, datant de l’année 2000. Ainsi, 24 ans après, l’octogénaire bien actif met de nouveau en scène un péplum conséquent, qui a lourde tâche de ressusciter la légende d’un de ses films les plus cultes.
Des années après avoir assisté à la mort du héros vénéré Maximus aux mains de son oncle, Lucius est forcé d’entrer dans le Colisée lorsque son pays est conquis par les empereurs tyranniques qui gouvernent désormais Rome d’une main de fer. La rage au cœur et l’avenir de l’Empire en jeu, Lucius doit se tourner vers son passé pour trouver la force et l’honneur de rendre la gloire de Rome à son peuple.
AlloCiné
Longtemps désiré et seulement officialisé en 2018, les délais de production ont eu raison de sa sortie qui a subi de plein fouet la crise d’Hollywood. C’est seulement à l’automne de cette année qu’elle qu’apparaît au cinéma.
Un film mastodonte dont les rumeurs financières vont bon train et qui s’impose comme un blockbuster spectaculaire. Du moins, depuis le temps, avec un teasing conséquent et généreux, la suite de GLADIATOR a fait monter la pression. Pour un résultat à double tranchant toutefois.
À la fois très fidèle à son aînée, sans tomber dans le jeu de la copie conforme, le film avait en effet beaucoup à faire pour convaincre. Le retour du mythique réalisateur se révèle, lui aussi, être à double tranchant, compte tenu de la qualité vacillante de ses dernières productions. Enfin, pour une continuité logique à sa fin épique, le péplum dévoile un nouveau visage pour son histoire, avec une filiation direct avec son héros précédent.
L’outsider Paul Mescal succède donc au charismatique Russell Crowe pour une nouvelle démonstration d’héroïsme. Un profil agréable et parfois surprenant, même s’il dénote complètement de l’image du petit garçon qu’on connaissait.
Mais malgré son savoir-faire, GLADIATOR II ne croule-t-il pas sous le poids de son aînée ? Ou cette suite intelligemment tardive parvient elle à tirer son épingle du jeu ? Hélas, malgré sa proposition à mi-chemin entre l’hommage et le renouveau, elle ne dépasse jamais son aînée. Une comparaison obligatoire vu son parti pris scénaristique.
Critique à chaud et légèrement amère, suite à l'avant-première mondiale survenue le dimanche 10 novembre 2024.
Péplum legacy
Sous la plume de David Scarpa, à qui l’on doit le décrier Napoléon et le fade Tout l’argent du monde (tous deux de Ridley Scott), GLADIATOR II a l’ambition de raconter une nouvelle grande épopée à l’époque romaine tout en conciliant ses enjeux passés. À ce jeu-là, sa première heure a fort à faire, mais dispose d’une mise en bouche grandiose. Néanmoins, outre un certain sens du spectacle, le film dévoile brièvement ses lacunes en cours de route.
Malgré sa durée conséquente, ce second opus ne brille pas par sa mise en scène et s’avère bien moins époustouflant en termes d’hémoglobine et d’ambiance, comme le démontre son montage parfois abrupt.
Difficile également de passer après les prestations du charismatique Russell Crowe et du détestable Joaquin Phoenix. Pour cela, le choix d’un inconnu comme tête d’affiche et de plusieurs antagonistes face à lui s’avérait être une bonne idée. Notamment quand la nouvelle coqueluche Pedro Pascal se dresse comme principale chimère du valeureux Hanno/Lucius. L’acteur d’origine chilienne est comme toujours très appréciable, notamment pour sa part d’humanisation.
Dans des profils plus caricaturaux, les révélations télévisuelles Joseph Quinn (Stranger Things) et Fred Hechinger (The White Lotus) ne surjouent pas tant, mais subissent des caractérisations trop appuyées. Et surtout manquent cruellement d’origin story pour satisfaire.
En 2h30, cette suite avait toutefois l’ambition d’à nouveau construire une histoire épique et historique en posant ses enjeux sur 3 actes. Tout en apportant une vision cohérente et naturelle à la légation de Maximus via le profil tiraillé de Lucius. Ici, se pose la seule rescapée du premier film, Connie Nielsen. (et plus succinctement Derek Jacobi, même si leurs prestations sont toutes les deux oubliables). Cette continuité, cette filiation par le sang est, pour moi, la principale faiblesse de son scénario.
Divertir la foule. Mais à quel prix ?
Néanmoins, c’est le renommé Denzel Washington qui pouvait tirer son épingle du jeu grâce à son personnage riche de potentiel. Un profil d’ailleurs inspiré d’une réelle figure historique, à l’instar des deux tyranniques empereurs. L’acteur de 69 ans semble s’en donner à cœur joie et le résultat allie à merveille : ambition politique et manipulation. Le résultat le plus convaincant parmi le nouveau trio gagnant en tête d’affiche.
Parallèlement, on peut pardonner ses incohérences historiques pour le bien d’un sens du spectacle conséquent. Malgré tout, hormis sa charge du rhinocéros, sa bataille navale à petite échelle se révèle par exemple trop peu divertissante. Notamment quand son montage réduit ses moments à quelques minutes. Cerise sur le gâteau, les CGI de ses requins (et avant ça ses singes) manquent de finesse et dénotent face à ses décors grandioses.
En plus de son statut culte, le premier Gladiator jouissait d’une bande originale magistrale sous la voix de Lisa Gerrard. Une notion indispensable à mes yeux et qui ne révèle aucun morceau d’exception ici puisque cette b.o s’appuie seulement sur un remixage de ses morceaux les plus emblématiques.
Hormis son sens du spectacle, grandiose à l’époque et qui aujourd’hui s’avère moins frappant, le film de 2000 avait également su apporter beaucoup d’émotions à son sens épique. D’autant plus avec une fin parfaite et définitive. Fatalement, ici, GLADIATOR II avait soit la possibilité de la redite ou d’un renouveau plus sage vers la continuité. Troisième option, transformé ses enjeux dramatiques en cours de route pour surprendre en moment de sa conclusion. Le film mixe un peu le tout en s’avérant meurtrier, mais échoue malgré tout dans sa proposition d’émotion.
Conclusion
Ce qui est sur ce que Ridley Scott à nourri de grandes ambitions pour son nouveau péplum. De ce fait, bien bavard, il n’a pas hésité à annoncer que son GLADIATOR II fut son plus gros film d’action tournée jusqu’alors (mais pas le plus impressionnant) et qu’il nourrit l’envie d’une suite après celui-ci. De quoi huilé la machine, tandis qu’à l’arrivée, ce nouvel opus ne parviendra pas à obtenir ce même statut culte. Et pour cause, il n’en a pas la maestria d’antan.
Ainsi, malgré un divertissement indéniable, à mes yeux, GLADIATOR II peine à se montrer captivant. Malgré quelques interprétations réussies, des décors conséquents ou quelques lignes de scénario bien senties, le film perd sa dimension épique. Son sens du frisson. Un résultat qui atteint son apogée dans l’affrontement majeur qui oppose le Général Acacius à Lucius. Un rendez-vous manqué ou les émotions contradictoires auraient pu renverser toute sa dramaturgie. Demeure un blockbuster au souffle court.
Les + :
- Une suite tardive et aux moyens conséquent, comme le prouve des décors souvent somptueux.
- De nouvelles têtes d’affiche convaincante. Paul Mescal diffère du profil de Maximus, Pedro Pascal use de son charisme et Denzel Washington s’éclate en marchand d’esclaves ambitieux.
- Quelques idées et pistes narratives intéressantes, à l’instar d’un déroulement entre le renouveau et l’hommage.
- Quelques moments d’action divertissants.
Les – :
- Un film de 2h30 qui croule sous ses ambitions, comme le démontre son montage irrégulier.
- La preuve avec un scénario qui ne fonctionne qu’en partie et qui s’avère entravé par sa partie légation ronronnant et sans émotion.
- Ou des scènes d’action spectaculaire mais réduite en intensité, à l’instar d’un affrontement au sommet qui tourne court.
- Une partie historique (incohérente, mais on lui pardonne) tout juste sauvée par des manigances politiques classiques et sans grandes profondeurs.
- Quelques lacunes esthétiques. À l’image de quelques CGI grossiers ou des affrontements qui manquent d’hémoglobines.
- Hormis son trio masculin en tête, ses seconds rôles disposent de caractérisations qui manquent de finesse (comme les deux frères jumeaux empereurs) ou même de portée émotionnelle (comme la mère de Lucius, Lucilla).
- Des morts qui tournent court, à l’instar de son sens du spectacle.
MA NOTE : 12.5/20
Les crédits
RÉALISATION : Ridley Scott / SCÉNARIO : David Scarpa
AVEC : Paul Mescal…, Pedro Pascal…, Joseph Quinn, Lior Raz, Fred Hechinger, avec Connie Nielsen, et Denzel Washington,
mais aussi : Derek Jacobi, Yuval Gonen, Peter Mensah, Tim McInnerny, Alexander Karim, Rory McCann (…)
SORTIE (France) : 13 novembre 2024 / DURÉE : 2h30